Mihai Edrisch - Un jour sans lendemain
Chronique
Mihai Edrisch Un jour sans lendemain
Chroniquer, c'est bavarder. (Oui, j'ai décidé de commencer par du sens commun, et attention, ça continue :) L'essentiel est indicible. Mettre des mots sur des notes hé, c'est perdu d'avance ! Il m'est difficile de dire pourquoi Un jour sans lendemain est important. Avec le temps, son effet s'est atténué mais il restera un des rares disques me collant aux basques, auquel je pense souvent, bref, un incontournable.
Peut-être parce qu'avec le recul, il contient ce que j'aime dans le genre. L'exubérance d'abord, avec ses guitares extraverties tout aigus dehors, ce chant sponsorisé « Kevin » muant en continu que ce soit lors des embardées émocore jouées à fond de calle ou les arpèges plein d'Envy, des lignes vocales sans variations quelque soit la mélodie d'arrière-fond mais avec la saveur du Biactol qui râpe à chaque syllabes, une batterie sonnant comme mille cœurs voulant battre ensemble. L'absence de ridicule ensuite, celle que l'on ne trouve qu'en France, les paroles qui sont autant de poèmes adolescents contant les périodes charnières d'une vie, des textes boursouflés de chialeries, dégoulinant de métaphores (dont le triptyque gagnant : arbre/pluie/pourquoi), vomissant de laissez-moi-mais-laissez-moi tête à baffe ! Et pourtant derrière ces discours pompeux aux thématiques trop grandes pour eux, derrière ces cordes exagérément stridentes, ces toms inutilement martelés, tout vibrent, existent, les phrases et riffs contenant une forme d'universalité, une question que tu t'es déjà posé, un constat déjà fait, une idée déjà ressassée, enfin, une émotion déjà ressentie, dont tu te rappelles avec un peu de honte.
Il y a même une forme d'intelligence ici, une science du paradoxe au sein des titres (« Naître/Mourir », « Vivre/Survivre », « Aimer/Souffrir », je vais pas te faire un dessin, t'as du faire la même pour montrer ta sensibilité à ta voisine de classe) mais surtout dans la musique, les cassures s'écoulant naturellement, un travail pour marier la sacro-sainte urgence avec des structures surprenantes (à l'image du début quasi-black metal de « Oublier » ou les premiers morceaux abrasifs qui malgré le poids des années font encore un effet bœuf) et ce pied de nez final qu'est « Mourir », le morceau le plus optimiste de la galette, ahah ! Une œuvre pleine d'esprit boutonneux, imparfaite, bancale parfois (les trous d'air « Espérer » et « Survivre »). Seulement, de l'harmonie qui se cherche dans le pas-fini, n'est-ce pas la définition du screamo ?
Non, ce n'est pas pour ça qu'il me trotte au train, au point d'être devenu avec le temps un souvenir à part entière. Il est solide mais j'ai tendance à lui préférer L'un sans l'autre, moins cohérent mais plus marquant. Je le sais, tu le sais, il y a les disques cultes, considérés comme parfaits/innovants/représentatifs d'une époque, et ceux sentimentaux, deux catégories ne se rejoignant pas toujours. Faut dire que nous, Chroniqueurs (ô Chroniqueurs), on est mignon avec notre « culture », notre « objectivation », nos « rien ne vaut la scène moldave » et nos « Godflesh empoignant Animal Collective avec Darkthrone qui pisse dans la neige pendant qu'Immolation lui tient la bite » mais en fin de compte, y a qu'un album, une personne et un contexte. Quand j'ai découvert Un jour sans lendemain j'avais 17 ans, je vivais la période d'entre-deux où tu te poses encore les interrogations fondamentales tout en sentant qu'il n'y a rien derrière, qu'il faut grandir et accepter, la crise d'ado quoi. J'étais mal comme on est mal à cet âge, connement, maladroitement. Alors, forcement…
| lkea 11 Novembre 2010 - 2523 lectures |
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