Keyser déplorait – à raison – il y a quelques temps lors de la chronique de
« Deathhammer » l'absence quasi scandaleuse d' Asphyx en ces pages, et s'il avouait ne pas être un die hard fan des Néerlandais (ce dont je ne me qualifierais pas non plus) je dois confesser pour ma part être tout de même très sensible à un combo qui a tant apporté au death metal (et plus particulièrement aux déviances doomy de ce dernier). Si le groupe est désormais confortablement installé dans le paysage brutal, il semble toutefois indispensable de revenir quelque peu sur les débuts de l'histoire et notamment celle qui entoure la sortie d'un album emblématique qui bien qu' officiellement sorti cinq ans après le très reconnu « The Rack » se trouve être le vrai premier opus d' Asphyx. Explications.
C'est en 1987 que se forme l'un des plus anciens groupes de death hollandais (avec leurs collègues de Beyond Belief) sous l'impulsion de Bob Bagchus et Tony Brookhuis. Alors très influencé par les géniteurs du style (Death, Slaughter, Messiah, Xecutioner...) et débutant même sous la forme d'un cover band de Celtic Frost, le duo est alors rejoint par le bassiste/chanteur Chuck Colli et enregistre une première démo instrumentale intitulée « Carnage Remains » puis « Enter The Domain » toutes deux en 1988. Peu après c'est au tour d' Eric Daniels de rejoindre le groupe qui voit son premier line-up stable avec l'arrivée en mars 1989 du regretté Theo Loomans en lieu et place de Chuck Colli. C'est sous cette forme qu' Asphyx enregistrera « Crush The Cenotaph », démo qui fera énormément de bruit dans l'underground death metal et dont on dit même qu'elle se serait écoulée à près de 5000 exemplaires (on en retrouve d'ailleurs deux titres ici « Crush The Cenotaph » ainsi que « Thoughts Of An Atheist »). En 1990, juste avant l'enregistrement de « Embrace The Death », Brookhuis quitte le groupe qui entre donc en studio sous la forme d'un trio, les choses ne s'y dérouleront malheureusement pas comme prévu... Puisqu'au beau milieu de l'enregistrement nos trois jeunes musiciens apprennent que le boss du label anglais (CMFT) vient de se tirer avec la caisse, laissant le groupe sans un rond trouver de plates excuses auprès du propriétaire du studio et repartant finalement avec une simple cassette Maxwell comprenant l'album non mixé. Peu de temps après Loomans quitte le groupe (bientôt rejoint par Martin Van Drunen) et la cassette dormira pendant près de cinq ans jusqu'à ce que Bob Bagchus demande à Century Media de sortir l'album (qui sera plus tard réédité et re-masterisé en 2009).
Derrière cette histoire quelque peu rocambolesque se trouve donc le vrai premier album d' Asphyx qui s'avère être sans conteste son enregistrement le plus sombre à ce jour. Évoluant déjà dans un death doom étonnamment mature au regard de la jeunesse du style (très proche en cela de leurs collègues de Beyond Belief), « Embrace The Death » cristallise toute l'essence de la musique des bataves dans ce qu'elle a (avait?) de plus evil et primaire. Les compos du trio mélangent dès cette époque un death metal bourru et gras avec des influences doom des plus sinistres, ces dernières étant plus marquées à l'époque qu'aujourd'hui. Passée une intro lugubre parmi les plus mémorables qu'il m'ait été donné d'entendre, les néerlandais nous donnent une véritable leçon de death-doom soutenue par les riffs obscurs d' Eric Daniels semblant sortir tout droit des géhennes (« Embrace The Death », « Denying The Goat », « Vault Of The Vailing Souls ») dont certains vous hanteront longtemps (« Crush The Cenotaph ») et sublimée par ses leads mélodiques sépulcrales nous plantant au beau milieu d'un cimetière agité d'entités morbides (le début du titre éponyme, « Streams Of Ancient Wisdom »), usant parfois de disonnances encore plus malsaines (« Streams Of Ancient Wisdom » à 2'06, « Thoughts Of An Atheist » à 3'45). Mais à côté de ce death-doom evil à souhait, Asphyx montre déjà son appétence pour les passages plus groovy et l'on retrouvera nombre de riffs plutôt headbanguants, même si le groupe s'est amélioré à ce niveau avec le temps (les débuts de « The Sickened Dwell », « Thoughts Of An Atheist » et de « Circle Of The Secluded », « To Succubus A Whore » à 58'') et si les titres évoluent généralement dans un slow ou mid-tempo, quelques accélérations viendront rappeler à l'auditeur les influences plus (proto)death du groupe ( le titre éponyme à 1'58 puis 2'47, « Thoughts Of An Atheist » à 2'01, « Denying The Goat » à 3'24, « Vault Of The Vailing Souls » à 2'54, le début de « To Succubus A Whore »). Toutefois il apparaît évident qu' « Embrace The Death » n'aurait pas le même charme sans la prestation impressionnante de Theo Loomans, sa voix éructant des paroles empreintes de mysticisme possédant le côté vomitif que l'on retrouvera notamment chez Van Drunen (ou encore John Tardy ou Marc Grewe par exemple) mais moins marqué et doublé d'une profondeur que n'a pas son successeur faisant de son growl maléfique assez particulier une véritable incarnation des plus profondes entrailles des enfers collant parfaitement aux compositions.
S'il n'a jamais été mixé (seulement remasterisé) « Embrace The Death » est pour autant loin d'être un album à la prod immonde inaudible. Bien au contraire ce côté très cru participe probablement grandement de l'ambiance ténébreuse dégagée ici, notamment grâce à un son de guitare bien grumeleux et puissant. Malgré tout le groupe réenregistrera beaucoup de ces titres sur ses successeurs (le titre éponyme deviendra « Pages In Blood » sur « The Rack », « The Sickened Dwell » y sera « The Sickening Dwell », « Denying The Goat » se changera en « Diabolical Existence », « Circle Of The Secluded » en « Evocation » et « To Succubus A Whore » sera en partie reprise pour « Wasteland Of Terror », quand « Streams Of An Ancient Wisdom » figurera sur « Last One On Earth ») et Martin Van Drunen réécrira certaines paroles dont les aspects occultes - dit-on – ne lui convenaient pas (certaines paroles originelles ont de toutes façons été perdues à jamais). Même si elle comporte quelques petits défauts (un léger décalage guitare/batterie parfois sur « Thoughts Of An Atheist » ou la fin très abrupte de « To Succubus A Whore ») cette première offrande d' Asphyx, la plus obscure, reste peut-être ma préférée. « Embrace The Death » est un album à l'ambiance incroyable (l'intro lugubre, les mélodies sinistres, les choeurs empreints de dévotion sur « Vault Of The Vailing Souls ») marquant à jamais les début d'une scène encore généreuse aujourd'hui. Theo Loomans fera un bref retour avec le groupe en 1996 sur le décrié « God Cries » avant de disparaître en 1998.
NB : la version remasterisée de 2009 comporte également sur un deuxième CD les trois démos « Mutilating Process », « Enter The Domain » et « Crush The Cenotaph » ainsi que quelque sautres titres.
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