Nocternity - Onyx
Chronique
Nocternity Onyx (Rééd.)
Après l'annonce faite en ce début d'année du retour de Nocternity avec un nouvel opus à paraître en avril sur Iron Bonehead ainsi que la réédition tant attendue d'Onyx, sortie en 2014 via le label grec Kyrck Productions & Armour, il était grand temps de parler de cette formation. Créée à Athènes en 1997, celle-ci a été menée par Khal Drogo et Merkaal (Order of the Ebon Hand), duo qui sévira de 2001 avec une première réalisation, l'album ˗ passable ˗ En Oria, jusqu'en 2004 et l'EP de qualité A Fallen Unicorn. Puis Khal Drogo se retrouvera seul maître, ne sortant que des mini-albums ainsi que des splits qui se feront de plus en plus rares passée l'année 2005. Cependant notre homme continuera de s'entourer de musiciens et invités de marque pour ses diverses réalisations avec notamment Ravn Harjar Raumr (Strid) ou encore Whyrhd (ex-Lunar Aurora) ˗ pour ne citer qu'eux ˗ comme par le passé.
D'ailleurs trêve de bavardage et préparez-vous à retourner dans le passé, en 2003 pour être plus précise, afin d'entrer dans le vif du sujet car c'est de leur chef d’œuvre Onyx dont il est question ici. Après un premier album où la paire se dispersait dans tous les sens avec des synthés bien trop présents et symphokitsch ainsi qu'un manque de personnalité perceptible, ils avaient su se recentrer et redresser la barre avec Crucify Him, EP paru l'année suivante, posant l'identité du groupe en délivrant une musique encore plus abrasive et aux atmosphères prenantes (R.I.P. claviers). Nocternity va donc continuer dans cette voie, mélangeant toujours plus les nombreuses influences du groupe que ce soit sur le plan musical ˗ avec une grosse influence de la scène black metal norvégienne des 90's ˗ et extra musical ˗ le Moyen-Age et l'escrime médiévale, les mythes ainsi que la littérature, Game Of Thrones en tête de proue. Un travail d'alchimiste de longue haleine qui a permis au duo Khal Drogo/Merkaal de mettre en musique un univers à la fois fabuleux et tortueux, cristallisé sur leur second opus.
Onyx est une magnifique épopée qui vous fait traverser moult champs de bataille tapissés de corps ensanglantés que vous foulez du haut de votre monture. Une œuvre épique dont la cadence semble être menée par la batterie donnant le pas sur « Secreta Aura » avant de lancer l'assaut des troupes. Gionata Potenti (Acherontas, Deathrow, Frotmoon Eclipse ou encore le nouveau « super groupe » Martröð) délivre un jeu d'une incroyable justesse à la fois musclé mais varié illuminant les compositions de Nocternity ˗ mis à part sur « The Song of Hammer » où les fûts sont tenus par Awraun. Les passages rapides et rageurs prennent de l'ampleur et gagnent en efficacité, portés par des guitares des plus nerveuses et ce malgré les nombreuses baisses de régime. Un côté guerrier qui sera mis en relief par des samples bien placés comme sur le titre d'ouverture, de même certaines mélodies et sonorités couplées à des ambiances feutrées donnent un côté à la fois primitif et pagan à l'ensemble.
Toutefois celui-ci saura laisser sa place au légendaire, voire à l'imaginaire, grâce à des ambiances plus féeriques ainsi que des sonorités plus ensorcelantes notamment sur « Blood Of The Dragon » qui vous prend aux tripes durant plus de sept minutes par ses nombreuses envolées. Une véritable déclaration d'amour faite à Game of Thrones et à la Maison Targaryen dont en découlent moult sentiments tels l'espoir, le désir de conquête mais aussi la vengeance, parfaitement mis en musique par Khal Drogo et Merkaal. délivrant ici leur plus beau titre. Cet aspect très irréel est d'ailleurs renforcé par des atmosphères psychédéliques renvoyant à des formations telles Tartaros ou Manes ˗ jusqu'à l'album Under ein blodraud maane ˗ particulièrement sur le plus pachydermique « The Red Dawn » où s'élève, ici et là, tel un écho une voix grave et mécanique. Une seconde partie plus abstraite et embrumée qui se clôt par un instrumental « Schwarze Nacht » ˗ composé et joué par Christoph Ziegler (Vinterriket) ˗ tout en mystère et délicatesse.
Mais la production très rugueuse et raw vient contrebalancer cet onirisme emprunt de mélancolie renforçant au contraire la partie sombre et haineuse d'Onyx, très Burzum dans l'esprit. En effet ce dernier recèle de passages mid tempo tant entêtants que torturés ou viennent s’entremêler des ambiances froides et implacables ainsi que la voix très écorchée de Merkaal (comme sur « Secreta Aura »). Si beaucoup décrient le mastering ne mettant pas assez en relief les différentes ambiances, vous étouffant par la saturation et le grésillement, il donne justement une aura particulière à l'ensemble. De même celui-ci reflète la personnalité, l'image du groupe et sa volonté de rester à un black old school très cru et « intègre » malgré des nappes sonores plus éthérées, ne cherchant pas à arrondir les angles afin d'être apprécié par un plus grand nombre. Un point qui se vérifie encore par le choix des labels ainsi que la distribution de leurs sorties toujours limitées.
Nocternity délivre un second album sans concession aussi incisif que frustrant de part sa courte durée avec seulement 37 minutes au compteur. D'ailleurs cette réédition est agrémentée d'un titre bonus ˗ « The Iron Age » ˗ apparaissant sur le split avec les Allemands de Morrigan A Celtic / Hellenic Alliance paru en 2004, qui ne dénote en rien à la vue des ambiances travaillées mais qui est quelque peu affaibli par un chant grave assez rébarbatif et grossier. Vous l'aurez donc compris, Onyx n'en reste pas moins un magnifique objet tant dans le fond que dans la forme, avec un logo ainsi qu'une typographie réalisés par Christophe Szpajdel, que tout amateur et amatrice de musiques extrêmes se doit de connaître.
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