Cette fois, ils ont pris le temps.
Salvation m'avait retourné les tripes mais était peut-être sorti un peu vite. J'y trouvais à redire : l'intégration du post rock au sein des morceaux me semblait parfois bancale et synonyme de longueurs dispensables et ce malgré des moments géniaux comme « Leave Me Here ». Ce dernier et bien d'autres (raaaah « Echoes » !) présageaient malgré tout d'un futur prospère pour Cult Of Luna, là où de nombreux groupes se sont cassés les dents à apaiser leurs tourments (qui a dit Callisto ?).
Somewhere Along The Highway renouvelle cette direction prise et confirme les espoirs portés. Il décontenance d'abord, par sa musique plus post rock et ses morceaux dénués de violence (« Marching To The Heartbeats » et « And With Her Came The Birds », deux moments de calme que n'auraient pas renié Mogwai) ainsi que par son chant rauque peu présent. Il en est de même pour la voix d'ange de
Salvation, décelable sur « Thirtyfour » mais délaissée au profit d'un murmure grave et posé. Il semble aussi facile d'écoute, accessible sans forcement marquer l'auditeur, ce qui fait que j'ai été déçu au début. A tort, évidemment.
En réalité, cet album se montre plus subtil qu'il n'y parait et s'il est plus calme, il est aussi plus progressif. Cet aspect de leur musique est souvent passé sous silence (il est sans doute plus facile de ressortir les éternels couplets « blablabla Neurosis, blablabla Breach ») mais
Somewhere Along The Highway montre une interprétation particulière du prog' par des enchevêtrements de mélodies douces/amères (« Thirtyfour ») et des structures à la fois complexes et naturelles. Le groupe est plus que jamais une entité complète, où tout se mêle. La voix devient un instrument comme les autres, qui marque par son absence et écrase de sa présence, comme les martèlements monocordes de « Thirtyfour ». « Dim » nous prouve que quelques riffs joués comme il faut et avec une intensité grimpante peuvent encore nous envouter. Cult Of Luna dévoile pleinement sa science du riff en 4/4 : des chansons lentes, subtiles dans leurs arrangements et pourtant accrocheuses. Ainsi, les enchainements entre puissance lunaire et apaisement ne se font plus de manière abrupte. Ils sont joués avec fluidité et maîtrise.
Je parle, je parle mais cela ne nous dit pas l'essentiel : oui, ça poutraque (j'essaye un mix de
poutre et
foutraque pour ceux qui n'auraient pas compris et Dead). Les changements climatiques entre les deux morceaux post rock et leurs successeurs font frissonner l'échine et courber la tête. Les notes à l'angoisse rentrée concluant « And With Her Came The Bird » pèsent sur nos oreilles tandis que l'ouverture de « Thirtyfour » crève le ciel d'une lueur froide avec sa guitare seule, vite rejointe par le plomb des autres instruments. L'apaisante « Marching To The Heartbeats » n'est là que pour renforcer le poids de « Finland » et sa batterie en souffrance. Cult Of Luna est définitivement plus vicieux mais toujours aussi viscéral. Le point d'orgue du disque est « Dark City, Dead Man », compilation des sentiments qui nous ont traversé jusque-là, haute de ses quinze minutes à la pesanteur en bout de course, fatiguée, s'acheminant lentement vers une lumière triste qui est la marque de fabrique des suédois : une joie déchue et étrangement enveloppante.
Somewhere Along The Highway surpasse
Salvation tout en développant sa propre identité. Il n'est pas question de figurer une oppression (
The Beyond) ou la déchéance de l'Homme moderne (
Salvation) mais de simplement exprimer sa souffrance et sa paix telles qu'elles ressortent. Un disque qui est une pause dans la marche du monde, ralentissant la vie autour de nous. Une fois l'écoute terminée, la dernière impression que donne « Dark City, Dead Man » est que Cult Of Luna nous rejette dans une normalité trop assourdissante et vive pour être supportable. Comme si nous étions là, quelque part le long de l'autoroute.
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