With Passion - What We See When We Shut Our Eyes
Chronique
With Passion What We See When We Shut Our Eyes
Rares sont les groupes qui résistent aux départs de trois de leurs membres à un instant « t » (plus un quelque mois après). Le bassiste fondateur de With Passion, seul rescapé, veut tenir bon et va recruter les deux guitaristes ainsi que le batteur du groupe voisin Conducting From The Grave. Pour le chant c'est un certain Fidel Campos (ex-Cyanide Era) qui s'y colle malgré une courte période avec l'ancien guitariste de With Passion (avec qui ils enregistreront une démo). La line-up est enfin prête à sortir une suite au premier et prometteur album
In The Midst Of Bloodied Soil : direction Tampa aux studios Mana chez monsieur Rutan pour du deathcore mélodique et technique de qualité !
Difficile de croire aux premiers abords vu la refonte quasi-complète des californiens de With Passion, que la nouvelle équipe (en particuliers les guitaristes) atteindrait le niveau de jeu mais surtout l'efficacité des prédécesseurs tout en y gardant l'esprit… Et pourtant c'est tout le contraire qui se produit avec
What We See When We Shut Our Eyes ! Le groupe fait un bon incroyable en avant grâce à des musiciens à la technicité tout simplement inhumaine qui devrait dégoutter bon nombre de jeunes apprentis (surtout quand on regarde l'âge des gugus). C'est bien simple, durant ces 52 minutes ovniesques, les guitaristes (qui se renvoient les riffs tel un Dragonforce) passent toutes les techniques de gratte au peigne fin avec dans le lot des expérimentations de sons bizarroïdes (le break de « Through the Smoke Lies a Path ») que je n'avais jamais eu l'occasion d'entendre (en tant que bassiste)… Assez jouissif ! Avec une moyenne de titres tournant autour de 6 minutes, il faudra un nombre extrêmement conséquent d'écoutes pour ne serait-ce qu'assimiler une partie de cet album à la technique « passionnelle ».
Bien que le principal adjectif lié à With Passion soit « ultra-technique », les Américains jouent avant tout une musique à dominante mélodique : n'importe quel adepte du riff accrocheur devrait se retrouver ici telle une « groupie » en chaleur! Effectivement les guitaristes vont apporter encore plus d'influences death mélodique et de mélodies travaillées de leur précédent groupe. Pas de mélodies froides des montagnes enneigées mais plutôt des riffs sortant des plages chaudes de Malibu (clairement la mélodie qui donne envie de sortir faire bronzette tout de noir vêtu) ! Impossible de vous faire la liste de ces passages « ensorceleurs» tellement leur nombre est grand, mais un titre chirurgical tel que le direct « Vengeance In Departure » (raaah ce solo final !) vous hantera pendant de longs mois (expérience personnelle). Souvent comparé à Between The Buried And Me, With Passion emprunte en effet certaines influences dans la structure de composition déjantée (« RJ MacReady » est démente) mais aussi parfois plus progressive (je pense au superbe break acoustique du titre éponyme). Toutefois l'élève n'égale pas le maître mais s'y approche (gage de qualité donc).
Le nouveau (et microscopique) chanteur balance quant à lui des hurlements (loin du typage black antérieur) tout à fait corrects mais relativement monocordes (malgré des variations dans les graves) et à des années lumières d'un Tommy Rogers. En ce qui concerne la production de Rutan, elle offre un son brut et puissant, très loin du formatage de certains groupes jouant dans la même case. Pas de « triggering » ou que sais-je mais un batteur proposant un jeu naturel, fouillé et bien efficace (même si on aurait apprécié quelques bons blasts pour réveiller les voisins du dessous). Cependant les deux guitares sont les grandes stars ici (mixage en avant oblige) et iront cacher malencontreusement le gros boulot de rythmique du bassiste (et parfois du batteur). C'est bien dommage car le bonhomme a lui aussi un certain niveau en reprenant les riffs complexes des guitaristes et en jouant quelques lignes à sa façon.
Je pense que l'on pourrait écrire des pages pour chroniquer ce
What We See When We Shut Our Eyes, tellement la musique est riche, homogène et il y aurait à dire. Quoiqu'il en soit, malgré de nombreuses écoutes, il reste difficile de gommer certains défauts. A l'instar d'un récent Arsis on aurait aimé un travail d'avantage axé sur l'efficacité (« move your body » : moshpart ou headbang) que sur le plan à s'emmêler les doigts (« mate moi ce shred joué à l'orteil »). Ainsi quelques passages donnent un sentiment de « trop » poussif et d'indigeste… Mais c'est surtout cette ambiance manquant de saveur qui fera regretter le précédent opus et son génialissime clavier (malgré un interlude affreux proposé ici).
Les nombreuses critiques incendiaires parsemant la toile sont le fruit à mon sens d'écoutes pas assez abouties (car l'effort est grand !), moi-même faisant parti au départ de ces gens écœurés par cette surbranlette cacophonique… Mais une fois entré dedans, c'est un tout autre album s'ouvrant à nous ! Les points cités plus haut supprimés, le prochain opus se verra sans nul doute gratifier de la mention « excellent ». Un de mes albums de l'année. Avis aux amateurs.
| Mitch 9 Mai 2007 - 2789 lectures |
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