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Desertfest Anvers 2016 - Jour 3

Live report

Desertfest Anvers 2016 - Jour 3 Castle + Dorre + Duel + Earthship + Goat + Josefin Öhrn + The Liberation + Komatsu + La Muerte + Moaning Cities + My Sleeping Karma + Tau + Uncle Acid And The Deadbeats + Vodun
Le 16 Octobre 2016 à Anvers, Belgique (Trix)
Dimanche. Pas envie de me lever. Mais c'est festival. Mais la flemme. Mais quand même. Bouge-toi le cul AtomicSchnitzel. Pourquoi je me parle à moi-même?

Retour du côté de la Vulture Stage, pour assister au concert de Josefin Öhrn + The Liberation, aka « pop rétro chic inspirée Jane Birkin et Françoise Hardy ». La montagne de mes préjugés s'est balayée en un revers de main devant la prestation des Suédois, qui s'est avérée être une surprise Ô combien plaisante. Au programme, une mixture de dream pop et de krautrock, où les morceaux alternent entre moments ultra-sensuels et passages totalement hallucinatoires et psychédéliques, le tout porté par le chant de velours de Josefin. C'est assez drôle de voir un public stoner typique se mettre à danser dès 15h, mais difficile de s'en empêcher, le propos est bien trop entraînant. Assez amusant, aussi, de constater la présence d'un morceau chanté en français. Alors que j'avais peur d'une prestation kitsch au chant variétoche et morne, je me suis retrouvé devant l'une des plus belles découvertes de ce festival. Comme quoi, les bonnes surprises ne sont pas là où on l'imagine parfois.

J'espérais avoir une bonne surprise du côté de Dorre, à priori plus dans mon créneau mais je n'ai pas été très emballé par la performance des Belges. Leur doom est lourd et massif, aucun doute là-dessus mais si j'étais satisfait au début du set, l'aspect répétitif des compositions terminera par avoir raison de moi et mon enthousiasme. Rien à redire du côté des musiciens tous investis et surtout d'un batteur qui cogne comme si sa vie en dépendait, mais à force de jouer sur le même tableau pendant quarante minutes, je n'en retiens plus grand-chose. A voir avec le temps, je suis convaincu qu'avec un peu plus de maturité le résultat sera excellent.

Sur la Desert Stage, les Belges de Moaning Cities se produisent devant un public nombreux. La renommée grandissante du quatuor y est pour beaucoup, celui-ci ayant arpenté routes et festivals pour se faire une solide réputation scénique. Seulement, encore une fois tout est histoire de goûts et de couleurs, et si les deux premiers morceaux plus rock m'ont plu sans me renverser, la suite ne me captivera pas des masses. Il y a pourtant de quoi faire : les morceaux sont bons, la sitar apporte une véritable originalité dans ces sonorités, le chant est assuré impeccablement par Valérian et sa consœur bassiste est une pile électrique. Un bilan globalement positif mais qui ne m'a pas réellement donné envie d'approfondir la discographie du quatuor. Mais nul doute que Moaning Cities aura gagné de nombreux fans, ce qui est tout à fait mérité.

Une journée en demi-teinte qui continuera sur cette lancée avec Komatsu, groupe de stoner néerlandais plus générique tu meurs. Rien de bien intéressant à dire concernant ce quatuor sans grand intérêt, si ce n'est que j'ai trouvé le chant particulièrement repoussant et qu'au bout de trois titres, j'ai pris la poudre d'escampette pour aller me placer à un endroit stratégique pour profiter d'Earthship. Vraisemblablement pas la meilleure journée du festival.

J'ai eu l'occasion de me confronter au sludge des Allemands l'an passé lors du New Noise Festival, et celui-ci m'avait fait une bonne impression. Malheureusement, celle-ci peinera à se confirmer à nouveau en Belgique. Qu'on se comprenne bien, le concert n'était pas mauvais mais la formation a eu la mauvaise idée de se présenter sous forme de trio, ce qui lui fait perdre en force de frappe et en mordant. Les morceaux apparaissent comme moins tranchants, moins pesants et l'absence d'une seconde guitare se fait cruellement ressentir. Jan Oberg et sa bande ont de l'expérience et investissent la scène comme il se doit, en dépit d'un line-up remanié comprenant un nouveau batteur, et le son est impeccable pour profiter comme il se doit de ce sludge qui tabasse, mais au lieu d'un pugilat, on avait l'impression de recevoir une pichenette. Voilà, j'ai exprimé toute mon amertume, je préfère conclure sur du positif : Earthship, c'était bien mais reprenez une seconde guitare, vraiment.

Ce concert, là, je l'ai attendu avec une grande impatience. Je n'avais pas revu My Sleeping Karma depuis 2012, année où j'ai découvert les Allemands complètement par hasard dans un festival où je tentais de fuir la prestation d'Edguy. Et ce stoner psyché m'avait complètement envoûté, transporté bien loin de toutes considérations festivalières durant 40 minutes magistrales. Entre temps, MSK a sorti deux albums que j'ai à peine écouté, mais qui ne constitueront pas le plus gros de la setlist, la part du lion étant offerte au premier en date. Et ce précieux souvenir ne sera pas ébranlé en Belgique, le groupe s'avérant magistral une fois de plus. Si de nombreuses formations psyché préfèrent monter en puissance au fur et à mesure, My Sleeping Karma n'a pas le temps et s'emballe dès les premières minutes, maintenant la pression tout au long de la composition, sans que les moments planants n'apparaissent comme décousus ou incohérents. Et contrairement à un Colour Haze la veille où les musiciens regardaient leurs pieds et semblaient oublier la présence du public, leurs confrères allemands ont une attitude parfaitement inverse : souriants, communicatifs, s’échangeant des regards, on ressent une complicité de chaque instant qui est sûrement l'un des ciments de cette parfaite cohésion de groupe. Pas le temps de s'ennuyer, les 50 minutes attribuées à My Sleeping Karma défilent à la vitesse de l'éclair et lorsque les Allemands tirent leur révérence, on a peine à croire que cette prestation est déjà terminée.

Après une telle performance, le concert suivant avait de grandes chances d'être fade. Mauvaise pioche. Duel est Américain, fait du stoner, est content de jouer en Europe et balance bûche sur bûche devant un public qui n'était pas prêt à une mandale pareille. Ces types ont une énergie débordante et incroyablement communicative, qui met les festivaliers à terre au bout de quelques riffs, qui nous font bien comprendre que du stoner de qualité, c'est encore possible d'en trouver en 2016. Tom Frank est un frontman de premier ordre, excellent au chant et haranguant la foule comme il se doit, ce type pourrait faire le show à lui tout seul mais ses confrères ne sont pas en reste, et tout comme dans le cas de My Sleeping Karma, c'est l'harmonie de groupe qui fait toute la différence. Leur premier opus Fears of the Dead sera donc interprété, ainsi qu'un (ou plusieurs?) nouveaux morceaux, et au bout du compte, on en aurait bien redemandé tellement la fessée était inattendue. Foncez les voir immédiatement dès leur prochain passage sur le vieux continent.

J'avoue que je n'ai jamais posé une oreille sur La Muerte, formation belge réputée culte et ayant été fondée dans les années 80, puis reformée récemment. Un événement assez particulier, donc, que d'assister à un concert de ce groupe à la musique… particulière. J'aurais bien du mal à vous décrire ce qui s'est produit sur la Desert Stage ce jour là, mais impossible de nier l'expérience des musiciens, tous véritablement aguerris. Chandeliers un peu partout sur la scène, chanteur encagoulé comme Sakrifiss à la voix écorchée au possible, riffs rock à la fois percutants et puissants, je ne connais aucun titre joué mais j'ai bien apprécié le spectacle qui m'était offert. Bien dommage que les festivaliers n'aient été plus nombreux devant la grande scène, qui semblait presque vide, et ce n'était pas franchement mérité. Je peux concevoir néanmoins que La Muerte n'ait pas été au goût de tout le monde, leurs morceaux étant assez particuliers. Mais si j'ai l'occasion de revoir ce groupe, le rendez-vous est déjà pris!

« Expérience ritualiste unique », nous dit le livret à propos de Tau. Ah. Moi j'aurais plutôt dit expérience ennuyeuse mais bon, c'est sûr que c'est moins vendeur dit comme ça. Le duo allemand ne communique aucune ambiance et pour un concert qui se veut shamanique, c'est pas très bon signe. On se casse pour aller manger, le kebab au seitan est bien plus intéressant que cette prestation d'une incroyable fadeur.

Un peu comme Red Fang le Vendredi, Uncle Acid and the Deadbeats est ce genre de groupe réputé qui me laisse complètement froid, et c'est pourtant pas faute de jouer dans le créneau Black Sabbath. Cela dit, j'ai quand même apprécié une partie du concert, et je dois bien reconnaître l'efficacité des compositions du combo. Pas ma came et j'en aurais pas pris pour l'heure complète mais une moitié de set était suffisante pour me rassasier avant que l'ennui ne commence à s'inviter au bal. Les Anglais sont bons, aucun doute là-dessus et la voix aiguë d'Uncle Acid fait son office comme il se doit, même si je n'en raffole pas forcément. Les amateurs apprécieront, j'en suis certain, et c'est d'ailleurs vérifié vu les tonnerres d'applaudissements réservés aux Anglais après chaque piste interprétée. A croire qu'ils étaient finalement la véritable tête d'affiche du jour, tête d'affiche très surprenante par ailleurs mais je vous en parlerai très bientôt.

Sur la petite scène se produit Castle, trio américain bénéficiant d'un important capital sympathie, d'une chanteuse / bassiste complètement à fond dans ce qu'elle fait et d'un son plutôt merdique sur une partie du concert. Quand Elizabeth se met à vociférer dans le micro, celui-ci sature et ça en devient rapidement désagréable. Un petit défaut qui sera corrigé en route, et qui nous permettra d'apprécier pleinement une prestation de heavy doom de bien bonne facture, portée par trois musiciens survitaminés et qui serrent la main du public attroupé en masse devant la petite scène, histoire de profiter au mieux des morceaux directs et efficaces des Américains. Nouvel album oblige, quelques morceaux de celui-ci seront joués, mais la setlist piochera également parmi les précédents, histoire de ne pas faire de jaloux. Elizabeth chante faux mais on s'en fiche presque, elle est tellement heureuse et souriante qu'on ne peut qu'apprécier le concert, qui nous met en joie et file un sacré coup de boost alors qu'on commençait à être sur les rotules. Castle passe, la fatigue trépasse.

Nous voici désormais au moment de la tête d'affiche de cette soirée, et l'organisation du Desertfest a fait un choix surprenant en invitant une formation loin des poncifs metal. Goat investit progressivement la scène, les musiciens entrant les uns après les autres, tous d'habits plumés vêtus. Le groupe met le paquet en terme de visuel, tant dans les costumes qui masquent les visages des musiciens que dans les images défilant sur l'écran derrière la Desert Stage, que dans les chorégraphies des deux chanteuses. Le festival a un créneau psyché dans lequel évolue Goat, mais encore une fois bien loin du rock ayant joué les jours précédents, vu qu'ici, c'est plutôt les rythmiques tribales qui sont mises à l'honneur. Un cocktail assez étonnant, donc, et qui ne part pas forcément gagnant devant un public metal. Les réactions de la foule en témoignent, assez divisées dans l'ensemble, une partie des festivaliers quittant la salle après seulement quelques minutes du show des Suédois. Pour les autres, c'est la plongée dans une véritable séance d'hypnose. Notre corps ne semble plus répondre de rien et bouge au gré des morceaux. Assez drôle de constater ce public en état de transe complète, se déhancher de façon totalement improbable pendant presque 1h30. Avec trois disques à leur actif, les Scandinaves se feront un plaisir de mettre chacun d'entre eux à l'honneur, y compris le dernier en date Requiem, plus calme mais tout aussi envoûtant sur scène que ses aînés. J'ai un peu de mal à trouver mes mots, ce qui se sent certainement mais il me paraît difficile de retranscrire un concert de Goat. C'est avant tout une expérience aussi visuelle qu'auditive, cathartique et contemplative, à laquelle on est réceptif ou non, mais qui vaut la peine d'être tentée, ne serait-ce qu'une fois pour se faire une idée. Je partais avec certains à priori, qui se sont envolés au fur et à mesure, pour conclure en disant qu'il s'agit simplement du meilleur concert de ce Desertfest, ni plus ni moins.

La tâche de clôturer cette édition 2016 est attribuée à Vodun, qui sort pour la première fois de son Royaume-Uni natal afin de convaincre le public belge via les morceaux issus d'un premier album, Possession. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le trio est motivé, constamment à fond dans sa performance et dans ses compositions, au point d'en finir complètement crevé, et particulièrement la chanteuse Oya qui donne tout ce qu'elle a, peut-être même un peu trop. La frontwoman a du coffre et de la prestance mais perd en souffle et en énergie au fur et à mesure du show, ce qui s'entend lors des montées devenant de plus en plus difficiles pour la jeune femme, ne déméritant pas en terme de présence scénique. On ne pourrait que conseiller aux Britanniques de canaliser davantage leur énergie pour offrir une performance plus constante, tenant sur la durée sans que la fin n'en devienne laborieuse. Une prestation globalement satisfaisante, qui fait le taf en fin de soirée mais qui mérite encore d'être travaillée.

Que dire, si ce n'est que cette édition 2016 a tenu toutes ses promesses? Une fois de plus, l'ambiance était au rendez-vous, l'organisation impeccable et les divers concerts auront dans l'ensemble bénéficié de bonnes conditions visuelles et sonores. On peut encore regretter la proximité du bar avec la Vulture Stage mais la configuration du Trix permet difficilement de faire autrement, ou encore le prix relativement élevé des victuailles, mais si vous êtes amateur de stoner et assimilés, le Desertfest d'Anvers est assurément un endroit incontournable.

Bilan récapitulatif :

Les 5 meilleures performances (hors découvertes) :

- Goat
- YOB
- Subrosa
- Colour Haze
- Cough

Les 5 meilleures découvertes :

- Wolvennest
- Giöbia
- Josefin Öhrn + The Liberation
- Duel
- Joy

Les 3 plus grandes déceptions :

- Monkey3
- Earthship
- Weedeater

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