OBITUARY. L’exemple typique du groupe culte qui n’aurait jamais dû se reformer, après les trois pierres angulaires death metal délivrées au début des années 90. Car malgré des performances scéniques toujours convaincantes, jamais le groupe
from Tampa Florida ! n’a retrouvé le feu sacré de sa première partie de carrière, laquelle s’étend jusqu’à
« Dead » (1998), bon best of live sur lequel Allen West n’en branle malheureusement pas une. Il fut donc un temps béni du diable où les Américains régnaient en patron sur la scène death, on ne peut plus effervescente suite à l’émergence du duo MASSACRE/DEATH. Formé en 1984 sous l’aimable sobriquet EXECUTIONER (puis XECUTIONER, d’où la référence sur l’album sorti en 2007), c’est un groupe déjà presque au complet qui enchaîne les démos puisque les frères Tardy sont épaulés par le duo Trevor Peres/Allen West (guitares), Jerome Grable (basse) cédant bientôt sa place à Daniel Tucker après avoir enregistré deux titres pour la compilation « Raging Death » (« Like The Dead » et, ô surprise, « Find The Arise »).
« Slowly We Rot » voit donc le jour le 14 juin 1989 et croyez moi, ça n’était pas franchement un jour à sortir madame ! Ni même son chien d’ailleurs, tant le déferlement de violence qui s’en suit frôle le déraisonnable. Toujours aussi malsain, cradingue et dérangeant pas loin de 25 ans après sa sortie, le premier full length d’OBITUARY est un monument d’ultra violence ; le chant de John Tardy déjà, parfaitement inhumain (au bord du gouffre sur « Intoxicated ») et qui donne le sentiment d’être traqué sans relâche par une horde de sans repos échappés du ZOMBIE de George Romero. Un frontman exceptionnel et charismatique, c’est l’atout majeur qui permettra aux Floridiens d’atteindre des sommets en termes de vente –
« The End Complete » et ses 250 000 exemplaires écoulés – malgré des musiciens somme toute limités techniquement. Bien sûr, les références appuyées à CELTIC FROST sont déjà présentes (« Slowly We Rot », « Bloodsoaked », « Godly Beings ») mais pas autant que sur le tétanisant
« Cause Of Death », le death metal d’OBITUARY baignant alors dans la même fange thrashisante que le « Consuming Impulse » de PESTILENCE (un autre groupe qui n’aurait jamais dû revenir, tiens !). On a donc droit à une agression en règle, façon « Kill ‘Em All » des Mets avec une production plus garage tu parques ta tire sur un terrain vague (signée Scott Burns), que je persiste à préférer largement aux remasters sortis par la suite. Ceux qui ne connaissent le groupe qu’en mode diesel seront surpris par la férocité de compositions comme « Immortal Vision », « Gates To Hell » ou encore la fantastique « Intoxicated », brillamment reprise par ILLDISPOSED sur « Retro ». Rarement l’expression passage à tabac n’a pris autant de sens que lors de séquences on ne peut plus explosives (pris à la gorge d’entrée de jeu sur « Words Of Evil », le climax gore à souhait de « Gates To Hell ») qu’on ne retrouvera plus guère par la suite, OBITUARY prenant le parti de ralentir le tempo par 4 dès l’opus suivant.
Et si la basse peine à s’extraire de la cave dans laquelle ce premier full length a été enfanté, Allen West délivre sa meilleure performance à ce jour
(« World Demise » mis à part), dans un registre chaotique qui sied parfaitement aux 12 brûlots qui le composent. Musicalement moins carré que DEATH, OBITUARY compense largement ses manques par un groove infernal et une sauvagerie de tous les instants, au point qu’on a beau connaître l’album sur le bout des ongles, on sursaute encore à la moindre accélération initiée par un Donald Tardy déjà bien en place (cette caisse claire inimitable). Du survival horror death metal ? Il y a un peu de ça, tant l’ambiance inimitable qui règne sur ce premier sang pousse à la récidive, années après années, malgré l’indifférence plus ou moins polie suscitée par les fadasses
« Darkest Day » et
« Frozen In Time ». Sommet du genre et de la discographie inégale des Américains –
seul « Cause Of Death » rivalisera, dans un registre plus lugubre que frontal – « Slowly We Rot » est au death metal ce que le premier Rambo est au film de guerre : le passage de témoin d’un conflit entre nations à celui, bien plus traumatisant, d’une guerre civile.
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