Moins de trois ans après un
Samsara à ranger désormais parmi les classiques du genre, Catharsis revient avec un deuxième album intitulé
Passion. Le groupe ne le sait pas encore mais il s'apprête pourtant à tirer sa révérence, la sortie l'année suivante du split
Arsonist's Prayer/Ready To Leave, Ready To Live en compagnie des Hongrois de Newborn signant alors la fin de son existence. Toutefois, malgré ces trois années qui séparent
Samsara du bien nommé
Passion, rien ne semble avoir réussi à diminuer l'énergie destructrice et le souffle contestataire qui anime Catharsis depuis ses débuts. Au contraire, ces tournées incessantes et cette vie de bohème toujours un peu plus en marge de la société semble avoir donner encore plus de ressources à Brian Dingledine et à sa bande de tristes drilles.
Pourtant, malgré que cette énergie soit restée la même,
Passion est probablement pour moi l'album le plus accessible de Catharsis. Pourtant, aujourd'hui encore la noirceur suffocante du propos reste inchangé, le chant de Brian paraît toujours aussi arraché et désespéré, les mélodies sont toujours autant désabusées... Bref, Catharsis ressemble à Catharsis. Sauf qu'avec ce deuxième album, le groupe s'est autorisé quelques libertés faisant de
Passion un album légèrement moins marquant que son prédécesseur.
Cela me fait presque mal de me montrer un tant soit peu critique vis à vis de Catharsis. Pourtant, je dois bien le reconnaître, aujourd'hui encore, ma préférence va très clairement vers
Samsara plutôt que
Passion. Pourquoi? Et bien principalement parce que comme je l'évoquais plus haut,
Passion est un album que je trouve plus accessible. Ne serait-ce que par son format, tout juste un peu plus de trente cinq minutes, soit presque dix de moins que
Samsara qui, certe, compte deux titres supplémentaires. Un détail pour certains mais qui selon moi révèle un certain désir de Catharsis de rendre sa musique plus immédiate. Sans vraiment laisser de côté les longues introspections ("Into The Eyeless Sockets Of The Night", "Duende (The Soil Is Closer Than The Sky)"), on sent tout de même que le groupe va plus facilement à l'essentiel. Cela se ressent donc inéluctablement sur les ambiances que je trouve dans l'ensemble moins oppressantes, moins torturées et donc aussi moins remarquables. Et puis surtout comment passer sous silence ce qui constitue selon moi la plus grosse erreur de parcours de la part de Catharsis, "Deserts Without Mirage". Un titre absolument affreux aux consonnances reggae particulièrement insupportables. Et on pourra bien me dire ce que l'on veut, souligner l'originalité de ce titre, cette dualité étonnante entre reggae et le chant arraché et totalement décalé de Brian ou bien encore l'audace de Catharsis à proposer un tel titre sur un de ces albums, rien ne pourra me faire changer d'avis au sujet de ce titre. Je ne supporte pas cette guitare qui cocotte, cette réverb' dubisante à vous donner mal au crâne, ce petit côté léger... Bref, tout, tout, tout!
Mais malgré ces critiques,
Passion est de ces albums qui se sont tout de suite placés au dessus du lot sans jamais en être délogés, et cela malgré les années qui passent. Je peux bien pester après ce morceau reggae dégueulasse, ces ambiances un peu moins étouffantes ou cette immédiateté faisant de
Passion un disque légèrement plus accessible, toujours est-il que Catharsis sait comment foutre l'auditeur à genoux en seulement quelques titres. Dans l'absolu, le groupe fait ici usage de la même recette que sur
Samsara, mélangeant ainsi Crust/Hardcore intense et Metal plombé. Une recette particulièrement efficace qui fait mouche dès le très court et expéditif "Passion..." et continue avec l'excellent "...Obsession" ou encore le très le tribal "Sabbat (Dervish Dance)". Un aspect tribal assez présent sur cet album ("Duende (The Soil Is Closer Than The Sky)" à 4:20, "Sabbat (Dervish Dance)"... Un peu comme un moyen pour Catharsis de se rapprocher de ses propres raçines. On retrouve également ces morceaux plus alambiqués, tantôt hyper incisifs, tantôt beaucoup plus sournois comme "The Witch's Heart (Lives Lost Too Soon - Or Too Late)" ou encore "Duende (The Soil Is Closer Than The Sky)". Bref, une fois de plus Catharsis déballe ici ses tripes avec passion, énergie et sincérité en offrant à l'auditeur une critique toujours aussi accerbe d'une pensée occidentale gangrénée par l'individualisme, le capitalisme, la prosélytisme...
Passion n'est donc pas mon album préféré de Catharsis. Il n'en est pas pour autant moins bon ou moins convaincant. Le groupe a simplement souhaité avec cet album s'ouvrir un peu plus au monde, s'aventurer dans des sonorités qui ne lui sont pas aussi familière. Si je salue la démarche, je me reconnais évidemment moins dans un titre comme "Deserts Without Mirage" mais pour autant je ne peux que m'enthousiasmer devant tout le reste, devant cette batterie tribale totalement hypnotique, ce mélange abrasif de Crust/Hardcore et de Metal, cette passion incroyable, cette rage désespérée et folle, cette envie qu'a Catharsis de questionner, de remuer les gens, de les déranger, de les repousser dans leurs plus sombres retranchements... Bref, d'être ce qu'il est, un groupe totalement à part.
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