Avmakt - Satanic Inversion Of....
Chronique
Avmakt Satanic Inversion Of....
Le nom d’Avmakt ne vous dit peut-être rien mais les deux garçons qui se cachent derrière cette mystérieuse entité sont de ceux qui n’ont pourtant plus rien à prouver aujourd’hui. Formé en 2020 dans le village de Tårnåsen situé dans la périphérie de Kolbotn, le groupe est en fait la réunion de Christoffer Bråthen (Black Magic, Flight, Gouge, Obliteration (live), ex-Condor, ex-Mion’s Hill...) et Kristian Valbo (Black Magic, Dødskvad, Obliteration, Saprophage, Aura Noir (live)...). Deux Norvégiens que l’on connait bien ici sur Thrashocore et qui nous ont effectivement prouvé par le passé que l’on pouvait toujours compter sur eux quel que soit le genre pratiqué (Death Metal, Thrash, Hard Rock, Heavy Metal et j’en passe...).
Avec Avmakt, le duo a souhaité rendre hommage à ses compatriotes de Darkthrone et plus généralement à cette seconde vague norvégienne ayant défrayé la chronique au début des années 90. Un postulat de base qui laisse évidemment entendre que ce n’est pas sur eux qu’il faudra compter pour chambouler quoi que ce soit mais un postulat qui étant donné leurs curriculum-vitae laisse néanmoins supposer que l’on devrait y prendre suffisamment de plaisir pour que cette notion d’originalité soit une fois de plus reléguée au second plan...
Si avec leur première démonstration auto-produite parue en décembre 2021 les deux Norvégiens n’ont pas forcément fait grand bruit (même si Fenriz n’a pas manqué d’en vanter les mérites), ces derniers n’en n’ont pas moins conservé toute leur motivation. Travaillant dans l’ombre, les deux garçons ont naturellement poursuivi leurs efforts afin d’arriver la semaine dernière à la sortie de ce premier album intitulé Satanic Inversion Of.... sous les couleurs du label anglais Peaceville Records. Eh oui, rien que ça.
Bénéficiant d’une illustration qu’à titre personnel je trouve particulièrement chouette grâce en grande partie à l’usage de ces couleurs violacées, de ces lignes grises et cryptiques et de ce logo tout aussi abscons, ce premier album est composé de seulement six titres (parmi lesquels "Sharpening Blades Of Cynicism" et "Rowing Oblivion" tous les deux repris de cette première démo de 2021) pour une durée d’approximativement quarante-cinq minutes. Mais cette illustration, aussi engageante soit-elle, n’est pas le seul atout de ce premier album qui une fois la touche "play" effleurée se dévoile à travers une production particulièrement réjouissante. En effet, on va notamment retrouver ce son de guitare décharné et hyper abrasif caractéristique des premiers albums estampillés "Black Metal" de Darkthrone. Une production dépouillée et viscérale (malgré quelques atours plus modernes) qui laisse dès lors très peu de doutes quant aux intentions de la formation.
Naturellement, cette production n’est pas le seul parallèle qui convient d’être fait entre la musique des maitres norvégiens et celle d’Avmakt. Entre ce riffing particulièrement sinistre et malveillant, ces accélérations sauvages et entêtantes menées le couteau entre les dents, ces cassures et autres ralentissements particulièrement réjouissants, ce chant pour le moins vicieux et enfin ces atmosphères glacées et occultes, il faudrait quand même être de très mauvaise foi pour ne pas voir ni entendre l’affiliation entre les deux formations norvégiennes puisque, soyons clairs, celle-ci saute aux yeux et surtout aux oreilles.
À travers cet hommage non feint, Avmakt va concilier quelques-uns des différents visages de Darkthrone exprimés durant sa longue carrière. Si le riffing incisif et famélique, les nombreuses accélérations particulièrement hypnotiques et les breaks et autres cassures rappelant l’esprit Punk / Thrash des premières sorties de Hellhammer et Celtic Frost évoquent bien évidemment les albums les plus emblématiques de la formation, d’autres séquences beaucoup plus lourdes et pesantes font quant à elles échos aux sonorités et autres digressions Doom des dernières saillies de Darkthrone. Un mélange qui fonctionne ici extrêmement bien dans la mesure où la balance penche majoritairement en faveur de ces coups de boutoirs et autres démonstrations de force et que ces passages plus pesants sont finalement beaucoup moins nombreux et ne servent qu’à apporter ce qu’il faut de contraste et de nuance à un album caractérisé, on l’a vu, par une approche tout ce qu’il y a de plus classique.
Malgré ce parti-pris limité qui consiste à calquer (au moins dans les grandes lignes) sa musique sur celle d’un groupe dont la réputation et la portée ne sont certainement plus à prouver, Avmakt réussit à ne pas sombrer dans la pure copie grâce à des compositions au long cours marquées de manière plus ou moins significative par la variété de leurs intentions dynamiques. Un titre comme "Sharpening Blades Of Cynicism" voit ainsi se succéder pendant plus de dix minutes séquences mid-tempo entêtantes sur lesquelles l’auditeur se laissera aller à dodeliner gentiment de la tête, accélérations tranquilles sur fond de semi-blasts, passages beaucoup plus sauvages et intenses et finalement tirades plombées pour une conclusion des plus sinistres. Si l’ordre et le dosage ne sont pas forcément les mêmes, on va retrouver sur les cinq autres morceaux de ce premier album les mêmes ingrédients dispensés là encore avec beaucoup de justesse afin de mener à un résultat final que l’on sait effectivement sans surprise mais qui n’en demeure pas moins particulièrement convaincant.
Groupe composé de musiciens talentueux, Avmakt ne pouvait décemment pas décevoir avec ce premier album. Certains trouveront probablement l’hommage beaucoup trop marqué pour être véritablement intéressant mais en ce qui me concerne je ne suis pas du tout de cet avis. En effet, Satanic Inversion Of.... s’impose comme une relecture fidèle de ce que le Black Metal norvégien était au début des années 90. Un disque sombre, dangereux et malfaisant capable de susciter terreur et excitation grâce à des compositions menées d’une main de maître où vont se mêler riffs froids et décharnés, assauts d’une intensité remarquable, passages Punk particulièrement réjouissants et moments beaucoup plus lourds et pesants. Bref, Avmakt n’a effectivement rien inventé mais si vous êtes de ceux qui vouent un culte aux premiers albums de Darkthrone (et par extension à ceux de Katharsis), Satanic Inversion Of.... devrait alors figurer sur vos listes d’écoutes puisqu’au-delà de la simple question de l’originalité, ce premier jet longue-durée est une fois de plus la preuve que les deux Norvégiens sont d’excellents compositeurs à qui tout réussit.
| AxGxB 4 Septembre 2024 - 595 lectures |
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