Avec les fondateurs “Ki” et “Addicted”, deux premiers volets très prometteurs en forme de nouveau départ pour un Devin Townsend en mode reconstruction, l’espoir était permis que la quadrilogie initiée par le trublion Canadien débouche sur un nouveau chef d’œuvre du calibre de « Ocean Machine » ou
« Terria ». Autant l’avouer d’emblée, la douche s’avère sacrément froide avec un double programme ying/yang vendu comme le calme
(« Ghost ») après la tempête mais qui peine à séduire dans un sens comme dans l’autre. « Deconstruction » donc, annoncé comme la dernière incartade brutale d’un Devin en rupture de STRAPPING YOUNG LAD et de toutes les drogues dont il abusait ces dernières années pour mener à bien ses nombreux projets. Trouver l’équilibre intérieur, domestiquer sa part des ténèbres pour ne pas sombrer dans la folie, tels étaient les enjeux de chaque côtés d’un dé à quatre faces présentant une facette bien identifiable de l’artiste. De ce point de vue, la ligne directrice a le mérite d’être claire ; Townsend présentait « Deconstruction » comme étant le plus violent de la bande des quatre, et il n’y a pas tromperie sur la marchandise.
Encore que ! Ceux qui espéraient un dernier retour aux fondamentaux SYLiens en seront pour leurs frais, car on ne retrouve que trop rarement le caractère frontal et direct d’un STRAPPING YOUNG LAD (« Pandemic », d’une durée rachitique de trois minutes). Oubliez « City », « Alien » ou même « The New Black », le metal extrême de « Deconstruction » est d’un tout autre tonneau, plus martial, plus mid tempo surtout, un peu comme si l’on avait affaire à une relecture hardcore de
« Terria » passée à la moulinette frappadingue de
« Infinity ». Présenté de la sorte, ça donne encore sacrément envie mais malheureusement, le résultat en dents de scie n’est jamais à la hauteur des ambitions d’un DEVIN TOWNSEND en mode opéra rock baroque ne reculant devant aucune grandiloquence. L’album a beau être découpé en neuf pistes, mieux vaut appréhender la chose comme un morceau unique façon « Death’s Design » ou « Crimson », l’écoute parcellaire de telle ou telle pièce n’apportant pas grand-chose en l’état. Dès lors, préparez-vous à manger 70 minutes de metal progressif à géométrie (très) variable, le premier quart d’heure de la galette (les lourdingues « Praise The Lowered » et « Stand ») étant déjà en lui-même un sacré obstacle à franchir avant les courtes réjouissances de « Juular ». Qui dit album concept dit forcément « Ziltoïd The Omniscient » (le hamburger se substituant au café, l’homme à l’extra-terrestre) et pareil pavé musical trouve un alter-égo filmique plus lointain en la personne de « A.I. », vieux projet de Kubrick repris par ce bon vieux Spielby en son temps (2001). Aussi ambitieux que foutraque et mal branlé, « Deconstruction » se vautre comme Steven prenant le relais de Stanley. Introduction chiante à mourir sur album, étincelle autorisant un mince espoir passé le premier quart d’heure (un grand merci aux seconds rôles Dirk Verbeuren et Ihsahn, qui dynamitent comme il faut l’hommage à Danny Elfmann « Juular ») avant de frustrer définitivement son public malgré de bonnes intentions.
Car autant MINISTRY chez Spielberg relevait de la fausse bonne idée étant donnée la candeur naturelle du cinéaste et le degré de perversité de l’Alien Jourgensen, autant le désir bien compréhensible de Townsend de domestiquer sa part d’ombre débouche également sur un compromis bâtard entre Enfer de Dante et féérie dansante des sardines. Ange ou démon, Devin n’a pas su (ou vraisemblablement voulu) choisir de peur de se faire violence et de basculer à nouveau dans le mal être. La démarche de l’homme est louable, le problème restant qu’en tant qu’auditeur, on s’y retrouve difficilement malgré un album qui en tient de sacrés couches de guitares/claviers/hurlements et bidouillages sonores en tous genres. Démarrage languissant façon
« Ki », pilonnage abrutissant sur « Stand » avant une pauvre incursion lead passé cinq minutes, il y a largement de quoi être décontenancé par l’amorce en forme de pétard mouillé de « Deconstruction » et même si ça s’améliore sensiblement par la suite, on guette en vain quelques fulgurances qui nous inciteraient à remettre le couvert, les rares mais tellement précieuses parties blastées sur « Pandemic » (Dirk mon amour !) faisant office d’oasis au milieu de Carlos. Le trop plein de parties sur-découpées masquent l’aridité du désert créatif d’un Devin Townsend ressassant énormément de plans passés sans jamais sonner neuf. On passe donc la quasi intégralité de l’écoute à jongler d’une référence à l’autre sans jamais s’abandonner dans l’univers de fête foraine dégénérée mise en scène par l’artiste. Les guest stars de luxe (Paul Masvidal, Joe Duplantier, Fredrik Thordendal, Tommy Giles Rogers et bien d’autres) se succèdent, noyés dans la masse orchestrale, sans changer les données du problème : malgré une progression dramatique plus ou moins évidente qui voit l’intensité monter de plusieurs crans titres après titre, pareille débauche d’énergie et de SFX sonores pour finir dans la farce (un bourrinage sans queue ni tête et un pet plus tard sur "Poltergeist", la messe est dite), il y avait sans doute mieux à faire d’autant que la relecture brutale de « Ants » en fin de programme sur le title-track promettait un tout autre climax.
Trois pas en arrière après les avancées significatives de
« Ki » et surtout
« Addicted », « Deconstruction » présente un DEVIN TOWNSEND jouant la carte de la surenchère, sans qu’à aucun moment on ne sente le Canadien en pleine possession de ses moyens. Pas de lignes de chant irrésistibles, certains placements de voix laissant même à désirer, des riffs redondants qui s’éternisent alors que tout est dit passé trois minutes, il y a bien trop à redire sur le contenu pour se laisser prendre au jeu, même si ceux qui sont moins familiers de l’univers de Townsend auront sans doute la dent moins dure. Problème supplémentaire pour les die-hard fans, la world music de
« Ghost » s’avère au moins aussi décevante que ce blockbuster explosant en plein vol sous le poids de ses
insuffisances !
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