Si on m'avait dit un jour que je chroniquerais un cd où des Anglais évoquent les hauts faits d'armes du très français Godefroy de Bouillon (que mon correcteur orthographique veut remplacer par « godefroid » comme le dernier des Jean Roucas, ou le premier des Belges, ce qui est encore pire), j'aurais été suspicieux. Par contre, chroniquer du Sarpanitum, ça je l'aurais volontiers cru, car après un bon premier album,
Despoilment Of Origin, en 2007, les Anglais s'étaient vite positionnés comme le groupe à suivre de la scène brutal death de la perfide Albion. Il faut dire qu'avec un nom de divinité babylonienne et un logo signé Christophe Szpajdel, Sarpanitum avait tout pour réussir – sans même parler d'un très bon niveau technique qui leur a permis de proposer un brutal death assez sombre à l'époque largement influencé par The Monolith Deathcult et Behemoth. Mais après une pause de plusieurs années et la pige de Tom Hyde et Sean Broster chez Mithras, ce n'est qu'avec un discret EP de quatre titres que le groupe désormais duo – centré autour des deux Tom (Hyde et Innocenti), guitaristes et seuls compositeurs – est revenu en 2011. Et certes, ça fait trois ans qu'on aurait dû vous en parler sur Thrasho, mais Keyser était trop occupé avec Beyond Mortal Dreams et Lvcifyre pendant que moi je faisais du cosplay d'étudiant en droit (c'est comme en vrai sauf que ce qui prend le plus de temps c'est de faire le costume). De toute façon puisque vous êtes des gens de goût, sinon vous ne me liriez pas, vous avez déjà
Fidelium depuis un moment dans votre cdthèque.
Ce ne sont donc que quatre titres (dont un interlude), écrits à autant de mains par des musiciens pas manchots, qui composent cet EP, laissant une boîte à rythme fort bien programmée faire office de batterie en l'absence de Sean Broster. Et si le taux de blast à la minute est toujours aussi élevé chez Sarpanitum malgré tout, le style du groupe a tout de même évolué, passant d'un brutal death assez étouffant sur
Despoilment Of Origin au « brutal blackened death metal » que l'on affectionne tant ici. Je n'évoquais pas Lvcifyre et Beyond Mortal Dreams pour rien, c'est véritablement dans cette cours que joue désormais Sarpanitum, mettant en avant une ambiance sombre et pesante tout en gardant un aspect brutal death ultra prononcé. Mais s'il n'a pas l'odeur de soufre et l'aspect occulte directement hérité de Incantation d'un
Svn Eater , le style de Sarpanitum fait la part belle aux mélodies graves soutenues par quelques arrangements plus aigus à la limite de la dissonance, avant d'exploser dans une furie de blasts et de riffs morbid-angeliens parfois soutenus par de discrets claviers.
Fidelium fait penser à
Dreaming Death en plus rapide croisé avec du Mithras, le tout sans solos ou presque (on reste dans un brutal death très direct). Car oui l'influence de Leon Macey, qui a produit cet EP, plane sur ces quatre titres, du riffing le plus voyant à l'arrangement le plus discret, on sent les deux Tom extrêmement fans de Mithras, jusqu'à l'utilisation du clavier en de sublimes chœurs pour apporter un belle touche atmosphérique parfois proche des teintes cosmiques de leur modèle.
Et si, alors que je vous dis que
Fidelium est un mélange de Beyond Mortal Dreams et Mithras, vous ne bavez pas déjà d'envie, alors je vous prie d'arrêter de lire cette chronique, vous vous êtes trompé, la dernière bafouille d'Ikea est juste en dessous (dépêchez-vous de sortir, votre odeur de ganja va imprégner la moquette). Évoluant pourtant dans un style un peu plus frontal, Sarpanitum n'en subjugue pas moins par la justesse de ses mélodies et l'intelligence de ses compositions, faisant varier l'intensité d'un même morceau à maintes reprises sans que jamais il ne perde en efficacité. Certes, il faut être familier de la débauche de blasts et de l'imperméabilité d'un tapis de double pédale supersonique pour entrevoir la majesté du boulot des deux musiciens, et ceux que les très hauts tempos rebutent ne trouveront pas de répit dans trois titres qui culminent à 260, 270 et 260 bpm. Mais pour ceux qui comme moi aiment leur brutal death aussi rapide qu'intense, alors Sarpanitum ne peut que combler au delà de toute espérance. Certains trouveront sans doute
Fidelium un poil trop propret pour que leur brutal death soit vraiment « blackened », et s'il est vrai que l'on sent plus l'influence de Morbid Angel que d'Incantation, les riffs sont tout de même assez souvent proches des canons du black metal, en particulier sur « Before The Walls », même en dehors des dissonances proches du black metal actuel qu'on retrouve au début du titre. Au delà de l'extrême efficacité des riffs, c'est vraiment par l'ambiance que Sarpanitum brille, alliant avec talent le plomb de la rythmique et des excellents vocaux de Tom Innocenti et l'éclat des arrangements mélodiques qui apportent parfois des touches vraiment lumineuses, en particulier sur « Sanctus Incendia » et bien sûr les deux minutes purement atmosphériques du titre éponyme.
Une évolution magnifique pour un groupe qu'il faut définitivement suivre avec intérêt, même si l'on ne peut s'empêcher de penser que c'est l'énorme influence de Mithras qui les a fait progresser d'un très bon
Despoilment Of Origin à un
Fidelium quasi-miraculeux. Au delà de la production de Leon Macey, je ne peux m'empêcher de penser que la boîte à rythme a été programmée en pensant à son jeu (qui n'est certes pas très éloigné de celui de Sean Broster, ancien batteur de Sarpanitum et pigiste live chez Mithras), la descente de toms à 270 sur « Before The Walls » en particulier, en plus bien sûr d'une grosse caisse martyrisée plus que de raison comme aux plus belles heures de
Worlds Beyond The Veil. Et ce n'est évidemment pas un hasard si Leon Macey a été la première personne à laquelle les deux Tom ont pensé pour occuper le poste de batteur vacant pour enregistrer leur prochain album, à paraître sous peu sur Willowtip, qui est désormais aussi le label de... Mithras. Il faudrait vraiment être un triste sire pour reprocher à Sarpanitum une si saine influence, et même sans penser à mon instar que Mithras est la meilleure chose qui soit arrivée au death metal ces quinze dernières années, vous devriez absolument jeter une oreille à
Fidelium et leur futur album, qu'on ne mettra définitivement pas trois ans à chroniquer. Si je le pensais, je dirais que le seul défaut de cet EP est qu'il est anglais, mais depuis le début des années 2000 la scène death metal anglaise ne cesse de nous mettre des baffes, certes peu nombreuses mais qui nous rougissent les joues à chaque fois, tant par leur impact que par la honte que l'on est en droit de ressentir quand on voit les Français ramer pour se rappeler comment faire du death metal en tenant leurs instruments à l'endroit. Et puis après tout cette vieille rivalité franco-anglaise est dépassée depuis longtemps, ça ne sert à rien de ressasser le passé, il faut se rappeler nos belles amitiés, comme le temps béni des croisades où un monarque anglais a donné son nom à un camembert français. Si ça ce n'est pas un plaidoyer pour l’amitié entre les peuples...
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