Aujourd'hui les enfants, petit cours d'histoire. Revenons en 1991, quand la plupart d'entre-vous regardait le Club Dorothée ou le Disney Club et pensait que la meilleure chanson du monde était le générique de Tic et Tac (c'est vrai que ça envoyait sévère ce truc quand même!). Enfin bref cette année, un groupe new-yorkais allait imposer sa propre vision de la brutalité à une scène médusée. J'ai nommé le grand Suffocation.
Le quintette se forme en 1990 et sort rapidement une démo 3 titres, "Reincremated". C'est le label Relapse Records qui se chargera de leur premier EP,
"Human Waste". Suffocation s'impose déjà comme un groupe à part. La même année, ils signent un contrat avec Roadrunner Records, label spécialisé dans les groupes extrêmes à l'époque. Il est maintenant temps pour les Américains de livrer leur premier véritable album, "Effigy Of The Forgotten". La révolution est en marche.
Avant l'arrivée de Suffocation, le death se limitait à une brutalité simpliste, à savoir des structures prévisibles, sans imagination, répétitives et rapidement ennuyantes. Le genre était encore loin d'être aussi populaire qu'il le serait dans les années à venir. Avec "Effigy Of The Forgotten", Suffocation allie une brutalité sans concession avec une technicité bluffante et y ajoute des breaks impressionnants de lourdeur.
Les morceaux sont truffés de changements de tempo (toutes les 20 secondes), on voyage entre du rapide (le début énorme de "Infecting The Crypts" notamment, "Reincremation"), du mid-tempo, et des breaks lents, très lourds (celui de "Habitual Infamy" est un des meilleurs). Suffocation excelle à la fois dans les nombreuses accélérations où les blasts font la loi et qui transforment un pit en enfer (rha ce "Mass Obliteration", le génialissime "Seeds Of The Suffering"), et les ralentissements de tempos où les riffs lents et oppressants sont un vrai régal (citons entre autres "Liege Of Inveracity", le mythique "Effigy Of The Forgotten", "Seeds Of The Suffering"...). Il est difficile de faire ressortir un titre en particulier tant tous sont vraiment excellents. Rien n'est à jeter, les musiciens sont impressionnants de maîtrise (et ce n'est que le premier album rendez-vous compte!). Les multiples riffs que nous balancent Doug Cerrito et Terrance Hobbs et dont les morceaux regorgent sont aussi jouissifs les uns que les autres. Les soli sont bizarres, complexes, rapides, destructurés, chaotiques, souvent torturés avec le vibrato (le meilleur étant selon moi celui de "Seeds Of The Suffering"). La basse de Josh Barohn joue aussi son rôle, s'affirme et ne se cache pas derrière les guitares (le début de la chanson éponyme, le break de "Infecting The Crypts" sur fond de pelletage), renforçant ainsi la lourdeur des breaks. Et que dire de Mike Smith, le batteur infatiguable, qui nous assène ses blasts dévastateurs et nous harcèle avec sa double-pédale qui fait des merveilles sur les passages ultra-lourds. Gloire aussi au charismatique chanteur Frank Mullen et sa voix sur-gutturale (qui évoluera plus tard pour devenir cette voix étouffée caractéristique du groupe). Suffocation porte décidément bien son nom: il ne laisse jamais l'auditeur respirer, mais comme on est un peu maso on en redemande! L'album nous plonge dans une atmosphère oppressante très bien rendue de laquelle il est difficile de s'extirper.
La complexité des morceaux les rend cependant difficilement assimilables. Plusieurs écoutes sont nécessaires pour digérer ce déluge de riffs, de blasts, de changements de rythme et pour apprécier la musique de Suffocation à sa juste valeur. Mais une fois qu'on y est, je vous garantis que vous ne pourrez plus vous en passez.
Finalement, le seul défaut de cet album reste la production. N'oubliez pas qu'il est sorti en 1991, il y a déjà 14 ans et le son a pris quelques rides. Les compos se trouvent ainsi un peu desservies par cette petite faiblesse mais rien de grave, "Effigy Of The Forgotten" reste complètement audible, surtout que Roadrunner l'a réédité en 2003.
Prouvant avec brio qu'on peut jouer une musique à la fois extrêmement brutale et technique, Suffocation a tout de suite fait la différence. "Effigy Of The Forgotten" reste une référence pour beaucoup et le groupe est cité par de nombreux combos comme influence majeure (Dying Fetus en tête). Mais qui dit précurseur dit également suiveurs. Une nouvelle scène va ainsi rapidement émerger, s'essayant à la recette new-yorkaise. Maintes fois copié mais jamais égalé, c'est ce qu'on appelle un groupe culte.
P.S.: à noter que c'est George "Corpsegrinder" Fisher de Monstrosity (Cannibal Corpse aujourd'hui) qui fait les backing vocals sur "Reincremation" et "Mass Obliteration"!
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