Bon nombre ne s’en seraient pas remis. Vaillants Allemands, parvenus au sommet des charts et de la gloire dans les années 80 et retombés au trente sixième sous sol suite à deux gadins de rang,
« Chameleon » en tête (passe encore
« Pink Bubbles Go Ape », avec deux ou trois titres corrects comme « The Chance » ou « Someone’s Cryin’ »). Un suicide commercial qui précèdera de deux ans la disparition, véritable celle là, de leur batteur originel, Ingo Schwichtenberg et l’éviction du sensément irremplaçable Michael Kiske, dans la foulée d’une tournée catastrophique et de tensions croissantes entre les membres du groupe. A l’agonie fin 1993, HELLOWEEN trouvera néanmoins les ressources pour repartir de l’avant, fort d’un line up enrichi par l’arrivée du batteur Uli Kusch (GAMMA RAY) et de l’ex-PINK CREAM 69 Andi Deris derrière le micro, déjà pressenti pour succéder à Kiske en 1991. Au vu du contexte, la bonne tenue du sympathique « Master Of The Rings » relevait déjà du miracle mais pour ne rien arranger, les ex-fers de lance du speed metal engagent une opération de réhabilitation au pire moment qui soit. Car au milieu des années 90, le heavy tombe en désuétude et c’est à la force du poignet que la bande à Weiki va redresser la pente, le très bon « The Time Of The Oath » confirmant le retour en grâce d’un HELLOWEEN qu’on n’attendait plus à pareille fête. Suffisant pour anticiper la tornade « Better Than Raw », meilleur album des citrouilles toutes périodes confondues ?
Meilleur album du groupe, c'est certain, pour qui adhère à cette période d'HELLOWEEN au line-up le plus stable mais aussi le plus technique de son histoire, et qui marquera une nette rupture avec l'époque du gardien des clés. À mi-chemin entre le renouveau que fût « Master Of The Ring » et le sympathique « The Dark Ride » qui marquera le début de la fin, le duo « Time Of The Oath » et donc « Better Than Raw » propulsera les Allemands dans une dimension bien plus complexe et variée, presque à l'image de leurs compatriotes BLIND GUARDIAN. Sans les limitations techniques de Hansen et Schwichtenberg, et grâce au chant si particulier de Deris, HELLOWEEN peut enfin s'affranchir des codes trop classiques de son speed heavy metal des débuts en proposant au choix de véritables brûlots comme « Push », « Revelations » et le génial « Midnight Sun », empreints d'une rapidité que l'on ne retrouvait guère que chez ICED EARTH, de subtiles ballades comme « Hey Lord », « Time » ou « I Can », voire des ovnis faits d'un mélange de rock prog et de power/heavy comme « Don't Spit on my Mind » ou « Lavdate Dominvm ». Une véritable diversité qui se traduit aussi dans le jeu de ces excellents musiciens, alors au sommet de leur art, à l'image d'Uli Kusch qui – non content d'avoir composé « Deliberately Limited Preliminary Prelude Period in Z », intro mémorable dont le crescendo de violons restera longtemps dans les mémoires – délivrera une prestation à la fois subtile et atypique, qui ne sera guère comparable qu'à celle de Richard Christy un an plus tard sur l'album de CONTROL DENIED. Si « Better Than Raw » est de loin l'album le plus riche de l'histoire d'HELLOWEEN, entre les modulations vocales de Deris et les admirables leads du duo Weikath/Grapow qui le parsèment, on y trouve logiquement quoi contenter les amoureux des citrouilles les plus ouverts (les autres pleureront un temps révolu en reprenant une dose de médicaments contre leurs rhumatismes) comme les réfractaires au heavy metal plus classique, qui tiendront là l'opus le plus rapide et énergique du groupe.
En s’offrant à nouveau les services de Tommy Hansen, HELLOWEEN fait donc le choix de la puissance brute et s’offre un grain appréciable au niveau des guitares, presque thrash, une aubaine en ces temps de disette pour le genre (à l’exception notable de l’album éponyme de THE HAUNTED). Plus costaud que « The Time Of The Oath » en la matière, ce huitième full length profite à plein d’un tracklisting sans faille qui enchaîne les hits avec une facilité déconcertante, faisant passer les cinquante minutes de la galette pour une attraction express à Disneyland, les trois heures trente d’attente en moins. Ça cogne donc assez dur sur un opener extirpant sans ménagement les citrouilles du format speed metal classique (« Push », boostée par le jeu survitaminé d’Uli Kusch), le morceau fleuve « Revelation » et ses feux d’artifices rythmiques, la fantastique « Midnight Sun » se chargeant d’achever tout le monde après une gourmandise signée Weiki (« Laudate Dominum » et son chant en latin). Pour autant, n’allez pas penser qu’HELLOWEEN balaie son passé d’un revers de manche d’une VGS Guitar : s’il n’est pas crédité à la composition, Roland Grapow irradie de mille feux et assure le quota de leads néoclassiques propre à satisfaire maître YNGWIE, l’émotion atteignant son paroxysme sur les sublimes soli de « Don’t Spit On My Mind » et « A Handful Of Pain ». Et que dire de celui de « I Can », qui s’amuse à singer le démarrage de « Future World » avant de trouver sa propre voie ? Quant à Andi Deris, comme à son habitude, il délivre une prestation mémorable et bon nombre de refrains sont susceptibles de marquer la mémoire des fans (« Falling Higher », « Hey Lord ! » et bien sûr « Midnight Sun », encore et toujours !). La ballade « Time » casse le rythme ? Si l’on est parfois tenté de faire l’impasse sur cette ballade mélancolique lors d’une écoute régulière, difficile de lui trouver meilleure place qu’au sortir de la déferlante pyrotechnique d’une « Revelation », laquelle se permet quelques incartades power metal diversement appréciées.
Alors oui, s'il fallait vraiment trouver un défaut à ce qui est sans doute le seul album des Allemands sans faiblesse, ce serait le riff un peu trop lourd à 3:15 et 7:55 sur un « Revelation » qui possède par ailleurs un refrain imparable. Pas de quoi gâcher l'écoute de ce petit chef d’œuvre qui a évité avec parcimonie les rares errements de ces deux prédécesseurs, comme le trop pop « Anything My Mama Don't Like », et a su prolonger et améliorer la recette présente sur des tubes comme « Before The War » ou « Wake Up The Moutains », en proposant une musique tout à la fois plus rentre dedans et plus mélodique que lors de sa période classique. Un véritable aboutissement dans la carrière d'HELLOWEEN, qui sera malheureusement boudé très vite en live à cause d'une trop grande complexité qui rend cette montagne de tubes un peu trop casse gueule à jouer, pour cette bande de quinquagénaires qui ne retrouvera jamais pareille inspiration. Ce line-up, qui aura été le plus stable et productif de l'histoire du groupe, ne résistera pourtant pas au passable « The Dark Ride », dont le fantasque Michael Weikath dira après sa sortie que c'était « une merde » en le brisant devant les journalistes. Et si la suite de la discographie d'HELLOWEEN divisera bien plus les fans (et les deux rédacteurs de cette chronique) que ne le fît l'arrivée de Deris, « Better Than Raw » reste l'étendard qui rallie tous les amoureux d'une époque qui allait voir la résurgence d'un « true metal », comme on l'appelait à la fin des années 90, où tous les STRATOVARIUS, HAMMERFALL, EDGUY et RHAPSODY du monde copieront la recette sans jamais reproduire cette alchimie mémorable. Même le bonus track de l'édition japonaise « A Game We Shouldn't Play », qui accompagnait « I Can » sur le single éponyme, est un tube méconnu des citrouilles. Quand les bonus jouent dans la cour des titres qui ont été retenus pour le pressage original, c'est le signe d'un album à l'inspiration sans faille, à la constance et la qualité irréprochables. Sans doute le seul de l'histoire d'HELLOWEEN.
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