En 15 ans, l'image du révérend aura bien changé. Icone du mauvais goût, de la provocation, de l'anti-religion, ... Dans le milieu des années 90, Marilyn Manson savait faire parler de lui et a entrainé dans son sillage une tranche non négligeable de la jeunesse de l'époque. Aujourd'hui, le constat est bien différent. Moins hargneux, moins subversif, l'homme s'est recroquevillé sur lui-même et a abandonné son metal industriel pour s'adonner à un rock plus intimiste avec le prometteur
"Eat Me, Drink Me" qui a sans doute divisé les rangs des ses fans. Alors quand sonne l'arrivée de ce septième album au plan marketing bien huilé annonçant un retour aux sources, on reste plus sceptique qu'enthousiaste, malheureusement à juste titre.
"The High End Of Low" portait pourtant des raisons d'espérer quelque chose d'intéressant avec l'éjection de Tim Skold et le surprenant retour du principal compositeur de l'âge d'or du groupe, Twiggy Ramirez. Mais ce nouvel album n'est en rien le prolongement d'un
"Holy Wood" ou d'un
"Mechanical Animals". Bien au contraire, Manson confirme le changement de direction musicale opéré 2 ans plus tôt et nous propose ici un album tout ce qu'il y a de plus rock, aussi direct et efficace qu'éloigné de la violence et des ambiances des précédentes productions. Si
"Eat Me, Drink Me" s'apparentait à une véritable thérapie personnelle, l'homme semble avoir définitivement fermé cette porte ouverte sur sa personnalité et ses sentiments. "The High End Of Low" se révèle donc moins profond et porté sur les émotions, distillant une musique qui s'aventure très rarement en dessous de la surface, plus divertissante que marquante. Même s'il ne nous aura pas ramené 10 ans en arrière, Twiggy marque cet album de sa patte, lui donnant parfois des airs de déjà-vu que l'on n'avait pas entendu depuis bien longtemps (le "Running to the Edge of the World" presque tiré de
"Holy Wood", "Arma-Goddamn-Motherfuckin-Geddon" qui n'aurait pas fait tâche sur
"Mechanical Animals", ...) et redonne une nouvelle dignité à la basse dans les compositions. Par contre, les rafraichissants solos qui avaient fait irruption dans le précédent album ont quasiment disparu et la majeure partie des compositions revient à un schéma reposant quasi-uniquement sur le chant, là où le précédent album laissait un peu de place aux guitares.
Difficile de décrire d'une manière globale ce "The High End Of Low" tant il est hétérogène, aussi bien en terme de musique que de qualité. Alors que
"Eat Me, Drink Me" était grossièrement partagé entre gravité et paillettes, chaque titre ici possède sa propre identité, de la lente introduction "Devour" (qui ne sera pas sans vous rappeler l'excellente "If I Was Your Vampire") au groovy "Leave A Scar" et au percutant "Arma-Goddamn-Motherfuckin-Geddon", en passant par les bluesy "Blank and White" et "Four Rusted Horses", les ballades "Running to the Edge of the World" et "Into The Fire" ou encore les expérimentales "WOW" et "I Want To Kill You Like They Do In The Movies". C'est à se demander si notre révérend n'est pas en pleine recherche d'identité. Malheureusement, les compositions vont du bon au très moyen (pour ne pas dire mauvais) et peu d'entre-elles marquent l'esprit. Comment ne pas rester perplexe face à des titres aussi peu passionnants que "Blank And White" et "Running To The Edge Of The World", voire soporifique comme "I Want To Kill You Like They Do In The Movies" ? Et que dire du lourdingue "WOW" ? La fin de l'album présente pour moi le meilleur visage de cette cuvée 2009 avec des morceaux tel que "I Have To Look Up Just To See Hell", "Wight Spider" ou encore "Into The Fire".
Après tout, quel album du révérend ne possède aucun titre en dessous du reste me direz-vous ? En fait, le problème n'est pas tant le manque de goût d'une petite partie de l'ensemble (car cela reste finalement assez marginal) mais plutôt l'absence d'atmosphère qui lui fait défaut. Contrairement à tous les autres albums du groupe, "The High End Of Low" est le premier à n'avoir aucune cohérence, s'apparentant à un patchwork anarchique, une série de chansons sans lien mises bout à bout pour remplir 72 minutes de musique. Il faut également reconnaître que Manson n'a plus le même talent pour composer des pièces aussi efficaces et entêtantes qu'il y a 10 ans. Alors abandonner le rock lourd et plaintif qui faisait le charme de
"Eat Me, Drink Me" pour revenir à un rock alternatif plus direct où rien ne ressort, aboutit tout simplement à la plus mauvaise chose que les américains aient pu produire pour moi.
De tous temps, la démarche artistique de Marilyn Manson a été complexe et je n'ai jamais eu la prétention d'en connaître tous les tenants et aboutissants. Toutefois, jusqu'à présent, j'ai à peu près toujours saisi où il voulait en venir. "The High End Of Low" reste pour moi un mystère, une oeuvre soit trop alambiqué pour ma petite sensibilité musicale, soit juste peu inspirée. En tous cas, le verdict est pour moi sans appel : décevant.
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