Mine de rien, Deathhammer file tranquillement vers ses quinze ans de carrière. Après avoir enchaîné démos, EP et compilations pendant la première partie de son existence, le groupe norvégien en est désormais à son quatrième album. Plus besoin de présenter le duo infernal, devenu au fil du temps une valeur sûre pour tous les old-schoolers férus de blackened thrash/speed underground. Si les deux premiers full-length
Phantom Knights (2010) et
Onward To The Pits (2012) venaient effectivement d'une formation talentueuse, ce n'est pour moi qu'à partir de l'excellent
Evil Power (2015) que Deathhammer a franchi le cap entre bon groupe et usine à orgasme auditif. J'ai d'ailleurs grave honte de ne toujours pas l'avoir chroniqué alors que j'avais promis de le faire avant le nouvel album. Tant pis, ne retardons pas davantage celle de ce
Chained To Hell sorti début octobre chez Hells Headbangers Records et que j'avais déjà envie d'adorer rien qu'en voyant cette pochette absolument géniale.
Le démon cornu, mascotte du groupe depuis toujours, est donc de retour. Et comme ce bon vieux Julio, il n'a pas changé. Qui aurait pu en douter de toute façon? Deathhammer, c'est le genre de groupe dont on sait pertinemment qu'il va suivre le même chemin, celui du bon vieux thrash à l'arrache du début-milieu des années 1980, jusqu'au bout, c'est à dire jusqu'à la mort, probablement des suites d'un coma éthylique. On aurait par contre pu penser qu'à ce petit jeu somme toute limité, les Scandinaves finiraient par lasser. Ce sera peut-être le cas un jour mais ce n'est en tout cas pas pour maintenant.
Chained To Hell passe en effet très bien même après une vingtaine d'écoutes et s'avère une nouvelle réussite pour le fantasque Sergeant Salsten et son comparse Sadomancer. L'opus fait mouche à quasiment tous les niveaux. La production roots très ancrée dans le début des eighties, en particulier la batterie pleine de réverbération, est un vrai régal pour les amateurs de son vintage. Deathhammer joue en tchouka-tchouka presque continu pour une efficacité de tous les instants (il y a même un peu de blastouille bordélique sur "Chained To Hell"!), ne s'accordant une vraie pause mid-tempo plus ambiancée que sur l'excellent instrumental "Into The Burning Pentagram". Répétitif? Peut-être un peu mais sur une demi-heure, ça ne se ressent absolument pas. D'autant que la qualité du riffing est à nouveau au rendez-vous. Quel plaisir d'entendre ces riffs sauvages poussiéreux déglingués plus old-school tu meurs. Les solos ne sont pas mal non plus si l'on met de côté certains un peu trop vite expédiés. Et que dire du chant arraché tout pété de Salsten qui part régulièrement en couille dans des intonations aiguës stridentes à la manière d'un Schmier dans sa prime jeunesse? Jouissif à mort! Même la basse ressort un peu de temps en temps. Tout ça mélangé à la sauce norvégienne, ça nous donne huit morceaux furibards, dont deux exhumés de leurs vieilles démos ("Evil" et "Tormentor" (un vrai groupe de thrash a forcément un morceau nommé "Tormentor" dans sa discographie, n'est-ce pas?!)), qui font passer un sacré bon moment à qui possède une âme de brocanteur ou d'archéologue. "Rabid Maniac Force", "Black Speed Inferno", "Threshold Of Doom", "Chained To Hell" histoire d'en citer quelques uns sans faire toute la tracklist, c'est que du bonheur!
Difficile ainsi de vraiment reprocher quoique ce soit à Deathhammer qui, sous ses airs de branleurs adulescents ne cherchant qu'à s'éclater et foutre le bordel, à l'image de cette pochette qu'on croirait dessinée par un jeune cancre rebelle sur un cahier de classe pendant un cours de maths dont il n'a rien à foutre, maîtrise son art à la perfection. Il y a du talent chez ce groupe, du génie même! Alors certes on est dans le passéisme le plus complet mais au rayon des nombreuses formations s'adonnant à l'hommage aux vieilleries antiques, les Norvégiens s'affichent tout en haut des étagères. Leur sens inné du riff, leur feeling démoniaque, leur appropriation parfaite d'une époque, leur état d'esprit punk, tout cela n'a que peu d'égal parmi la concurrence. Ça a beau être du réchauffé, ça sonne étonnamment frais à mes oreilles ravies d'être à nouveau sauvagement violées par ce son d'un autre âge. Je garde toutefois une préférence pour l'œuvre précédente
Evil Power qui reste pour le moment leur apogée, ce
Chained To Hell se plaçant juste derrière sans rougir. C'est ainsi tout de même un sans faute que continue de réaliser Deathhammer, album après album. Fans des années 1980, de thrash, de speed, de proto-black, du
Show No Mercy de Slayer, des premiers Destruction, du early-Kreator, de Sabbat ("Evil"!), du old-Whiplash, vous ne pouvez pas passer à côté de ce nouveau coup d'éclat du Marteau de la Mort.
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01/11/2018 23:26
01/11/2018 21:22