Expression : Grincer des dents. Signification : Être en colère, gémir bruyamment. Origine : Expression française qui puise ses origines dans la bible pour montrer à la fois la douleur et la colère. L'évocation biblique rappelle la notion de pleurs et de grincements de dents.
Nul doute que nombreux sont ceux qui ont dû
grincer des dents à la découverte de
Sun, sixième album des Allemands de Secrets Of The Moon sorti le mois dernier chez Lupus Lounge. Pourtant, il fallait avoir le nez sacrément enfariné pour ne pas avoir flairé cette transformation qui, finalement, ne s’avère pas si surprenante que ça. Car il est clair, au moins depuis la sortie de
Privilegivm et surtout de
Seven Bells, que le groupe souhaitait explorer de nouveaux horizons, quitte à perdre évidement au passage une (grosse) partie de sa fanbase. Un parti pris risqué mais tout ce qu’il y a de plus compréhensible quand on sait que Secrets Of The Moon existe quand même depuis 1995. En tant qu’artiste, voudriez-vous faire la même musique pendant plus de vingt ans ? (Merci aux fans d’AC/DC de ne pas répondre à cette question). Bref, difficile de reprocher à sG et à sa (nouvelle) bande de ne pas se contenter d’offrir à son public ce à quoi il pouvait bêtement s’attendre. Car ce nouvel album s’inscrit dans une démarche artistique bien plus personnelle ayant pour but de se remettre en question voir même en difficulté. Une chose pas si facile, surtout pour un groupe de cette trempe. Un pari osé mais digne d’intérêt pour peu que l’on soit prêt à laisser tomber ses œillères.
Comme d’habitude avec Lupus Louge/Prophecy Records, ce nouvel album est disponible dans deux versions. Celle chroniquée ici-même et la version "deluxe" hors de prix (39€) comprenant six titres supplémentaires (cinq remixes et un inédit), un artwork revisité selon le format "artbook", une interview ainsi que quelques bonus complémentaires. Du bel ouvrage destiné essentiellement aux die-hard fans, ceux qui malgré le changement de cap resteront fidèles à l’entité germanique. J’évoquais également un peu plus haut un remaniement du personnel. Secrets Of The Moon a en effet vu l’arrivée dans ses rangs courant 2014 d’une nouvelle bassiste (Naamah Ash) et d’un nouveau batteur (Erebor - Thulcandra, ex-Nargaroth...). Rien de bien significatif malgré ce sang neuf puisque de toute façon, sG demeure l’le principal compositeur à ce jour (avec le soutient d'Ar.).
Que reste-t-il alors aujourd’hui du Black Metal de Secrets Of The Moon, celui de
Carved In Stigmata Wounds ou
Antithesis ? Et bien pour être tout à fait honnête avec vous, plus grand-chose d’un point de vue strictement musical. Le groupe a en effet abandonné l’essentiel de ce qui le caractérisait jusque-là pour revêtir de nouveaux atours, assumant ainsi complètement la tournure beaucoup plus Rock amorcée sur ses deux précédents albums. Quelques vestiges de ce passé subsistent néanmoins à l’image de ces courtes et très sporadiques séquences de batterie relativement plus soutenues ("No More Colours", "Dirty Black", "Mark Of Cain") ou bien encore de cette voix parfois plus rugueuse qu’emprunte Philipp Jonas ("No More Colours", "Mark Of Cain"). De même, malgré ce changement de cap, Secrets Of The Moon reste fidèle à ces atmosphères sombres et occultes qu’il a toujours développées avec énormément de réussite.
Sun n’échappe pas à cette règle et propose à l’auditeur un nouveau voyage dans les méandres de la pensée thélémite et occulte si chères à sG. Car malgré son intitulé (
Sun), ce nouvel album n’a rien d’un disque lumineux. D’ailleurs chaque titre nous ramène à cette obscurité aveuglante : "No More Colours", "Dirty Black", "Man Behind The Sun", "Hole", "Here Lies The Sun", "I Took The Sky Away". Une musique sombre et personnelle marquée, comme toujours, par un concept fort. Concept développé avec grand soin par un Philip Jonas dévoué et assidu.
Ce qui frappe ainsi d’emblée à l’écoute de
Sun, c’est la voix désormais beaucoup plus mélodique et "chantée" de sG. Comme je le mentionnais un peu plus haut, rares sont maintenant les passages où Philip Jonas opte pour un chant rugueux et écorché rappelant les origines Black Metal de la formation germanique. Ce changement vocal plutôt réussi et maîtrisé s’accompagne d’une musique toujours très sombre mais surtout beaucoup plus Rock, rappelant alors tour à tour des groupes tels que Tiamat (dans a période la plus récente), The Cure, Paradise Lost (post-
Draconian Times), Marylin Manson (oui, j’ose l’écrire), Fields Of The Nephilim ou bien encore Alice In Chains (très succinctement). Dark Rock, Dark Metal, Death Rock... ? Très honnêtement, je ne sais pas comment qualifier d’un attribut cette musique (d’ailleurs le faut-il vraiment ?). Toujours est-il qu’elle reste baignée d’une atmosphère occulte et gothique élégante et donc fatalement attirante en dépit de ces sonorités qui aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec la scène "Metal".
Car entre le choix de titres aux rythmes muselés (très peu d’accélérations), la place accrue accordée à cette guitare acoustique, ces nappes de synthétiseurs venues habiller de leurs voiles énigmatiques presque chacune de ces sept nouvelles compositions, ces mélodies envoûtantes et rugueuses, ces passages pop faisant presque taper du pied et cette voix faites d’envolées mélodiques on se rapproche très nettement avec
Sun de ces sonorités partagées par quelques-uns des groupes cités dans le paragraphe précédent. Difficile en effet de ne pas faire un parallèle avec la musique de Brian Hugh Warner lorsque l’on écoute un titre comme "Dirty Black", de ne pas penser au plus sombre de The Cure avec "Man Behind The Sun", de ne pas retrouver cette esthétique gothique propre aux Anglais de Paradise Lost sur des titres tels que "Man Behind The Sun" et surtout "Hole" ou encore de ne pas entendre un soupçon d’Alice In Chains sur ce refrain entêtant de l’excellent "I Took The Sky Away" et du solo qui en découle.
Un mélange d’influences et/ou de références pouvant paraître extrêmement bancale et indigeste mais naturellement servi de manière cohérente grâce à un talent d’écriture indiscutable. Car même si aujourd’hui Secrets Of The Moon va probablement devoir convaincre un nouveau public en même temps que reconquérir une partie de sa fanbase que l’on imagine aisément déçue par le chemin emprunté par Philip Jonas et ses acolytes, une chose demeure certaine : c’est la capacité du groupe à composer des titres solides et extrêmement riches, que ce soit lorsque le groupe faisait du Black Metal ou bien aujourd’hui, dans cette vision plus Rock et "accessible".
L’audace, si elle ne paie pas toujours, a néanmoins le mérite de bousculer ceux qui doivent y faire face. Nul doute que nombreux sont ceux qui ne s’attendaient pas à un tel résultat de la part des Allemands de Secrets Of The Moon et cela malgré ces quelques graines que le groupe avait déjà semé ici et là sur ses deux précédents albums. Nombreux seront ceux qui critiqueront cette démarche tout à fait personnelle mais sG n’en a que faire et vient nous rappeler au passage que ni Secrets Of The Moon ni aucun autre groupe d’ailleurs n’est la propriété de ses fans. Les nombreux déçus pourront ainsi passer leur chemin et laisser la place aux esprits plus ouverts ou tout simplement plus à même d’apprécier ce genre de Rock sombre et esthétique biberonné d’influences 80’s et 90’s en tout genre. Une franche réussite de la part d’un groupe capable de se réinventer sans craindre de s’exposer ouvertement aux plus vives critiques. Chose plutôt rare aujourd’hui.
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