The Deathtrip - Deep Drone Master
Chronique
The Deathtrip Deep Drone Master
Nostalgiques de la scène black metal norvégienne des années 90 ? Vos yeux pétillent à la vue des mots « black illumination » ? Vous faites une overdose de tous ces groupes de post-black, black expérimental, black ambient et black orthodoxe ? De plus vous vénérez Thorns ainsi que les premières œuvres de Dødheimsgard ? Réjouissez-vous car le premier opus de The Deathtrip ˗ paru ce mois-ci via Svart Records ˗ va vite remédier à votre morosité ambiante ! Formé en 2007 par le monument norvégien Aldrahn (Thorns, Dødheimsgard , ex-Old Man's Child mais aussi ex-Zyklon-B aux côtés d'Ihsahn, Samoth et Frost) et l'Anglais Host (guitariste du groupe de rock expérimental/progressif Thine, signé chez Peaceville) le duo sortira deux demo, en 2008 puis en 2010, de manière très confidentielle. Des débuts étonnamment discrets malgré une belle compilation ayant vu le jour l'an passé via Demonhood Productions ainsi que des titres d'excellente facture, dont cinq figurent sur Deep Drone Master.
En effet sur les neuf morceaux ˗ introduction exclue ˗ seuls quatre sont des inédits « Sewer Heart », « Cocoons », « Something Growing in the Trees » et « Syndebukken », les anciens formant la première partie de l'album. Une semi-déception va rapidement s'installer....et s'estomper aussitôt car le maître d’œuvre Snorre Ruch (membre fondateur de Thorns) leur donne un second souffle grâce à une production très massive, minutieuse alliant parfaitement sonorités old-school et modernes. Des titres remaniés, une batterie prenant de l'ampleur ˗ avec Daniel Mullins (Thine, ex-My Dying Bride, ex-The Axis of Perdition) comme batteur de session ˗ ainsi que les vocaux de possédé du shaman Aldrahn encore plus prenant, tout est fait pour captiver mais aussi museler l'auditorat. De même les compositions d'Host prennent ici une nouvelle dimension avec un regain d'efficacité et une mise en lumière de ses influences rock ˗ le tubesque « Making Me » ˗ qui nous renvoie à Satyricon post-Nemesis Divina.
Certes vous ne retrouverez pas ici de black indus ou encore de déchaînement de violence à la 666 International, cependant certaines ambiances tant mystiques qu'électriques évoquent grandement l'album éponyme de Thorns ˗ sur « Flag of Betrayal » et « Cosmic Verdict » notamment. Une froideur mordante mêlée à des riffs accrocheurs ainsi que des mélodies imparables et entêtantes sorties tout droit des années 90 qui vous happent littéralement. En effet, il est impossible de ne pas penser à Gorgoroth ˗ en particulier Antichrist mais surtout Under the Sign of Hell ˗ pour l'efficacité et la grandiloquence, à l'écoute de ce Deep Drone Master placé sous le signe du Malin. Impossible aussi, parmi toutes les influences de The Deathtrip, de ne pas citer Darkthrone ˗ période 1993-1995 ˗ avec cette oppression omniprésente due à la redondance ainsi qu'à la saturation et le grésillement des guitares, vous agressant sans cesse, le plus bel exemple étant « Cosmic Verdict ».
Les titres défilent à la vitesse de la lumière, laissant une longue traînée de soufre dans leur sillage, vous éblouissant toujours un peu plus de leur noir éclat et vous explosant à la figure les uns après les autres. Une succession de claques avec entre autres « Flag of Betrayal », « Making Me » ou bien le très headbangant « A Foot in Each Hell ». Le duo anglo-norvégien surprend avec un album ayant sa propre empreinte musicale, maîtrisé de bout en bout et d'une grande fluidité. De même, les nombreuses variations de rythme tiennent en haleine et ce malgré des titres aussi low tempo que brumeux tels « Dynamic Underworld » ou « Syndebukken » ˗ rayonnant d'une singulière aura grâce au chant en Norvégien. D'ailleurs force est de constater, avec le temps , que ce Deep Drone Master est des plus vicieux, usant de ses charmes et de ses effets afin de vous rendre complètement addict.
Une dépendance croissante qui serait beaucoup moindre sans la prestation vocale d' Aldrahn ˗ qui vaut à elle seule l'achat de cette œuvre ˗ effectuant un retour magistral avec The Deathtrip, variant avec une facilité déconcertante entre chant d'écorché vif et chant clair de dévot illuminé (tout comme IX d'Urfaust), avec un large spectre de tonalité et d'émotion. Les morceaux semblent prendre corps grâce à sa frénésie et son charisme, dégageant un sentiment de spontanéité, de violence crue, de démence mais aussi un côté assez tragique que l'on retrouve aussi énormément dans les premières œuvres de Dødheimsgard. Le Norvégien démontre sans forcer l'étendue de ses talents ˗ tant dans l'écriture de textes, aussi nébuleux que fouillés, que pour les vocaux ˗ surclassant bon nombre de chanteurs de la scène black metal et donnant à Deep Drone Master une toute autre dimension (Cf. Kark de Dødsengel).
Si vous étiez en manque de sorties old school, de black metal à la fois hypnotique et briseur de nuques, d'atmosphères tant horrifiantes que délétères cette version quelque peu dépoussiérée de la scène black norvégienne des 90's est assurément pour vous. The Deathtrip a placé la barre haute avec leur premier opus qui est sans contexte LA surprise de cette fin d'année. Vivement la prochaine livraison !
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