Sodom - Better Off Dead

Qu'il est bon de se replonger dans ses archives, dépoussiérer ses vieilles K7s - copiées à l'époque artisanalement sur une chaîne à double lecteur dont la petite cousine ne voudrait même plus -, ressortir le vieux walkman qui croupit au fond d'un tiroir depuis l'arrivée du lecteur MP3, et voir le feu rejaillir de l'ancien volcan qu'on croyait trop vieux …
« Better Off Dead » fait parti de ces albums que je n'ai pas eu l'occasion de racheter au format CD, et la régularité avec laquelle je (ne) l'écoute (pas) en pâtit grandement. Cumulant ainsi une longue absence loin de mes esgourdes et les lectures relativement récentes de chroniques peu élogieuses, l'impression laissée par cet album était artificiellement devenue mitigée à mes yeux, au point que je m'attendais, au moment de l'appui sur la touche Play du baladeur, à me mettre entre les oreilles l'une des moins bonnes galettes des teutons sodophiles.

Et là, baffe! Fallait vraiment être trop con pour se laisser insidieusement influencer par des chroniques forcément subjectives et pas forcément avisées (comment ça c'est aussi valable pour celle-ci ?) et délaisser l'une de ces vieilles idylles thrash de ma tendre jeunesse par flemme de repasser au format K7! Pardon Tom, mea culpa, mea culpa maxima ! Sitôt l'intro rampante et sombre d'« An Eye for an Eye » jaillie de mon casque et mes tympans violemment pris d'assaut, je me repentais de mon manque de foi.

La recette que Sodom a savamment élaboré sur « Agent Orange » s'affirme avec plus d'aplomb sur ce 4e véritable album: les tueries thrash hyper véloces (« Shellfire Defense », « Bloodtrails ») alternent une fois de plus avec du Motörhead graisseux fourré au thrash teuton (« Never Healing Wound », « Stalinorgel »), des reprises pas trop mal faites mais pas forcément à leur place (Tank repris une fois encore sur « Turn Your Head Around », et Thin Lizzy avec « Cold Sweat ») … et des morceaux inégaux comportant conjointement des moments d'anthologie et des platitudes insipides (« Better Off Dead » avec une intro sombre bien sentie et un riff simple et imparable, « Capture The Flag » qui est poussif sur sa première moitié, puis se ramasse sur lui-même à mi parcours pour exploser en une speederie dévastatrice, « Bette Off Dead » …), et les habituels foirages mous du genou (« The Saw is The Law » qui est le « Remember The Fallen » de cet album, « Resurrection » - ou le ratage en règle). Certes, on ne peut nier que la voix de Tom continue de perdre en agressivité (bien que de courts passages en voix black font parfois remonter des frissons, sur « The Saw Is The Law », ou lors du « Bloooooooood !!» d'ouverture de « Bloodtrails »). Certes, la tonalité de certains morceaux est presque joyeuse là où on voudrait la voir haineuse. Certes, les soli sont régulièrement emprunts de feeling rock, voire blues, et merde, Motörhead c'est bon pour les bikers, pas pour les thrasheurs poilus (si ?). Certes les fins de morceaux à la mode jam chaotique, c'est facile et foireux (« An Eye For An Eye », « Capture The Flag »). Certes Sodom arrêterait ses morceaux lugubro-mous du coude, on ne lui en voudrait pas.

Mais putain, qu'est-ce qu'il nous met encore, sur cet album, le père Tom (dans le camp de Babaorum dirait Asterix pour la rime)! Comment ne pas avoir l'headbangomètre qui part dans le rouge sur la deuxième partie de « Capture The Flag » ou sur « Bloodtrails » ? Comment ne pas ressentir le sentiment d'urgence jouissive qui émane de « Shellfire Defense », ou de « Never Healing Wound » dans un autre registre ? Comment faire l'impasse sur les excès de vitesse grisants de « Shellfire Defense », « Capture The Flag », « Bloodtrails » ou « Better Off Dead » ? Non, ce disque ne doit pas être acheté dans l'unique but d'avoir toute la discographie de Sodom. Non, ce disque n'est pas un faux pas dans leur carrière, même si on peut y trouver certains morceaux très rock, et d'autres un peu trop poussifs.
Cet album mérite une réhabilitation … dont acte.

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