On avait quitté Full Of Hell en 2019 avec
"Weeping Choir", première incursion de la jeune formation dans des sphères presque
mainstream grâce à leur signature chez l'institution Relapse Records. Une sortie qui m'avait laissé passablement tiède. Pas foncièrement mauvaise, en soi... Juste mal décongelée. Pas vraiment digne des précédentes sorties du combo, des débuts très typés
street jusqu'à leurs hybridations malsaines, entre Harsh Noise inhumaine et Grindcore décapant, sommet atteint, à mon sens, sur leurs ambitieuses collaboration avec Merzbow et leurs potes de The Body (
"One Day You Will Ache Like I Ache", terrifiant) . Bref, rien qui ne me laissait particulièrement optimiste quant aux prochaines sorties de la bande.
Vint la pandémie, les confinements successifs, les annulations de tournées en cascade, les drames personnels. Full Of Hell se retrouve enfermé, condamné à charbonner, mettre toute sa frustration de ne pouvoir donner vie à ses titres face à un public, dans la création. Pas moins de six sorties en un peu plus d'un an, plus ou moins confidentielles. Un
repress de leurs deux premiers albums avec nouvel artwork signé Brian Uhl, un single pour Adult Swim, une collaboration (très dispensable) avec le groupe de Noise Rock Health, deux EPs de Noise (chiants comme la pluie), et un enregistrement live capturé à Philadelphie. On s'occupe comme on peut... Une hyperactivité également mise à contribution dans la composition et l'enregistrement de ce nouvel opus,
"Garden of Burning Apparitions", trente-neuvième sortie, cinquième longue-durée de Full Of Hell, capturé et produit au Machines With Magnets par Seth Manchester.
Ben non, y'a plus Kurt Ballou. Et ça s'entend... Un choix de production pour le moins déconcertant, très étouffée, qui semble maintenir la tête du spectre sonore sous l'eau, plombant certaines envolées qui auraient pu être ultimes si on ne leur avait pas coupé les pattes en pleine foulée. Il n'y a d'ailleurs pas que le son qui pèche. Les écoutes successives de
"Garden of Burning Apparitions" grattent une couche de vernis qui s'écaille par endroits. Une pochette de merde, déjà, pourtant pondue par Mark McCoy, responsable des
artworks des deux précédentes sorties. Ne jamais juger un disque sur sa couverture, certes, mais pour un premier contact, ça la fout mal... Et toujours ce syndrome du remplissage, avec ces deux interludes purement Noise, "Derelict Satellite" et "Non-Atomsim", qui brisent la dynamique de l'album. Je n'ai pas de problème avec la Noise, bien au contraire. Mais sur vingt petites minutes (c'est le plus court album du groupe), en consacrer près de cinq à des bruits de machine à laver ne me semble pas forcément très judicieux.
Bon, j'avoue, je suis sévère, cherchant la petite bête. Tout n'est pas à jeter sur cette dernière sortie, bien au contraire. C'est même un très bon disque, qui comporte d'indéniables instants de bravoure... Et de violence complètement gratuite. Dylan, Spencer, Dave et Sam semblent avoir retrouvé de la hargne, et une sacrée dalle. La scène leur a manqué, et ça se sent. Le chant n'est plus hurlé, il est glapi, hystérique, confit dans la haine. Le duo de cordes vocales Dylan Walker / Sam DiGristine est d'ailleurs impérial, complémentaire, terrifiant. La batterie ne se contente plus du
blast : Dave Bland détruit littéralement ses fûts, tout en roulements tonitruants et en cymbales qui douchent, ajoutant à cette impression de bordel ambiant - On se régale. L'écriture s'est enrichie, approfondie, sonne bien moins comme un patchwork dépareillé que sur leur précédent méfait : "Reeking Tunnels", au groove irrésistible, qui sonne plus Relapse que les groupes Relapse eux-mêmes.; les branlées à coupe le souffle que sont "Urchin Thrones" ou "Eroding Shell", avoinant non-stop... Spencer sait toujours tailler des riffs vicelards, qui font plus que jamais briller certains titres, de "All Ringing Bells" jusqu'à l'étourdissante conclusion "Celestial Hierarch".
"Garden of Burning Apparitions" arrose sec, une agressivité d'animal sauvage acculé, montrant les crocs, bave aux babines.
Bref, malgré sa tronche en biais que seule une mère pourrait aimer,
"Garden of Burning Apparitions" m'a fait retrouver le sourire. Un peu timide, mais sourire malgré tout. Parce qu'au milieu de ce son approximatif et de quelques tournures un peu lourdingues, cette nouvelle livraison sous l'égide de Relapse Records comporte parmi les meilleurs morceaux de la formation ricaine. Rien que ça. Je n'y croyais plus, et le groupe s'est fait le plaisir de m'administrer un petit
steak aussi sec qu'humiliant derrière la nuque.
En résumé ? Les papilles sont ravies par certains morceaux de choix, mais on sort de table assez frustré. Indéniablement,
"Garden of Burning Apparitions" est bien meilleur que son grand frère. L'urgence est présente, la frustration explose en un déchaînement de violence qui laisse véritablement sur le carreau. Seules ombres au tableau : les flagrants-délits de remplissage de ces interludes inutiles, certains titres un peu plus dispensables que d'autres (sans parler du saxophon-plante-verte, pour la caution expérimentale), et surtout, cette production qui semble chercher à étouffer le brasier plutôt qu'à l'aviver. Néanmoins, je ne peux pas bouder mon plaisir ni donner dans la mauvaise foi : quel plaisir de retrouver un Full Of Hell en forme, nerveux comme de coutume ! Gageons que Dylan Walker et ses comparses sauront jouer l'épure sur leurs prochaines sorties, à engager un sondier compétent, afin de nous proposer un disque sans défaut. Ambitieux ? Non. Ils en sont parfaitement capables, preuve en est !
"Garden of Burning Apparitions" marque l'essai. Plus qu'à le transformer.
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