Abbath - Abbath
Chronique
Abbath Abbath
TOP, Olve Eikemo de mon vrai nom, je suis né le 13 septembre 1973 à Bergen, Norvège, essentiellement réputé pour mon maquillage hommage à Kiss, mes postures scéniques des plus loufoques, je suis surtout connu pour avoir été le bassiste, chanteur et guitariste d'Immortal. Ayant pris les commandes du combo après la défection de mon camarade Demonaz, je cherche depuis quelques années à retrouver ma gloire d'antan et je suis de retour en 2016 pour présenter mon projet solo éponyme, je suis, je suis ???
Abbath, que vous aurez évidemment tous reconnu au travers de ce descriptif hommage à Julien Lepers. Quoiqu'on puisse en penser sur le plan musical, je dois bien avouer que le bonhomme est immédiatement reconnaissable et qu'il est petit à petit amené à devenir une légende vivante du Black Metal. Étant un amateur des premiers disques d'Immortal et ayant par la même occasion gardé une sympathie non-feinte pour Abbath, sa gouaille, sa bonne humeur, son auto-dérision et sa bonhomie, je savais que j'irais jeter un œil discret mais aiguisé sur ce projet qui n'est cependant pas vraiment la première escapade hors-Immortal d'Abbath puisqu'il avait déjà monté un groupe annexe intitulé « I ». Oui, oui, rappelez vous, le truc jaune et noir là, avec des morceaux chiants dessus. Et ben voilà, c'était lui...
Vous avez sûrement déjà du poser une oreille sur ce nouveau trio composé du chanteur-guitariste emblématique, de King Ov Hell (ex-Gorgoroth, ex-God Seed, Ov Hell et aussi... I) ainsi que de Kévin Foley, batteur français officiant dans Benighted et qu'il est plutôt étrange de retrouver ici, assurant les parties rythmiques sous le pseudonyme ô combien ludique de « Créature ». On va tout de même remémorer à votre bon souvenir que ce groupe a été monté l'année dernière, suite au split d'Immortal et qu'il a déjà publié quelques morceaux et assuré quelques dates, notamment au Fall Of Summer Festival parisien. On se demandait donc si Abbath Doom Occulta allait réussir à faire mieux que son ex-meilleur-copain Demonaz qui nous avait gratifié d'un « March of The Norse » franchement mauvais.
D'office la réponse est non. Cette première sortie éponyme pour le guitariste à la marche de crabe est clairement un échec artistique assez flagrant. Et croyez-moi bien qu'il y a des choses à dire, tellement que je ne sais pas vraiment par ou commencer. Peut-être déjà par cette pochette qui, certes, assume le côté cent pour cent blague d'Abbath mais qui – en plus d'être franchement laide – nous laisse un sale goût d'opportunisme surfant sur l'image vendeuse du papa du Black Norvégien. Une impression de facilité en quelque sorte qui n'est pas prête de nous quitter à l'écoute de ces huit pièces décidément bien usinées mais qui semblent toutes provenir du même moule... Un Black Metal absolument identifiable (et d'ailleurs identifié dès le premier riff de « To War ! » ouvrant l'album) mais comme amputé de passion, d'émotions et de caractère.
Ou sont passés les paysages glacés si chers au combo qu'on visualisait en lisant « La Nuit Des Temps », ou sont ces guitares acérées qui déchiraient le ciel noir, ou est cet Abbath presque incantatoire qui ponctuait avec punch chaque nouveau riff tranchant, ou est le froid mordant, ou est le mysticisme des guitares claires de « Solarfall » ? Tout ça, vous pouvez oublier. Ce premier jet éponyme est direct, court et presque Thrash. Il ne comporte d'ailleurs que quelques passages mélodiques ou risqués (on citera le final de « Winterbane » qui est de loin le meilleur moment du disque notamment grâce à la basse) qui nous permettent de relever un peu le nez. Les tentatives de variations sont d'ailleurs franchement vaines, notamment sur les fameux arpèges en clean qui – s'ils sont toujours présents – semblent étouffés et bien peu inspirés. On va toucher un mot de « Ashes Of The Damned » pour son grand n'importe quoi et ses trompettes en format MIDI totalement ridicules. Ce qui est cela dit plutôt dommage, car si elles avaient utilisés autrement, on aurait pu y voir une réminiscence de Sigh.
La production est donc le choix le plus couillu sur « Abbath » puisqu'elle a le mérite de sortir un peu des sentiers battus en proposant un rendu très Garage et organique qui vise probablement à accentuer le peu d'impact des compositions. Pour le reste, c'est une avalanche de morceaux format « One By One », tous repris et déclinés sous la même forme, celle des quatre minutes et cinquante secondes de banane régulières, découpées et bien calibrées pour nous dire « Regardez comme c'est du Abbath, admirez comme c'est facile à reconnaître ». Encore une fois, seule « Winterbane » sort un poil du lot avec une structure plus audacieuse, plus personnelle et frisant l'expérimentation sur son final qui est le seul instant ayant suscité chez moi une demi-seconde d'intérêt.
Alors bien sûr, ce n'est pas « mauvais » au sens propre du terme, Abbath sait jouer et les autres musiciens prouvent qu'ils ont le niveau technique pour faire le job, seulement, je ne peux m'empêcher d'éprouver une certaine tristesse lorsque j'entends ce bon vieux Olve déclamer sans grande envie ses paroles sur des pistes aussi enneigées que celles de La Bresse en plein mois d'Août. Voilà donc un disque qui saura sûrement faire le boulot en live (c'est tellement simpliste qu'on devrait avoir son lot de Pogos et de Jump, Jump dans tous les festivals de l'été) mais qui est si générique qu'il peinera à attirer l'oreille de l'amateur.
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