Alors que j’avais émis un avis plutôt mitigé concernant
« Echo:One », premier LP du trio belge spécialisé dans le
stoner doom instrumental (deux basses, une batterie), je restais néanmoins ouvert à toute nouvelle proposition. Me voici donc embarqué dans ce récent «
Dive II », encore plus ambitieux que son prédécesseur. Et pour cause : près de deux heures de musique répartie sur deux CD, le premier dépassant l’heure pour cinq compositions, le second étant structuré autour du triptyque « dub:whale » et faisant ses bonnes cinquante-sept minutes. À une époque où, au-delà de la demi-heure, j’ai parfois tendance à trouver le temps long, il va falloir que je m’accroche.
Si la première partie me paraît être dans la continuité logique des travaux précédents, je constate toutefois un durcissement général des compositions. Le son est plus ample, plus épais également, la paire de bassistes martelant inlassablement leurs riffs doomisant, jusqu’à l’hypnose de l’auditeur, où son endormissement selon les sensibilités de chacun. De mon côté, même si « Les danses des sorcières » peut s’avérer éprouvant, la tendance est à l’éveil mystique, tant je commence à distinguer des influences
noise rock ou encore
SWANS /
MELVINS que je n’avais pas ressenties jusqu’alors. Et ça, ce sont vraiment des groupes qui me parlent ! Les côtés agaçants d’«
Echo:One » me semblent gommés, notamment l’usage abusif des samples, tout l’effort étant ici porté par le travail rythmique et, évidemment, les boucles, les circonvolutions. Ainsi, « Godzilla » est une belle représentation de ce que propose à présent
GHOST:WHALE : des compositions au volume d’un cétacé, évidemment, avec des basses aux jeux plus distincts que par le passé dans la séparation de leur rôle, avec l’une qui assure la rythmique et la seconde davantage dans un rôle de soliste
noisy, les deux s’enrichissant mutuellement. Le disque un s’achève sur un « Eye of the Storm » plus expérimental, des sonorités électroniques pointant le bout de leur rostre. Ce n’est pas sur ce terrain que la formation me séduit le plus mais j’avoue que cela aère bien ces vingt minutes, d’autant que sa progression bruitiste assure une excellente transition avec la seconde partie de l’album. Les musiciens auraient pu s’arrêter là mais non, ils vont finir de nous ratatiner le bulbe avec la trilogie « dub:whale ».
Je retrouve dans le premier volet ce côté
NIGHTSTICK de par ce mélange entre
doom et psychédélisme, l’aspect expérimental («
… Jet Set, Trash and No Star ») permettant d’oublier que la composition ne semble pas trop savoir où elle va, étant plus proche de l’improvisation même si les musiciens retombent à l’occasion sur un rythme, un squelette de structure auquel l’auditeur peut se raccrocher. Mais ça le fait, il y a une forme de dimension cinématographique qui émerge des grands fonds, une apesanteur mêlée d’angoisse. Quelque part, je pense aussi au
SONIC YOUTH des années 80, celui de «
Confusion is Sex » par exemple… Encore un truc qui me parle tant j’ai pu écouter ce groupe à la fac. Et si les volets deux et trois fonctionnent peu ou prou selon le même schéma, à savoir des riffs de basses ultra lourds sur lesquels se greffent des échantillonnages bruitistes, le travail du batteur leur insuffle un
groove monstrueux (« dub:whale III »), une pulsation océanique, le cœur d’un mammifère que l’on n’a pas envie de croiser au cours d’une baignade.
Grâce à «
Dive II », je revois totalement ma position vis-à-vis de
GHOST:WHALE. J’avais fait le procès facile de la
hype, qui me semblait démesurée au regard de ce que proposait «
Echo:One », je me repends tant ces huit morceaux ont su m’embarquer dans une croisière où l’on ne s’amuse pas mais surtout où l’on ne s’ennuie jamais, affirmation qui était loin d’être gagnée au moment où j’ai découvert le monstre. Mais le travail est tel pour créer des climats anxiogènes, des progressions subtiles et, surtout, un environnement sonore original, travaillé, à la fois personnel et pourtant assez référentiel dans ses valeurs empruntées à la
noise ancestrale, que je ne peux que saluer les artistes ainsi que les remercier pour ce voyage en mer inconnue. Une surprise de taille donc qui me fait d’ores et déjà prendre rendez-vous pour la suite.
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