Sigh - Imaginary Sonicscape
Chronique
Sigh Imaginary Sonicscape
Depuis que je suis arrivé sur Thrashocore – ça fait quand même plus de deux ans -, j'ai cet album dans mes réservations. Et j'ai essayé au moins 25 fois de commencer à en écrire la chronique avant de tout effacer et de recommencer deux mois plus tard. Wallah, ça me met le seum. Diantre, comment se fait-ce ? Un de mes disques cultes à dix sur dix et je ne suis pas foutu d'écrire plus d'un paragraphe à son sujet ? Oui, d'accord parler de Sigh c'est pas évident et je l'ai déjà dit dans plusieurs autres chroniques... Mais alors pourquoi j'arrive à parler des autres et pas de celui-là ? Parce que c'est le meilleur ? Possible car à la réflexion mettre des mots sur cette chose est le travail de chroniqueur qui m'aura le plus bloqué. Bloqué dans mille et une visions de ce disque et,par conséquent, dans mille et un choix de mots à poser sur l’œuvre...
« Imaginary Sonicscape » est, comme son nom l'indique, un album dévoué à l'imagination. C'est super les gars mais ça m'aide vraiment pas dans mon job. Étant donné que là où beaucoup de disques permettent de visualiser des images (un pré, la mer, l'espace, Satan, peu importe...), celui dont nous parlons aujourd'hui permet de voir tout et rien. Tu veux voir un Tournesol qui vole dans le ciel ? Tu écoutes « Imaginary Sonicscape ». Tu veux pleurer un bon coup parce Jessica t'a lâché la semaine dernière ? Tu écoutes « Imaginary Sonicscape ». Tu fais le ménage et tu utilises du Vigor (parce que Vigor, y'a pas plus fort, TMTC) et tu cherches un album qui rappelle la couleur verte-jaune-fluo du dit liquide ? Tu écoutes « Imaginary Sonicscape ». Vous m'avez compris et vous voyez comme c'est emmerdant. Le traditionnel paragraphe sur l'émotion va y passer, c'est sûr puisque ça dépendra de bon nombres de critères infiniment déclinables selon la personnalité de l'auditeur.
Et puis, musicalement, on ne peut pas dire que ça m'arrange beaucoup tellement il y a de tout et aussi pas mal de n'importe quoi... On aurait pu dire que c'était globalement Black Metal un peu plombé s'il n'y avait pas cette foutue « A Sunset Song » aux allures de Rock californien. En plus, si l'on cumule les passages étranges et hors-sujet, on ne peut définitivement pas dire que c'est un disque mélancolique. Pour autant et malgré les nombreux délires de Mirai propulsés par des synthétiseurs loufoques, on ne peut pas non plus dire que l'ensemble sonne joyeux ou enjoué. Tout simplement parce qu'il y a des moments qui touchent directement la sensibilité de l'auditeur en plein cœur : « Corpsecry - Angelfall » ou encore « Requiem - Nostalgia ».
D'aucun diront que Sigh, c'est kitschouille avec les orchestrations bizarres, les synthés datés et ce côté old-school thrash. Mais d'un autre côté, c'est encore un problème car si une partie des instruments semblent « datés », l'album s'inscrit de par sa qualité musicalement comme un intemporel, errant dans les âges et ne vieillissant pas d'un iota. « Nietzschean Conspiracy » avec son style électro-orchestral à l'ancienne bien affirmé reste pourtant difficilement a situer sur l'échelle temporelle. C'est un disque si bien écrit et si grand dans son ensemble qu'on ne peut le regarder que d'en-bas, avec un air de respect et d'admiration. Un fragment d'une chose intouchable qui vole dans le ciel, comme porté par une force mystique. Parfois, j'en viens à penser que cet opus est un « mushi » des temps anciens, comme dans la série « Mushishi » : « Les Mushi sont des être primaires, bien plus primaires que les insectes, plantes, ou bactéries ; ils sont pour ainsi dire tellement primaires qu'ils sont indissociables de "la vie". En fait ils sont à la frontière entre la vie et la mort. ». Une autre comparaison est cependant possible : Laputa !
J'y suis, « Imaginary Sonicscape » est cette île farfelue, ce monde si près mais pourtant si loin ou l'on peut côtoyer les créatures robotiques ou charnelles que l'on aurait même pas pu imaginer. Il possède en son sein la lourdeur écrasante de la mythologie, l'inquiétude des tragédies qui peuvent s'y dérouler, la beauté de son paysage atypique, l'innocence enfantine, les surprises que connaît l'explorateur en quête d'aventures inédites, l'étonnement de la découverte, la magie qui régit son âme et ses mouvements. « Imaginary Sonicscape » est un château dans le ciel à sa manière. Régulièrement, il survolera à nouveau vos enceintes, repassant quand ses héritiers auditeurs le voudront et que la pierre s'allumera en sa direction.
Vous l'aurez compris, l'album tend à l'élévation spirituelle et il y arrive avec l'art, la manière et une patte personnelle que personne d'autre n'a. Il en fera voir de toutes les couleurs, à l'image de sa pochette si spécifique avec ce mélange de couleurs pétantes, de symboliques japonaises et de démonologie. Le son est également bien plus puissant et fin que sur les anciennes productions du combo, préférant la force au côté « roots » du genre. Si elle est un peu spéciale au premier abord, elle sert avec beaucoup de classe le disque, accentuant l'aspect parfois Rock et parfois plus trippé des compositions. Monstre indiscuté et indiscutable de la discographie des japonais, « Imaginary Sonicscape » se présente comme la quintessence de leur Black Metal Avant-Gardiste, sachant se faire plus accessible que ses prédécesseurs et paradoxalement plus fouillé, complexe et varié dans ses ambiances.
Pour ceux possédant ou désirant se posséder la ré-édition de The End Records, sachez qu'elle contient deux titres bonus, "Voices" en numéro sept et " Born Condemned Criminal" en numéro neuf qui sont, pour une fois, des bonus de qualité.
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