Mystras - Castles Conquered and Reclaimed
Chronique
Mystras Castles Conquered and Reclaimed
Nouveau venu au sein de la scène black metal, Mystras a de quoi surprendre et titiller la curiosité de tout amateur du genre. Pas de passage par la case court format et un premier album qui sort en 2020, peu de temps après sa formation, via le label qualitatif italien I, Voidhanger Records – voilà qui augure du bon ! Ce sentiment va d’ailleurs s’accroître en apprenant que le géniteur de cette entité n’est autre qu’Ayloss, du one-man band Spectral Lore. Très prolifique, le Grec – qui est également membre de Divine Element et Saga of the Ancient Glass – continue donc de donner vie à ses idées et ses passions à travers différents styles, allant du black/death mélodique au dungeon synth. Avec son nouveau projet notre homme dévoile à la fois un grand attrait pour la musique médiévale ainsi qu’un profond attachement pour le black metal « à l’ancienne » (bien raw, sobre et authentique). Au-delà du simple hommage, Castles Conquered and Reclaimed est surtout une nouvelle pierre à l’édifice du black metal médiéval (parmi les excellentes réalisations de formations actuelles telles que Flamen, Obsequiae ou encore Darkenhöld).
À l’image de l’artwork épuré exécuté par Loukas Kalliantasis et rappelant une ébauche, la musique de Mystras est très brute. La surprise s’installe au fur et à mesure, frappé par l’âpreté de l’ensemble et de la production organique à souhait. Autre entité, autre ambiance, où Alyoss semble faire arrière toute. Dès les premières notes du longue durée tous les signaux s’allument, traçant la voie jusqu’à Nattens Madrigal - Aatte Hymne til Ulven i Manden. Vous êtes comme pris dans une tempête, soufflé par un grésillement continu. Un maelström duquel s’échappent des riffs accrocheurs et de belles lignes mélodiques qui accrochent irrémédiablement l’oreille comme sur le magnifique « Storm the Walls of Mystras ». Les accalmies qui ponctuent l’album avec notamment l’introduction très folk de « The Murder of Wat Tyler » ainsi que les quatre pistes instrumentales renforcent cet aspect roots, limite pagan sur certains passages, renvoyant encore une fois à la scène scandinave. Les poils se dressent au gré des minutes et vous vous laissez transporter loin, très loin, en des temps anciens sur les champs de batailles. Les chœurs grondent, portant l’insurrection qui sourde à travers les compositions. Néanmoins, le one-man band arrive à trouver le juste équilibre entre l’aspect très viscéral et rude des sonorités grâce à des élans épiques extrêmement poignants (cf. la véhémente « The Zealots of Thessaloniki »). Les émotions sont parfaitement retranscrites, tombant toujours quand il faut, que ce soit par des leads jouissives ou encore un chant clair totalement habité.
Outre son habileté en tant que musicien et compositeur, Alyoss démontre ici son aisance à construire un univers riche et personnel. Car si les influences de la seconde vague black metal se font sentir, la thématique de Castles Conquered and Reclaimed ainsi que son traitement en font une œuvre à part. Mystras nous conte des histoires à travers les yeux de la majorité opprimée et paupérisée – l’ordre des laboratores, dont la majorité est constituée par la paysannerie – notamment via la pièce magistrale « The Murder of Wat Tyler ». Pas de guerres à proprement parlé, ni de preux chevaliers se disputant des territoires mais une classe asphyxiée qui souhaite se faire entendre quitte à prendre les armes. La révolte tonne à travers ses chants de lutte parfaitement menés, entre fureurs incontrôlées (le titre introductif en est le meilleur exemple), montées en puissance avec de beaux riffs aériens, des chœurs fédérateurs ou encore des airs plus mélancoliques comme sur la reprise du titre folklorique anglais « The Cutty Wren » (rhâ ce violon ! Impossible d’ailleurs de ne pas avoir une pensée pour Dawn Ray’d). Par leurs contributions, les musiciens et musiciennes de session donnent davantage de relief à l’album par l’utilisation d’instruments traditionnels – les courts titres instrumentaux semblant être des mises en bouche. Chacun dégage ses propres tonalités, vous faisant voyager à travers l’Europe (cf. la chanson populaire occitane « Ai vist lo lop »).
Mystras ! Quel nom pouvait mieux seoir que cette ancienne cité grecque en ruines, lieu de convoitise passé aux mains de différents empires, pour incarner le black metal anti-impérialiste d’Alyoss. Ses origines ressortent d’ailleurs autant sur le fond que sur la forme avec de pures merveilles telles « Storm the Walls of Mystras » et « The Zealots of Thessaloniki » – précédée des notes orientales de « O Tsakitzis ». Sans aucun temps mort, Castles Conquered and Reclaimed vous fait vibrer durant presque cinquante minutes, jusqu’au tubesque « Wrath and Glory » faisant office d’apogée. L’envie de brandir le poing vous prend, gagné par l’émotion – et des paroles trouvant toujours résonance. Une bonne petite surprise qui aurait pu avoir davantage d’impact avec une production plus lisible mais qui laisse présager de très belles choses. Vivement la suite !
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