A l'heure où EXODUS est redevenu au fil des ans un véritable actif de la scène thrash nord américaine –
avec désormais autant de productions récentes à son crédit que lors de sa plus significative première partie de carrière – on mesure un peu mieux le chemin parcouru par le groupe depuis son come back album paru en 2004, le « Tempo Of The Damned » qui nous occupe ici. Et si les oreilles les plus sales de l'assistance auront du mal à faire la différence entre
« Shovel Headed Kill Machine » et les « Exhibit » A & B, « Tempo » lui, se détache clairement de ses successeurs par son côté old school revendiqué, que ce soit au niveau du chant assuré une dernière fois par Zetro ou par la structure des compositions, bien plus directes que celles à tiroir du dernier album en date. Absent des débats dans les années 90 ou presque (on n'oubliera pas l'excellent live sorti en 1997 chez Century Media, « Another Lesson In Violence », qui revisitait avec une pêche d'enfer les deux premiers full lengths avec Paul Baloff), EXODUS repart donc au front armé de son line-up historique, Jack Gibson (VILE), déjà présent sept ans en arrière et faisant rapidement oublier, si besoin était, les lointains Rob McKillop et Mike Butler.
Mais l'essentiel est là et bien là, la H-Team composée par le duo Holt/Hunolt, quand bien même Gary s'est coltiné l'intégralité du processus de composition sur ce sixième album. Car quand on cause EXODUS, on cause forcément guitares fusionnelles et solis enlacés tels deux êtres inséparables (qui a dit
« Bonded By Blood » ?) unis pour la cause d'un thrash de qualité supérieure. A de nombreuses reprises sur « Tempo », on retrouve donc cette alchimie toute particulière entre interventions lead chaotiques (Holt) et caresses heavy plus traditionnelles (Hunolt) comme sur l'excellent break de « Shroud Of Urine », titre mineur bonifié par ce superbe passage mélodique devenu denrée rare depuis l'arrivée de Lee Altus au poste de second. On perd donc en force brute et en intensité ce qu'on gagne en feeling et en finesse, même si le guitariste de HEATHEN reste bien évidemment un grand technicien de la six cordes.
« Bonded By Blood » étant bien loin désormais (1985 !) et les deux skeuds précédents n'ayant pas fait l'unanimité, il n'est pas surprenant que Gary Holt se soit tourné vers le deuxième album préféré de sa fan base pour relancer la machine : en résulte une copie quasi carbone de
« Fabulous Disaster », la production béton d'Andy Sneap et l'expérience des musiciens en plus, notamment en ce qui concerne le jeu de batterie de Tom Hunting, bien moins bancal que par le passé. Meilleur son et interprétation plus carrée, quoique plus assagie (même Souza n'en fait pas trop derrière le micro, c'est dire) pour une construction similaire, le trio « Scar Spangled Banner/War Is My Shepherd/Blacklist » faisant directement écho à la triplette « The Last Act Of Defiance/Fabulous Disaster/The Toxic Waltz ». Soit deux fast tracks aussi redoutables qu'incisifs suivis par un titre plus lourd (et c'est rien de le dire !) ou le mid tempo brise nuque reprend ses droits, « Blacklist » étant probablement ce que EXODUS a fait de plus efficace dans ce registre. Le meilleur de « Tempo » et de loin avec le pendant progressif de « Like Father, Like Son », une « Forward March » dont la montée en puissance débouchant sur un break éruptif à souhait reste un modèle du genre. Difficile d'enchaîner après pareille démonstration de force (c'est le pic qualitatif de l'album) mais un cran en dessous, l'entêtante « Culling The Herd » cultive les même qualités que « Shroud Of Urine » avec une fois de plus des solis impeccables avant que « Throwing Down » (issue d'une démo d'un projet mort né mené par Gary durant la mise en sommeil d'EXODUS, si j'ai bonne mémoire) ne surprenne par son côté joyeusement groovy, presque enjoué ! Au rayon fonds de tiroir appréciables, c'est au tour de l'ancestrale « Impaler » d'avoir le droit à sa version studio après que Kirk Hammett en ait recyclé une partie pour les besoin de « Trapped Under Ice », avant de voir une fois de plus les américains se frotter au répertoire des frères Young (« Dirty Deeds Done Dirt Cheap », toujours plus supportable que la pénible « Overdose »). Un title track sauvage comme on aimerait en entendre plus souvent (et d'une durée raisonnable de 4 :21) se charge de conclure « Tempo » sur une note plus agressive qui met en lumière une légère carence brutale à mi parcours, surtout au regard des pugilesques
« Shovel Headed Kill Machine » et « Exhibit B : The Human Condition » à venir.
Comme
« Fabulous Disaster » en son temps, « Tempo Of The Damned » est un peu inégal par moments, surtout dans sa deuxième partie dont l'aspect un peu fourre tout ne permet pas de dégager une ligne directrice claire. Un vice de fabrication qui n'altère en rien le plaisir d'écoute pour un retour réussi qui fait parfaitement le lien entre le EXODUS classique du début de carrière et une formation plus aventureuse repoussant encore et toujours les limites structurelles du thrash sur leur très ambitieuse dernière galette.
3 COMMENTAIRE(S)
02/01/2018 13:48
21/02/2017 13:52
01/07/2010 18:55