Depuis le temps que les hommes se mettent sur la gueule en prenant à témoin Allah, Jésus ou Jerry Springer, il serait bon de mettre un peu d'ordre dans les têtes en révisant les fondamentaux. Que le divin se trimballe avec les paumes trouées, un masque de chacal ou un t-shirt DEICIDE, à l'heure de l'apéro, tous les croyants se rejoignent au comptoir. Attérés par les incessantes guerres de religion qui secouent les pubs de la planète, cinq pochtrons impénitents ont fait main basse sur les tables de la soif, afin que le monde sache enfin qui, de Kronenbourg ou Heineken, finit premier dans la course à la chasse d'eau. Six années après sa formation, la mission TANKARD triomphait en 1988, délivrant à la face du monde les dix commandements du bartender, mieux connus sous l'appelation de "The Morning After". A l'attention particulière des jeunes générations n'ayant pas l'âge requis pour pénétrer dans un lieu de cuite, dix règles de conduite en état d'ébriété pour encore moins comprendre le monde qui nous entoure.
I. Commandments.
Règle numéro un, ne jamais être en retard à sa première beuverie. Parce que 2:51 ça passe très vite, et que ce "Commandments" ultra-jouissif est ce que TANKARD a servi de meilleur à ce jour. Un pur concentré d'hystéro-thrash sauvage et débridé qui monte au cerveau dès la première rasade, noyant SLAYER et EXODUS sous un torrent mousseux de riffs de légende, un déluge de leads terrifiants de fluidité et une pluie diluvienne de backing vocals à faire rougir de honte la bay area. TANKARD entre dans la guiness des drunkards avec l'opening track le plus foudroyant qui soit.
II. Shit-Faced.
Les soirées picole c'est bien sympa, surtout quand le carnage a lieu ailleurs qu'à la maison. Imitez vos rock stars favorites et préférez l'invasion d'un Formule 1, les murs boivent bien la bière et comme ce sont des hôtels de passe, personne n'osera appeler les flics. Débutez l'opération destruction au rythme de l'hymne "Shit-Faced" et infligez aux commerciaux de passage une mémorable correction à base d'accélérations brutales, de riffs incisifs et de leads qui partent en vrille à la moindre occase, sans oublier un drummer forcené entièrement dédié à la destruction de son kit. N'oubliez pas de remplir le questionnaire à l'entrée en insistant sur les déplorables conditions d'accueil.
III. TV Hero.
Vous voulez passer chez Cauet, Fogiel ou toute autre vermine du PAF ? venez battre le record du monde de pintes avalées en une seule soirée et sentez votre estomac jouer les montagnes russes en alternant mid tempo à la fraîcheur rock n' roll et accès de fièvre thrash contre lesquels l'alcool est le seul remède. Prenez votre panard à l'écoute de ce "TV Hero" ô combien festif et jubilatoire composé par la mitrailleuse Oliver Werner, et n'oubliez pas de saluer chaque intervention des patrons Katzmann et Bulgaropulos, qui lâchent ici plus de solos que LEGION OF THE DAMNED n'en composera dans toute sa carrière. Et si vous venez à gerber, gardez en un peu pour Mireille Dumas lorsqu'elle vous demandera si votre père vous battait en écoutant les SATAN JOKERS.
IV. F.U.N.
Vous avez présumé de vos maniac forces et les palpitations vous gagnent ? pas de panique. Sortez de votre gorge les deux doigts du videur et jetez vous un verre de "F.U.N." à vous réveiller un légume sous respirateur artificiel. Revivez vos pires cauchemars alcooliques à la vitesse de ce fast track ahurissant qui frôle la sortie de route au détour de chaque roulement. Mais un art consommé de la relance et du dérapage verbal vous permettront de boucler sans dommages 3:12 mn d'un metal total, qui réduira en bouillie les neurones du non initié. Cerise au fond du verre, les cris de majorettes à 0:14 et les aboiements d'un chien pris de panique devant pareille tornade.
V. Try Again.
Profitez de cet interlude chope n' roll pour vous refaire une santé gastrique dans les chiottes turques du fond de la salle, en vibrant comme un seul homme devant la ferveur provoquée par cette reprise des SPERMBIRD. Faîtes les poches du pilier de comptoir effondré au pied du lavabo pour financer la deuxième mi-temps et tenez au mieux votre rôle d'éponge en nettoyant le comptoir avec votre langue, sans oublier les restes de cacahuettes qui traînent dans la coupelle.
VI. The Morning After.
Lendemain difficile ? le bon côté de la chose, c'est que l'ingestion tardive de tylenol ne vous a pas tué. Le mauvais, c'est que vous ne pourrez tolérer l'agression systématique d'un "The Morning After" bloqué en mode fast forward, pas plus que le hurlement inhumain du brailleur en chef Gerre à 2:33 mn. Combinées aux guitares à têtes chercheuses des duettistes Axel et Andy, les parties de gueulante d'Andreas Geremia mettraient à genoux une armée de sourds sous scaphandres. Perte d'équilibre ? nausées ? oubliez l'aspirine. Elle ne vous sera d'aucun secours face à cet insoutenable travail de sape rythmique une nouvelle fois orchestré par Harris Johns (CORONER, KREATOR).
VII. Desperation.
La gueule de bois se prolonge ? plongez sans attendre votre bulbe endolori dans le congélo, car la traque aux neurones rescapées se poursuit avec un "Desperation" bien balancé par un Axel Katzmann décidémment très en verve. Le modus opérandi ? toujours le même. Des riffs déjouant les lois de la physique, un batteur au taquet et des solos à n'en plus finir. Une politique du toujours plus qui fait rentrer "The Morning After" dans la catégorie des albums physiques (donc géniaux), où l'attention compte moins qu'un solide gabarit pour endiguer les assauts thrash d'un TANKARD en surchauffe. Tant que vous êtes encore en cure à Siemensland, retirez les tessons de la budweiser oubliée depuis une semaine et faîtes revenir les cristaux de bière à la casserole, le petit déj' n'en sera que meilleur.
VIII. Feed the Lohocla.
Titubez jusqu'au troquet du coin et commandez un Clan Bruce Campbell. Sans glace, les stalactites sous votre pif feront l'affaire. Optez pour un repaire de footeux, si les locaux ont gagné la veille, le patron mettra sa tournée. Plutôt que de refaire le match avec les supporters, préférez les chaînes musicales sur écran géant et réveillez vous en cadence avec "Feed the Lohocla", composé de main de maître par Andy Bulgaropulos. Plus rock n' roll que Katzmann dans son jeu, Andy a aussi une approche moins linéaire et rajoute des variations de tempo bienvenues au programme. Accrocheur et groovy, "Feed the Lohocla" est aussi moins schématique et le break à 2:20, un must absolu, a du coup plus d'impact que les nombreux passages rapides des deux titres précédents. Retenez bien la leçon : un verre de tord boyau entre deux pintes de houblon, y a pas mieux pour relancer l'addiction.
IX. Help Yourself.
Tout le monde vous le dira, la murge n'est qu'une affaire de seuils. Si vous êtes encore debout après dix pintes, on dira vous tenez bien l'alcool. Mais passé les dix suivantes, c'est la boisson qui vous tient, et vous voilà condamné à flamber votre RMI dans tous les abreuvoirs de la ville. Une manière comme une autre de relancer la consommation et de régler définitivement le problème des retraites, puisqu'à ce compte là vous ne verrez jamais la trentaine. C'est un peu la même histoire pour le thrash, car si vous êtes encore là pour le baroud d'honneur "Help Yourself", au fond, c'est que vous êtes accroc. Seul un thrasher dans l'âme peut résister à cette version compressée de "Traitor" (sur l'album précédent,
"Chemical Invasion"), aussi irrésistible qu'interminable. A chaque fois qu'on croit tenir le bon bout, ces diables d'allemands rajoutent une couche de speed qui achève de vous sécher les reins. Toutes les bonnes choses ont une fin ? pas chez TANKARD, qui vous payera toujours le verre de trop, celui qui vous vaudra 28 semaines bien tassées de coma éthylique.
X. Mon Chéri.
Pour finir, si d'aventure vous glissez dans le vomi d'une meuf portant un sweat
"The Meaning of Life" (et sous réserve qu'elle ressemble à autre chose que Gerre, Olaf ou Frank), mariez vous sans plus attendre. Vous partagerez de nombreuses choses merveilleuses comme le casque à bière du frangin, un water-bed gonflé à la vinasse ou encore votre foi, car à force de boire comme des trous, vous finirez bien par passer sur le billard un jour ou l'autre. En attendant, passez lui la corde au cou et embrassez la mariée sur fond de "Mon Chéri" (la cerise finale, pas l'ignoble chocolat), qui voit TANKARD se saborder avec classe avec ce titre grind furibard et jusqu'au boutiste, en complet décalage avec des paroles dignes de SPICE GIRLS sous anti-dépresseurs. C'est ce qui s'appelle conclure en beauté un album nominé dans la catégorie "Best TANKARD Album", "Best Thrash Metal album of All Times" et "Best Metal Album Ever" chez tous les éclusiers de bonne réputation.
3 COMMENTAIRE(S)
08/02/2008 17:49
Merci bien Cyril ! et je vois que Hurgh prend le même plaisir que moi à l'écoute de l'album !
08/02/2008 11:53
08/02/2008 10:06