chargement...

haut de page
Remontez pour accéder au menu
200 visiteurs :: Invité  » se connecter  » s'enregistrer

Deathspell Omega - The Long Defeat

Chronique

Deathspell Omega The Long Defeat
Deathspell Omega déçoit ses fans avec The Long Defeat ? Tant mieux.

Tant mieux, car il retrouve enfin ce que tant voyaient chez lui et ce que je peinais à considérer comme telle dans ses dernières œuvres : cette liberté de ton, où l’affranchissement des codes se fait au service d’une vision personnelle, quitte à déplaire. Certes, ce projet avait pu m’estomaquer de son originalité avec Si Monumentum Requires, Circumspice, Kénôse, Mass Grave Aesthetics, Diabolus Absconditus et surtout Fas mais, très vite, son style s’était densifié, transgression devenant nouvelle norme. Malgré des œuvres d’une grande qualité formelle – notamment, le temps aidant, l’hémorragique Paracletus –, il avait perdu cette capacité à déboussoler, renverser les tables de la Loi dont il était l’auteur. Me paraissant plutôt attaché à les écrire de la plus parfaite des manières, je n’attendais plus de lui qu’un pouvoir papal, une aura que The Furnaces of Palingenesia avait su me transmettre. Sans changer son propre paradigme, la formation y avait trouvé une forme d’aboutissement, terminant son exercice de maîtrise par un « You Cannot Even Find the Ruins… » symbolique, fin de disque et fin de règne.

Un ultime titre qui devient une nouvelle brèche dans laquelle Deathspell Omega s’enfonce désormais pleinement, accentuant ses envies de rock et décuplant son énergie sensuelle avec lesquelles il compose ses hymnes décadents. The Long Defeat est bien cela, dans son union des contraires au sein de la désunion irréconciliable : son intellectualisme s’habille d’une sensibilité corporelle, son fatalisme devient sensoriel, puise dans le doom et le hard rock les nerfs et synapses permettant de s’approcher au plus près du déclin qui vient, toucher sa gangue, ressentir ses aspérités et contempler ses ternes couleurs, pour mieux en extraire cette pierre appauvrie mais précieuse, la sertir avec une sobriété nouvelle. Fin des enluminures ; bienvenue au sein des vérités nues et dures.

Et quel spectacle ! Me voilà de retour aux grandes heures de mon obsession à son endroit, celles qui me faisaient voir en son comparse Elend et lui les symphonies malades de ce monde qui n’en finit plus de mourir, cela avec une ferveur à exprimer la défaite renouant avec la douleur de ses « Prayers » (des interludes pour vous ? L’esquisse d’un monde enfin exploré sur The Long Defeat pour moi), si grande qu’elle ne peut s’incorporer qu’au sein de plusieurs voix. Inutile de faire ici la présentation des individus, tous connus et révélés par une communauté internet plus occupée à crier des secrets de polichinelle qu’apprécier l’énigme qu’est ce nouvel album, simple en surface et complexe en son propos : tous ne font qu’un, pris dans le grand discours de ces quarante-quatre minutes où s’explore une résignation devenue drapeau noir de ralliement. L’ensemble donne en effet l’impression que tout cela ne provient que d’un esprit trouvant corps au sein de plusieurs individus. Il y a une homogénéité rare entre les compositions, chacune développant pourtant leur propre mouvement, un sens de la narration où les dissonances et assonances des différents riffs font s’imaginer comme face à la lecture d’un livre d’une finesse rare, au sens demandant toute son attention pour s’y plonger. Le carnet de notes à portée de main, on a régulièrement les doigts qui griffonnent des citations, les guitares filandreuses de « Enantiodromia », les lignes vocales de « Sie Sind Gerichtet! » ou encore le démarrage éploré de « Eadem, Sed Aliter » possédant un art de l’accroche prenant directement au col, vécu ayant déjà la portée du souvenir.

Quelques exemples parmi d’autres d’une débâcle existentielle, de laquelle Deathspell Omega fait son universalisme français à lui. The Long Defeat est bien l’œuvre française qu’il créé enfin, celle se jointant le mieux à un certain patrimoine culturel, où s’ébattent les pensées sensuelles de Georges Bataille, la tentation suicidaire sous forme de grand déballage sentimental de Drieu la Rochelle et Édouard Levé, l’atmosphère « fin de siècle » de la charogne 1900 et sa littérature au bord de l’apoplexie, les pensées se noyant dans un flot de sang anémié. Paradoxalement, il en tire une force nouvelle, en sourdine mais impitoyable, à l’image de ce batteur constamment ahurissant sans s’afficher outre-mesure. Un désespoir à boire comme le plus fin des vins, le même que le Huysmans des instants éprouvés à rebours, trouvant dans « Our Life Is Your Death » son accomplissement, dernière pierre d’une construction quasi-parfaite débutant par les atermoiements de « Enantiodromia » – ses entrelacs qui n’en finissent plus de repousser l’heure de l’assaut tout en figurant son inévitabilité –, poursuivant par la prière à la perte du recueilli « Eadem, Sed Aliter », la cathédrale-montagne du morceau-titre, la croisade expansive de « Sie Sind Gerichtet! »… jusqu’à cette harmonie qui a le goût de l’amertume béate, celui du flot du temps enduré avec délice.

Sur la Terre comme au ciel. Après des années de théologisme, de figuration du divin (au point de me perdre, tout humain que je suis), Deathspell Omega renoue avec la matière sur The Long Defeat, d’un enregistrement organique – The Furnaces of Palingenesia comme préparation à l’achèvement ci-présent – à l’exploration d’émotions anthropoïdes, quittant les livres pour user sa cervelle dans le réel. On pourra regretter quelques baisses de formes, quelques attentes trop longues, de même que de ne pas avoir ici une unité aussi fluide qu’escomptée, la diversité de voix me faisant parfois sortir de l’œuvre. Mais que l’on décèle des coutures çà et là ne fait pas oublier l’élégance des nouveaux habits du projet, rejoignant une certaine aristocratie française chère à mon cœur – une cour où Ataraxie, Void Paradigm, Elend, Drastus, Aosoth et d’autres (peu nombreux) se saluent –, aussi bien en terme d’excellence (déjà connue de sa part) que de fraternité d’esprit. Le souhait qu’il ne la quitte jamais est, je l’avoue, fort, tant cette nouvelle direction me plaît. Cependant, si l’avenir nous promet un aussi beau retournement de veste que celui-ci, considérez que mes attentes ne sont en rien un ordre dissimulé ! Faites comme vous voulez, Messieurs. C’est bien sur ce point que vous êtes les meilleurs.

DONNEZ VOTRE AVIS

Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.

AJOUTER UN COMMENTAIRE

 
Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.
Deathspell Omega
notes
Chroniqueur : 9/10
Lecteurs : (8)  8.19/10
Webzines : (6)  7.7/10

plus d'infos sur
Deathspell Omega
Deathspell Omega
Black Metal - 1998 - France
  

tracklist
01.   Enantiodromia  (11:56)
02.   Eadem, Sed Aliter  (09:08)
03.   The Long Defeat  (08:35)
04.   Sie Sind Gerichtet!  (07:17)
05.   Our Life Is Your Death  (07:15)

Durée : 44:11

parution
23 Mars 2022

voir aussi
Deathspell Omega
Deathspell Omega
Drought (EP)

2012 - Norma Evangelium Diaboli
  
Deathspell Omega
Deathspell Omega
The Furnaces of Palingenesia

2019 - Norma Evangelium Diaboli
  
Deathspell Omega
Deathspell Omega
Kénôse (EP)

2005 - Norma Evangelium Diaboli
  
Deathspell Omega
Deathspell Omega
Veritas Diaboli Manet In Aeturnum (MCD)
(Chaining The Katechon)

2008 - Norma Evangelium Diaboli
  
Deathspell Omega
Deathspell Omega
Diabolus Absconditus (EP)

2011 - Norma Evangelium Diaboli
  

Essayez aussi
Bovary
Bovary
Sur ce mur trop souillé (Démo)

2019 - Nar Productions
  
Mortis Mutilati
Mortis Mutilati
The Stench of Death

2018 - Autoproduction
  
Abkehr
Abkehr
In Asche (EP)

2017 - Sentient Ruin Laboratories
  
Furis Ignis
Furis Ignis
Turm (EP)

2022 - Iron Bonehead Productions
  
Shining
Shining
X - Varg utan flock

2018 - Season Of Mist
  

Entombed
Clandestine
Lire la chronique
Terminal Violence
Moshocalypse
Lire la chronique
Mass Disorder
Hupokrisis (EP)
Lire la chronique
Oozing Wound
We Cater To Cowards
Lire la chronique
Lifeless Dark
Forces Of Nature's Transfor...
Lire la chronique
La photo mystère du 16 Décembre 2024
Jouer à la Photo mystère
Refore
Illusion of Existence
Lire la chronique
Dunkell Reiter
Thrash Never Dies
Lire la chronique
Agressor
Towards Beyond
Lire la chronique
La photo mystère du 1 Décembre 2024
Jouer à la Photo mystère
The Black Dahlia Murder
Servitude
Lire la chronique
Prestige
Reveal the Ravage
Lire la chronique
Witches
The Fates
Lire la chronique
La photo mystère du 16 Novembre 2024
Jouer à la Photo mystère
La photo mystère du 1 Novembre 2024
Jouer à la Photo mystère
Deceased
Children Of The Morgue
Lire la chronique
Enforced
A Leap Into The Dark (EP)
Lire la chronique
Muscadeath 2024
Lire le biographie
Ireful
Agents Of Doom
Lire la chronique
Muscadeath 2024 Jour 2
Aborted + Ad Patres + Disfu...
Lire le live report
Scumripper
For A Few Fixes More
Lire la chronique
La photo mystère du 16 Octobre 2024
Jouer à la Photo mystère
Morbid Saint
Swallowed By Hell
Lire la chronique
Machete Law
Chains of Despair (EP)
Lire la chronique
Scolopendra
Citadel Of Torment (EP)
Lire la chronique
Aggressive Perfector
Havoc At The Midnight Hour
Lire la chronique
La photo mystère du 1 Octobre 2024
Jouer à la Photo mystère
Armoros
Pieces
Lire la chronique
Laceration
I Erode
Lire la chronique
La photo mystère du 16 Septembre 2024
Jouer à la Photo mystère
Überserker
Ineffable Force of Will
Lire la chronique