C'est bientôt la rentrée! Ça fait chier hein? Remarquez, je ne suis plus concerné depuis belle lurette. Mais je me rappelle quand j'étais un jeune et fringuant lycéen que j'avais bien les boules de devoir retourner au bahut après plus de deux mois à glandouiller. Et comme tous les ans, on retrouvera au programme scolaire des maths. Même pour les tapettes en L. Mais ne vous inquiétez pas, le type d'algèbre proposé ici s'avère bien plus divertissant. Vous vous souvenez d'Algebra, petit groupe de thrash dont j'avais chroniqué le premier EP
Procreation et le premier full-length
Polymorph sortis en indépendant et depuis réédités sur une seule galette par StormSpell Records? Hé bien les Suisses sont de retour avec un nouvel album, cette fois chez Unspeakable Axe Records, décidément très porté sur le thrash après Besieged, Birth A.D., Omnivore et Zoldier Noiz. Même qu'il s'appelle
Feed The Ego, qu'il doit soit-disant sortir le 2 septembre mais qu'il est déjà disponible partout depuis juillet et qu'il perpétue la tradition des pochettes moches du combo et du genre.
Cela faisait un bout de temps que je n'avais pas écouté et chroniqué du thrash. La source thrash revival qui semblait si abondante il y a quelques années ce serait-elle tarie? Par rapport à la vague death metal qui continue de déferler, j'ai l'impression que les choses se sont calmé niveau thrash. Ou est-ce moi qui passe trop de temps à écouter du death et du heavy? Quoiqu'il en soit, je suis bien content de pouvoir reparler thrash, genre qui reste un de mes préférés. Surtout pour dire du bien d'un combo certes peu connu encore mais dont le talent devrait les aider à se faire une place dans le cœur des nombreux thrashers nostalgiques de la grande époque. Non pas que
Feed The Ego se place en nouvel étalon du style. Il fait juste putain de bien par où il passe!
Et personnellement, c'est tout ce que j'attends d'un album de thrash. Celui d'Algebra se veut très porté sur la scène américaine de la fin des années 1980 et du début des années 1990. Un mélange de Slayer, l'influence principale, et de Bay Area (Metallica, Heathen), mâtiné de touches plus contemporaines comme ces coups de sang blastés que, comme d'habitude, j'aimerais plus fréquents, bourrin oblige. Mais difficile de blâmer un groupe de thrash de ne pas assez blaster! La rythmique typique du genre, c'est plutôt le skank beat, le tchouka-tchouka pour les intimes. Et là, Algebra n'hésite pas!
Feed The Ego ne souffre ainsi d'aucun problème de vitesse ou d'efficacité. Ça balance sec sur des riffs classiques et bien affûtés. La production, claire, naturelle et métallique, avec une batterie sèche qui claque comme j'aime, met en plus bien en valeur des morceaux accrocheurs taillés pour le live. Mais attention, Algebra ne se résume pas qu'à cela. Les Suisses ont un vrai talent de composition et ont élevé leur niveau technique. Ils ne se contentent pas d'envoyer la sauce sur de la rythmique binaire, ce qui aurait été sans doute assez répétitif sur trois quarts d'heure. Non, la la formation de Lausanne sait varier son jeu pour nous pondre des titres différents les uns des autres, tout en restant liés. Un vrai album, quoi. Une richesse et une diversité qui nous feront naviguer sur tout un tas de rythmiques, notamment des mid-tempos qui swinguent là-aussi très efficaces. Le panel de riffs se montre lui aussi assez large et chaque piste se trouve enrichie de solos tantôt chaotiques à vibrato tantôt plus mélodiques et construits, ainsi que de leads accompagnant souvent les riffs sur les breaks et les séquences moins frénétiques. Les Helvètes y vont également de leurs passages en arpèges sur pas mal de pistes telles "Prisoner Outdoors" (3'50) ou les intros de "Necessary Evil", "My Shelf" (plus lead mélodique splendide) et "Profound Guilt" (sombre et menaçant avant d'envoyer le bois). Du classique aussi mais bien foutu. Plus surprenant, le titre "My Shelf". Une sorte de power-ballade sur laquelle Algebra dévoile un visage mélancolique et démontre une nouvelle fois un excellent feeling. À tel point qu'il s'agit de mon morceau préféré, une vraie réussite!
Bref, on ne s'ennuie pas et ce dès le titre d'ouverture "Survival Nowadays", brûlot certifié pur thrash qui déboîte! On note toutefois un coup de moins bien en fin de parcours sur "Feed Me More", "Egosystem" et "The Fort Broke". S'il faut trouver un point faible à
Feed The Ego, c'est ici. Rien d'horrible bien sûr, on reste dans du thrash au-dessus de la moyenne, mais l'inspiration y est moindre et ces trois titres ne me font pas le même effet que les autres. L'ouverture à la basse de "Feed Me More" est toutefois très cool et "Egosystem" s'améliore nettement sur sa dernière partie enlevée. Et Algebra évitera de finir sur une mauvaise note comme pour
Polymorph grâce à un dernier titre redoutable, "Monotask", résumé convaincant de toutes les valeurs du groupe. Un autre point qui pourrait être considéré comme un défaut et dont j'ai entendu quelques personnes se plaindre sur la Toile: le chant. Il est vrai que celui-ci, un peu typé crossover, manque de puissance et de variété. Les séquences en chant clair ne sont pas non plus incroyables. Mais le bonhomme se débrouille plutôt bien sur l'excellente "My Shelf" et son timbre colle tout de même avec la musique, tout comme ses paroles très critiques envers la société et les Hommes, typiques du style. Et puis, entre-nous, les vocaux n'ont de toute façon jamais été le point fort du thrash qui donne toute son importance aux guitares.
Aucun souci de ce côté là sur ce
Feed The Ego tout à fait satisfaisant. Algebra ne déçoit pas et continue son petit bonhomme de chemin. J'ai presque envie de dire que les Helvètes commencent à avoir leur propre patte même si cela reste difficile de parler d'originalité. Rien de bien nouveau en effet ici mais Algebra nous propose un très bon opus de thrash metal, ce qui ne court pas les rues ces temps-ci. Dommage qu'il y ait ce petit passage à vide vers la fin car j'aurais bien monté la note à 8. On retrouve sur
Feed The Ego ce parfum thrash classique de la belle époque, ces riffs agressifs et accrocheurs inspirés, ces rythmiques entraînantes, ces solos endiablés. Algebra a bien appris sa leçon mais ne se contente pas de la recracher bêtement. On sent la passion, la conviction et la sincérité, le tout sans se prendre la tête. Le groupe y apporte en plus une légère touche moderne qui ne trahit en rien l'essence du style ou de l'époque. Depuis l'enregistrement de
Feed The Ego, nos voisins ont perdu leur chanteur guitariste Edy. Espérons que cela ne freine pas les ardeurs du groupe qui, à mon avis, n'a pas encore tout dit.
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22/08/2014 12:22