Ugly Kid Joe - Menace To Sobriety
Chronique
Ugly Kid Joe Menace To Sobriety
Trois ans après avoir explosé à la face du monde entier avec le génialissime
« America’s Least Wanted », les joyeux lurons d’Ugly Kid Joe s’apprêtent à dévoiler son successeur. Dure tâche que celle d’écrire une nouvelle page après avoir squatté le top des charts et tourné avec les plus grands (Ozzy Ozbourne, Def Leppard…). Indéniablement attendus au tournant, nos Californiens continuent les références avec cette fois-ci un clin d’œil au film « Menace II Society ». Toutefois, probablement soucieux de ne pas s’embourber dans l’image quelque peu loufoque qui est la leur, « Menace To Sobriety » arborera un nouveau logo et une pochette malheureux. Dès lors moins engageant que son ainé, ce deuxième album, qui pâtira d’une piètre promotion du label Mercury, n’en demeure pas moins excellent. N’atteignant pas les sommets d’
« America’s Least Wanted », le groupe se montre malgré tout ici encore très inspiré musicalement (c’est l’essentiel !), distillant dans une ambiance un brin plus sérieuse nombre de hits qui squattent encore aujourd’hui la setlist des vétérans d’Isla Vista.
Après une intro mémorable qui sert aujourd’hui encore d’amuse-bouche au groupe en live et nous présentant un son toujours aussi rond bien que plus rugueux, « God » nous montre tout de suite un Ugli Kid Joe plus incisif et musclé mais toujours aussi à l’aise dans la confection de titres ultra fédérateurs construits autour de riffs encore une fois aux petits oignons (« God », l’imparable « Clover », « Jesus Rode A Harley », « V.I.P. ») et mis en valeur par le jeu groovy (ce jeu de grosse caisse simple mais tellement efficace) du nouvel arrivant Shanon Larkin. Si quelques-uns de ces brûlots au groove intact n’auraient pas forcément fait tache sur
« America’s Least Wanted », et si « C.U.S.T. » renoue avec les accents funky tant appréciés de la bande à Whit, on sent pourtant tout de suite que le quintette a souhaité éviter la redite pure et simple. « Tomorrow’s World » se montre ainsi bien plus sombre que tout ce que le groupe avait pu proposer par le passé, quand d’autres titres tireront plus sur la corde énergique du groupe − je n’irais tout de même pas jusqu’à dire ‘’violente’’ − (« Clover », « V.I.P. », « Oompa ») à l’instar d’un Whit au timbre plus rocailleux que précédemment. En revanche la facilité avec laquelle Ugly Kid Joe nous pond des tubes potentiels à la pelle reste déconcertante. Car en plus des « God », « Clover » ou « V.I.P. » déjà cités que dire d’un nouveau bijou du calibre de « Milkman’s Son » ? Véritable rayon de soleil typiquement 90 au refrain absolument irrésistible, emmené par un frontman toujours impeccable vocalement et tellement charismatique, ce titre justifie à lui seul l’achat de l’album. Et c’est peut-être bien sur le versant plus sensible que le groupe réussit le mieux sur « Menace To Sobriety » avec ces deux splendides ballades que sont « Cloudy Skies » et « Candle Song ». Des accords simples, des mélodies superbes, la voix de Whit… Le sourire et la larme à l’œil. « Menace To Sobriety » est un album spontané que l’on imagine aisément composé à la cool comme le suggèrent les quelques photos à l’intérieur du livret et à l’image d’un titre de clôture d’une simplicité déconcertante mais qui, une fois de plus, tape dans le mille.
Évidemment mis en difficulté par la comparaison inévitable avec son illustre ainé, ce deuxième effort d’Ugly Kid Joe ne souffre d’aucun défaut patent si ce n’est d’une qualité globalement un cran en dessous à l’image des interventions solistes de Dave Fortman et Klaus Eichstadt toujours pertinentes mais un chouïa moins démonstratives. Presque vingt ans après sa sortie, je reste persuadé que ce mauvais choix de logo et de pochette fut en grande partie responsable du déclin d’un groupe jusqu’alors musicalement irréprochable. Finalement lâché par Mercury du fait des mauvaises ventes US de ce nouvel opus plutôt bien accueilli sur le vieux continent, Ugly Kid Joe optera pour le DIY en créant leur propre label Evilution Records pour la sortie de « Motel California », troisième et dernier album en date qui scellera définitivement la mort du groupe.
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