Je ne vais pas vous mentir, l’annonce de cette collaboration, un an seulement après les sorties de
Song Of Salvation et
Bluenothing, a été au moins en ce qui me concerne (même si je suis certain de ne pas avoir été le seul dans ce cas) synonyme d’une très grande excitation. Il faut dire que chacun dans leur domaine, Dream Unending et Worm nous ont offert ces dernières années quelques sorties particulièrement bluffantes n’ayant pas manqué de susciter émoi et admiration que ce soit ici ou ailleurs. Deux discographies absolument remarquables de la part de deux entités qui sans rien révolutionner de ces genres auxquels ont les rattache ont pourtant su tirer parti de leur existence et de leur travail afin de nous offrir quelque chose de tout à fait personnel. Une identité bien trempée pour chacun d’eux et la promesse aujourd’hui d’une collaboration pour le moins mémorable.
Sortie en octobre dernier sur 20 Buck Spin (quelle surprise...), ce split a été l’occasion pour les deux formations (même si cela avait déjà été le cas pour Worm) de travailler avec Mark Riddick, illustrateur (et musicien) que l’on ne présente plus et qui pour l’occasion signe une œuvre à la fois réussie et très intéressante puisqu’elle va mettre habilement en lumière la dualité de cette réunion en opposant deux personnages représentant bien évidemment chacune des deux entités concernées (à gauche Dream Unending avec ce personnage qui reprend certaines caractéristiques de celui déjà présent sur
Song Of Salvation et à droite Worm avec cette créature sinistre et encapuchonnée qui rappellera là encore celles aperçues sur l’artwork de
Bluenothing). Intitulée
Starpath, cette union pour le moins inattendue se révèle également des plus généreuses puisque ce sont cinq nouvelles compositions qui nous sont effectivement proposées (deux pour Dream Unending et trois pour Worm) pour une durée avoisinant tout de même les trois quarts d’heure. Si vous en doutiez, autant dire que vous en aurez pour votre argent.
C’est le duo américano-canadien qui va ici ouvrir le bal avec "So Many Chances" et "If Not Now When", deux pièces majeures de plus de dix minutes chacune qui vont voir Dream Unending naturellement renouer avec ce Death / Doom élégant et raffiné qui est le sien. Car s’il emprunte énormément à la sainte trinité anglaise (Anathema, My Dying Bride et Paradise Lost), celui-ci possède néanmoins sa petite touche personnelle grâce, comme on a déjà pu le voir précédemment, à tout un tas d’arrangements mélodiques et de séquences progressives pour le moins soignées. Toujours aussi peu enclin à accélérer la cadence ne serait-ce que par intermittence, Dream Unending poursuit à travers ces deux nouveaux morceaux son chemin à un rythme funéraire toujours relativement lent. Une longue procession partagée entre passages Death / Doom pesants où règne une lumière en clair / obscur puisqu’à ces riffs et growl sinistres viennent une fois de plus s’opposer des mélodies bien plus lumineuses et grandioses et séquences instrumentales et progressives particulièrement bien troussées. Ainsi, bien que similaires sur le fond, "So Many Chances" et "If Not Now When" présentent tout de même des particularités permettant de les distinguer, essentiellement dans leurs constructions. Sur le premier titre, Dream Unending va faire se succéder quatre parties bien distinctes dont deux excellentes séquences quasi-instrumentales allant de 2:48 à 6:39 puis de 7:36 jusqu’à l’issue de ces douze minutes et cinq secondes. Quasi-instrumentales car on va tout de même retrouver sur cette dernière partie monsieur Philip Lawrence Swanson (Solemn Lament, Vestal Claret, ex-Sumerlands...) venu pour la seconde fois consécutive poser sa douce voix entre quelques riffs d’orfèvres tricotés par un Derrick Vella toujours aussi inspiré... À l’inverse, "If Not Now When" nous offre un déroulé bien plus classique même si les trois dernières minutes sont à nouveau l’occasion pour le guitariste de Tomb Mold de laisser libre-cours à ses errances mélodiques et instrumentales afin de signer une conclusion aérienne et éthérée des plus réussies. Encore une fois, ces deux titres sont à nouveau révélateur de tout le travail de composition engagé. Si le Death/ Doom de Dream Unending n’a pourtant rien de bien sorcier, les nombreux arrangements (claviers, synthétiseurs, piano électrique, guitare acoustique et j’en passe) et autres mélodies (ces séquences progressives à la fibre Jazz sous-jacente) dispensés tout au long de ces deux titres au long cours constituent une fois encore le principal intérêt de cette formule qui sortie après sortie continue de régaler en nous laissant bouche-bée.
Avec "Ravenblood", "Midwinter Tears" et "Sea Of Sorrow", on aurait pu penser que Worm poursuivrait cette transition partiellement entamée sur
Bluenothing en amenant de manière définitive ses compositions vers ce Black Metal symphonique dont il est si friand et pour lequel l’inspiration est à chercher du côté de la scène norvégienne des années 90 (Arcturus, Covenant, Dimmu Borgir, Emperor, Limbonic Art, Obtained Enslavement, Odium, Tartaros...). Si l’assertion n’est pas totalement incorrecte, elle n’est pas tout à fait juste non plus... On aurait pu y croire avec "Ravenblood" qui en dépit d’une cadence muselée (hormis cette brève accélération tenue entre 1:25 et 1:48) va mettre en avant quelques caractéristiques indissociables du genre à commencer par un riffing glacial et mélodique très proche d’un Emperor dans ses dernières années (au moins sur les premiers instants), un chant âpre et malfaisant et la présence de nappes de synthétiseurs à chaque seconde ou presque de ces six minutes. Néanmoins, malgré ces quelques éléments ainsi que cette atmosphère spectrale évoquant une citadelle imprenable battue par des vents glaciaux, l’héritage Death / Doom de la formation floridienne (celui de ses deux derniers albums) persiste bel et bien (sans pour autant dominer) que ce soit à travers ce rythme modéré, certains de ces riffs bien épais, ce growl présent par bribe ou bien ce travail mélodique de haute volée signée là encore des mains talentueuses de Philippe Allaire-Tougas. C’est encore plus vrai sur "Midwinter Tears" qui en reprend d’ailleurs tous les codes avec ces riffs plombés, ce rythme processionnaire et ces atmosphères funestes (ces synthétiseurs très inspirés par Paradise Lost), ce growl bien plus présent et ces quelques sonorités mélodiques renvoyant aux travaux de groupes comme Thergothon, diSEMBOWLMENT, Evoken ou encore Spectral Voice... Si le parti-pris de Worm est toujours très orienté Death / Doom, l’inspiration Black Metal demeure en filigrane avec par exemple cette voix bien plus abrasive et véhémente, certaines nappes de claviers ou bien encore cette accélération dispensée en fin de parcours qui vient habilement relever le tout. Sans grande surprise et histoire de ne pas vous tenir la jambe plus longtemps, le titre "Sea Of Sorrow" poursuit le même chemin que le morceau précédent en faisant effectivement cohabiter avec toujours autant de succès et de personnalité influences Death / Doom prédominantes et sonorités Black un poil plus discrètes.
Bien que ce format ne soit pas le plus plébiscité pour tout un tas de raisons déjà maintes fois évoquées, il me semble néanmoins très malavisé de vouloir faire la fine bouche avec une telle collaboration entre les mains. Il faut dire que
Starpath n’a que des arguments pour convaincre à commencer par son line-up particulièrement alléchant et sa durée pour le moins significative. De fait, il ne faisait aucun doute avant même d’y avoir posé une seule oreille que cette union serait couronnée de succès. En effet, il n’y a rien à jeter ici que ce soit chez Dream Unending qui continue de s’affirmer au son d’un Death / Doom progressif et mélodique particulièrement raffiné ou bien encore chez Worm dont le mélange de Death / Doom et de Black Metal symphonique continue de nous affoler. Bref, je m’arrête là car je vous retiens depuis déjà trop longtemps mais oui,
Starpath est une sortie incontournable au même titre que les précédentes réalisations de chaque groupe.
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