Lorsqu'on cause EXODUS, la première référence qui vient à l'esprit a pour nom
« Bonded By Blood » (ceux qui ont eu l'outrecuidance de citer un célèbre rasta mort ont d'ores et déjà péri d'une balle dans la nuque), suivie de près par
« Fabulous Disaster », autre album bien garni en classiques toujours ultra efficaces sur scène (le title track, « The Toxic Waltz » et l'inoxydable « The Last Act Of Defiance »). Sur le podium des productions les plus populaires de la bande à Gary Holt, on placera également le très bon
« Tempo Of The Damned » sorti en 2004, dernier skeud avec Zetro avant deux opus suivants de qualité variable. Mais si le lourdingue
« Force Of Habit » mérite qu'on le passe sous silence, quid de « Pleasures Of The Flesh », deuxième full length des américains et premier avec Steve Souza derrière le micro?
Et bien vu la grande qualité des titres réunis sur cette galette, il est surprenant qu'on n'ait retenu de « Pleasures » que le mid tempo « Brain Dead », la speedée « Seeds Of Hate » (deux des meilleurs morceaux, ok) et, dans une moindre mesure, la chanson titre, soit les trois extraits sur lesquels Paul Baloff est crédité. Car avec un titre introductif aussi féroce que « Deranged », EXODUS lance sa seconde offensive thrash sur des bases sensiblement plus élevées, techniques et matures que sur un
« Bonded By Blood » beaucoup plus direct dans l'approche, mais aussi plus primitif dans la réalisation. C'est sans doute ce qui vaut à cet album un certain manque de reconnaissance, Holt et consorts ayant le malheur de ralentir le tempo dès la piste 2 avec une « 'Til Death Do Us Part » à la mollesse rédhibitoire. C'est, avec la joute finale un peu vaine de « Choose Your Weapon », très
« Bonded By Blood » dans l'esprit, l'un des rares temps faibles d'un effort studio qui voit l'arrivée de l'ex-LEGACY -
combo appelé à devenir le TESTAMENT que tout le monde connaît, Zetro ayant introduit lui même son successeur Chuck Billy auprès de ses compagnons d'armes - Steve « Zetro » Souza, en remplacement d'un Paul Baloff lourdé pour, au choix, abus de substances illicites ou incompatibilité d'humeur avec les autres membres du groupe. Evidemment, en 1986, j'étais encore un peu tendre pour aller vérifier l'efficacité du frontman Baloff sur les planches (c'est tout juste si je sifflotais « Jump » et « The Final Countdown » dans la cour de récré) mais pour ce qui est du studio, on y gagne largement avec une des voix les plus singulières du thrash, à mi chemin entre Bon Scott (dois-je vraiment citer un célèbre groupe de hard rock australien?) et Bobby « Blitz » Ellsworth (OVERKILL). J'ai assez fait l'éloge d'un de mes chanteurs préférés dans ma chronique du « Sovereign » de TENET donc je n'en rajouterai pas une couche, mais sachez juste que l'abattage de Zetro a permis à EXODUS de ne pas se limiter à du fast track de trois minutes façon « Piranha » et d'étendre son champ d'action thrash aux frontières du rock, voire du progressif (cf la lancinante « Architect Of Pain » sur
"Force Of Habit").
Mais revenons à nos chèvres ensanglantées sacrifiées sur l'autel du riff qui tâche, les guitares de « Deranged » ayant suffisament de tranchant pour faire plus de dégâts sur un cheptel qu'une horde de loups affamés surgie du fin fond du mercantour. Inaugurant une tradition un rien irritante amenée à se poursuivre jusqu'à
« Impact Is Imminent » (soit une intro inutile d'une longue minute là on on aimerais que le groupe lâche les chiens sans attendre), « Deranged » n'a pas grand chose à envier à « The Last Act Of Defiance » si ce n'est un meilleur son, la paire de solistes Gary Holt/Rick Hunolt franchissant ici un nouveau cap d'excellence dans la virtuosité, la complémentarité et la vitesse d'exécution. Couplé à la performance
high voltage d'un Souza branché sur très haut débit, le tandem de guitaristes forme avec leur nouveau gueulard le noyau dur d'un « Pleasures Of The Flesh » pêchant essentiellement sur le plan rythmique (quelqu'un a-t-il déjà entendu les parties du bassiste Rob McKillop?). Steve Souza mis à part, EXODUS partage d'ailleurs un autre point commun avec TESTAMENT : un batteur pas toujours à son aise, y compris sur les parties rapides caractéristiques du genre. Un décalage d'autant plus regrettable vu le caractère mémorable de la plupart des riffs (« Parasite », « Faster Than You'll Ever Live To Be », « Seeds Of Hate »), lesquels auraient gagné à être soutenus par une section rythmique plus costaude. Le tracklisting un peu aventureux, s'il ne permet pas à EXODUS de conserver le même degré d'intensité que sur
« Bonded By Blood », deviendra au fil du temps une tare récurrente chez les américains, l'encensé
« Fabulous Disaster » n'échappant pas non plus à la règle. Capables du meilleur comme du pire, enchaînant parfois les morceaux au mépris de toute logique (ici un mid tempo fadasse en piste 2 donc, suivi d'un title track riche en trouvailles mais bien trop long, puis le flamenco incongru de « 30 Seconds »). Ceci étant posé, « Pleasures Of The Flesh » comporte suffisament de morceaux de bravoure pour justifier son acquisition ; entre le saucissonage rythmique d'une « Parasite » redoutable dans le rôle du challenger officiel de « Piranha », le groove de « Brain Dead » (plus basique et efficace tu meurs) et les somptueux arpèges de « Chemi-Kill », la tempête de leads sur une « Faster Than You 'll Ever Live To Be » qui manque d'emporter un Tom Hunting dépassé par la fougue de ses partenaires de jeu et les solis ahurissants de la géniale « Seeds Of Hate », il y a largement de quoi faire malgré les défauts énoncés ci dessus. L'album ayant été remasterisé il y a peu aux côtés de « Bonded » et « Fabulous », on vous conseillera cette
limited silver edition, la prod maigrichonne d'époque signée Marc Senasac accusant franchement le poids des ans. Un deuxième effort studio dont le tort principal est de s'intercaler entre deux classiques, mais qui figure tout de même parmi les meilleures productions du groupe.
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28/04/2021 14:44
08/08/2013 02:06
25/11/2009 18:36