Azarath - Blasphemers' Maledictions
Chronique
Azarath Blasphemers' Maledictions
Bon, fini de rigoler maintenant. On chronique depuis des semaines de bons albums mais la fin de l'année approchant à grands pas, il va falloir sélectionner les meilleurs, ceux qui laisseront une trace. Et en attendant de décortiquer les nouveaux Spearhead, Requiem et Disma qui apparaîtront dans le bilan final, c'est d'abord en Pologne que l'on va se rendre, terre d'une des meilleures scènes extrême. Là-bas sévit depuis 1998 l'un des groupes de death metal les plus talentueux. Pourtant Azarath, puisque c'est de lui dont il s'agit, reste relativement méconnu malgré des sorties de grande qualité, en particulier le fabuleux Diabolic Impious Evil, chef d'œuvre de brutalité evil. Il est temps que ça change!
Et justement, du changement, il y en a sur ce nouvel album intitulé Blasphemers' Maledictions et sorti cet été chez Witching Hour. Mais ça, on l'avait senti venir. Déjà parce que Bruno, le chanteur/guitariste originel, a quitté les siens en 2009, remplacé par Necrosodom (Anima Damnata, Thunderbolt...). Mais aussi et surtout en découvrant la pochette de ce cinquième full-length qui rompt brutalement avec les artworks noirs et blancs des précédentes réalisations. Plus lumineuse, colorée et détaillée, elle laissait présager d'une évolution chez des Polonais qui semblaient pourtant acquis à jamais à la cause du brutal death evil typique de leur pays. Une peinture sublime qui recouvre un digipack tout aussi somptueux, un objet qui vaudrait presque l'achat à lui tout seul même si la musique n'était pas à la hauteur.
Ce qui n'est heureusement pas le cas. Pourtant, j'avoue avoir eu quelques appréhensions. À l'écoute de l'EP Holy Possession, sorti quelques mois avant en guise d'amuse-gueule, j'ai notamment eu peur qu'Azarath se Behemothise, qu'il devienne une machine stérile sans intérêt. Et effectivement, la production de Blasphemers' Maledictions est la plus propre, la plus léchée dont aient jamais bénéficié les Slaves. Mais elle s'avère finalement d'une puissance redoutable et n'est pas non plus complètement aseptisée. Malgré tout, c'est avec froideur que j'accueille mes premières écoutes. C'est qu'il a fallu se faire au chant de Necrosodom, plus arraché dans un esprit black metal, et à la nouvelle direction moins brute de décoffrage prise par les Polonais. Mais une fois ces évolutions digérées, le potentiel de ce nouvel album m'est apparu au grand jour. Album qui en plus se bonifie avec le temps, signe des grands!
Non mais attends, "nouvelle direction moins brute de décoffrage"?! Ils sont devenus hippies les Polacks?! Bien sûr que non. Cet album reste brutal à souhait et Inferno (oui, le batteur de Behemoth fait partie depuis toujours d'Azarath) ne s'est pas mis au jazz, lui qui reste une putain de sulfateuse humaine. On trouve donc encore tout un tas de blast-beats fulgurants qui vous mettront au tapis (écoutez donc "Holy Possession" et "Lucifer's Rising", titres les plus énervés de l'opus) et la vitesse de jeu demeure bien rapide dans l'ensemble. Mais le quatuor a décidé de varier davantage ses compositions, que ce soit dans les rythmiques et les ambiances, et de mettre plus en avant le côté mélodique. En gros, le death d'Azarath reste brutal et evil mais il se fait désormais plus raffiné, comme le suggérait la cover. Ces nouveautés, on le doit d'abord à Necrosodom. Si le growl sauvage de Bruno m'a manqué au début, j'ai vite compris ce qu'a su apporter son remplaçant. Par son chant bien plus versatile en premier lieu, plus à-même de véhiculer des émotions et qui donne à l'opus une couleur black metal savoureuse. L'intro magnifique de "Under The Will Of The Lord" en est le parfait exemple: les cris déchirants, torturés de Necrosodom me collent des frissons à chaque écoute. La fin du même morceau n'est pas mal non plus. Mais ce n'est pas tout. S'il n'a pas participé à la composition de l'album, toujours réservée au guitariste Bart et à Inferno (qui a d'ailleurs enregistré pour la première fois ses parties de guitare), l'ex-Thunderbolt est l'auteur d'excellents solos chaotico-mélodiques ("Supreme Reign Of Tiamat" à 3'20, "Firebreath Of Blasphemy And Scorn" à 2'58 puis plus construit à 3'39, "Behold The Satan's Sword" à 1'59, "Under The Will Of The Lord" à 3'04, "The Abjection à 2'25, "Harvester Of Flames" à 2'09 ou encore "Crushing Hammer Of The Antichrist" à 2'33 qui devient carrément jubilatoire quand Inferno blaste par-dessus à partir de 2'45, éjaculation spontanée garantie!). Des solos toujours bien sentis qui démontrent non seulement une bonne technique mais aussi un feeling indéniable. Ça, c'est du remplaçant!
Et en parlant de feeling, Necrosodom n'est pas le seul à en faire preuve sur ses solos. Blasphemers' Maledictions regorge en effet de riffs de tueurs, à la fois dans les parties rapides et brutales ("Deathstorms Raid The Earth", véritable festival, "Behold The Satan's Sword" vers la première minute avec un riff thrash joué dix fois plus vite, etc.), les séquences evil ("Deathstorms Raid The Earth" au début, miam!) ou les breaks plus mélodiques ("Firebreath Of Blasphemy And Scorn" à 1'28, "The Abjection" à 1'44 et 3'11...). Des mélodies omniprésentes, pas seulement dans les solos ou les breaks mais aussi dans les riffs tremolo bien dark ou étonnamment mélodieux pour du Azarath comme ces motifs à 3'30 sur "Supreme Reign Of Tiamat", 2'45 sur "Under The Will Of The Lord", "The Abjection" à 3'11 ou encore "Deathstorms Raid The Earth" à 3'46. C'est cet aspect plus mélodique que par le passé, façonné par un duo de guitares qui n'avait jamais été aussi complémentaire (l'une fait rarement la même chose que l'autre), qui donne ses lettres de noblesse à Blasphemers' Maledictions et le rend si addictif. La formation arrive même à groover un peu, on pense en particulier à ce mid-tempo appuyé sur l'ouverture du dernier titre "Harvester Of Flames" d'une simplicité déconcertante et inhabituelle pour le groupe qui du coup surprend au premier abord. Après un temps d'hésitation, on secouera finalement la tête en rythme mais on saluera comme il se doit l'arrivée d'un riff génial à 0'43 plus dans l'esprit de l'album avec une mélodie sombre et entêtante.
Azarath s'ouvre ici à de nouveaux horizons, proposant une musique plus variée, mélodique, ambiancée et raffinée, sans toutefois renier ses racines puisque le death des Polonais se fait toujours brutal, sombre et evil. Essayer de nouvelles choses sans trahir son son d'origine, voilà une vraie évolution réussie (n'est-ce pas Morbid Angel?) pour l'album le plus ambitieux et abouti du combo de Tczew. On regrettera certes le côté bourrin bête et méchant des œuvres passées, ou la basse de P. quasi inexistante, mais l'impression de belle surprise prendra vite le dessus. À tel point que Blasphemers' Maledictions se place parmi les meilleurs albums de 2011 et juste derrière un Diabolic Impious Evil intouchable. Alors rangez moi au placard vos Behemoth, Vader et autres Decapitated et foncez vous procurer la bête, parce que le vrai roi de Pologne, c'est Azarath!
| Keyser 25 Octobre 2011 - 4446 lectures |
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