Deux ans seulement après l’excellent
Verses Of Fire, les parisiens de Temple Of Baal sont aujourd’hui de retour avec la sortie de leur cinquième album intitulé
Mysterium. Une créativité qui semble battre son plein dans le camp francilien et qui honnêtement me surprend quelque peu tant je ne m’attendais pas à voir revenir le groupe de sitôt, surtout après un
Verses Of Fire aussi dense et particulièrement bien fourni. Cela sans oublier que plusieurs de ses membres sont également impliqués dans divers autres projets tels que Conviction, Hell Militia, The Order Of Apollyon, Aosoth, Antaeus...
Mais ne crachons pas dans la soupe, surtout lorsque celle-ci est bonne. Pour cette nouvelle livraison, Temple Of Baal est naturellement resté chez les Polonais d’Agonia Records mais s’est adjoint pour l’occasion les services de David Fitt (Ataraxie, Decline Of The I, The Order Of Apollyon...) afin de réaliser l’artwork de
Mysterium. Retour à quelque chose de beaucoup plus sombre mais également un peu plus traditionnel là où le travail d’AAAAA-Atelier révélait une approche plus moderne, graphique et colorée. Ce nouvel album officialise également l’arrivée de Saroth (The Order Of Apollyon, Antaeus (live), Aosoth (live), Hell Militia (live)...) à la guitare suite au départ d’Alastor en 2013.
Quelques petites nouveautés mais rien de bien significatif en terme de contenu puisqu’on ne peut pas dire que Temple Of Baal ait opéré un quelconque changement de cap, offrant toujours un savoureux et intense mélange de Black Metal, de Thrash et de Death Metal.
Verses Of Fire étant au moment de sa sortie l’album du groupe le plus abouti, il y avait donc fort à parier que les parisiens enquilleraient logiquement sur le même modèle. Et force est de constater que rien n’a vraiment changé... Enfin presque car à y regarder de plus près, il semblerait que le groupe ait choisi de faire désormais l’impasse sur les titres les plus directs. Ainsi, pas de "Bloodangel" ou de "Golden Wings Of Azazel" puisqu’à l’exception de l’instrumental "Dictum Ignis" (1:31), aucun morceau de
Mysterium ne descend sous la barre des six minutes et vingt-neuf secondes. Un choix qui s’explique in fine par le soin particulier apporté à une atmosphère toujours aussi religieuse mais encore un peu plus profonde, et cela sur la base de ces éléments caractérisant déjà son prédécesseur.
Mysterium laisse ainsi éclater une ambiance de dévotion aussi saisissante que mystérieuse, donnant au titre de ce cinquième album tout son sens.
Rassurez-vous néanmoins car si Temple Of Baal ne propose pas ici de titres ultra incisifs expédiés en un peu plus de trois minutes, c’est davantage une question de forme plutôt qu’une question de fond. Car finalement, ces nouveaux morceaux sont tous plus ou moins construits sur le même schéma à savoir une alternance parfaitement équilibrée de séquences d’une rare vélocité et de passages bien plus mélodiques et/ou obscures. Temple Of Baal n’a donc aucunement levé le pied, il a simplement choisi d’allonger la durée de ses compositions pour développer encore davantage cette atmosphère de rituel à l’odeur de soufre. C’est alors avec le même plaisir non dissimulé que l’on pourra se délecter de ce Black/Death lumineux et épique dont j’ai arrêté de compter les nombreux moments de bravoure tant ils y en a sur ce disque. Car loin d’alléger son propos, les Parisiens font preuve une fois encore d’une force de frappe implacable, notamment grâce aux assauts d’un Skvm en très grande forme. Ses blasts fulgurants sont autant de poings dans le ventre qu’il faudra savoir encaisser durant ces cinquante-cinq minutes éprouvantes. Même punition du côté de Saroth et Amduscias dont les riffs noirs et pourtant éblouissants font vibrer ce feu intérieur qui habite la musique d’un Temple Of Baal au sommet de son art. Un art d’ailleurs sublimé par des leads et des solos tout simplement excellents. Ces derniers, que l’on retrouve sur presque chacun des huit titres, apportent une dimension épique aux compositions des Français tout en y insufflant, et c’est là la grande nouveauté de
Mysterium, un vent mélodique chargé d’une certaine mélancolie ("Lord Of Knowledge And Death" à 06:01, "Magna Gloria Tua" à 08:18, "Divine Scythe" à 04:50, "Black Redeeming Flame" à 03:53...). Là où
Verses Of Fire jouait avec l’intensité du feu durant plus d’une heure,
Mysterium tente une approche légèrement plus subtile mais peut-être plus pernicieuse et cela grâce à ces ambiances plus délicates et sous-terraines (alors que son prédécesseur se voulait plus "grandiloquent" avec ces quelques voix claires prophétiques), à la manière d’une messe noire faites de rituels obscures.
Et finalement lorsque le groupe calme le jeu à l’occasion de breaks ou de passages plus en retenue, l’intensité ne s’en trouve pas amoindrie pour autant, laissant l’auditeur alors à bout de souffle toujours sous le coup d’une certaine tension avant de reprendre finalement la charge quelques secondes ou minutes plus tard. Certaines séquences se font cependant plus introspectives et témoignent, comme évoqué un tout petit peu plus haut, d’un réel désir de communion, dans une atmosphère évidement toujours aussi solennelle.
Quant à la production signée une fois encore de la main d’Andrew Guillotin, celle-ci ne souffre d’aucun défaut particulier. Puissante et massive, elle sait pourtant rester naturelle (on notera ainsi de belles nuances entre les attaques de riffs et les nombreux solos, une caisse claire claquante mais pas trop, etc). Un atout indéniable pour un groupe soucieux de rendre son propos le plus authentique possible. Pour ma part, je saluerai également le grain apporté sur la basse d’Arkdaemon qui, lors de ces quelques passages où son instrument prend le dessus, laisse alors ces lourdes vibrations graves et saturées nous retourner les tripes.
Apparaissant lors de mes premières écoutes comme un simple copier/coller de l’excellent
Verses Of Fire,
Mysterium s’est finalement rapidement imposé comme un album bien plus abouti et évolué que je ne le pensais. Contre toute attente, Temple Of Baal a réussi le pari de rester le même tout en offrant à ses auditeurs un disque sensiblement différent de son prédécesseur. Moins frontal et pourtant toujours très radical,
Mysterium fait le pari de compositions encore un peu plus travaillées au relief bien plus prononcé. Un choix pour le moins convaincant tant cette nouvelle offrande transpire la passion, la sincérité et la dévotion par tous les pores de la peau. Noir, brutal et intense, ce cinquième album laisse pourtant apparaître un Temple Of Baal capable d’instaurer des atmosphères bien plus vaporeuses et inquiétantes que par le passée. Décidément, les groupes Français nous gâtent en cette fin d’année 2015.
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