Envy - A Dead Sinking Story
Chronique
Envy A Dead Sinking Story
Il y a des disques comme ça où dès la première écoute, on sent qu'il se passe quelque chose. Que ce sur quoi on pose les oreilles est grand, très grand. Que ça ne nous lâchera plus jamais et qu'on aimerait déconstruire les mathématiques pour pouvoir lui coller un ?/10. Déjà correctement anéanti, broyé et pulvérisé par All The Footprints You've Ever Left And Fear Expecting Ahead, c'est à l'improviste que j'abordais ce A Dead Sinking Story sans me douter un seul instant de ce qui allait arriver. Pour l'anecdote, sachez qu'Envy, lors de leur premier concert dans la région avait laissé un souvenir à Nancy en explosant le plafond à coup de micro.
C'est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup : On a ici la parfaite illustration de ce qui fait qu'Envy représente LE screamo pour moi. Et cet élément clé, c'est la sincérité reproduite sur album par cette voix si caractéristique semblant à la limite de l'implosion à chaque seconde. Jamais rien ne semble surjoué chez Envy puisque chaque fraction de chaque titre semble provenir tout droit du cœur des musiciens. On les sent si pris, si passionnés et si touchants qu'on ne peut s'empêcher d'être happé dans le torrent d'émotions qu'ils nous proposent. C'est, à mon humble avis, cette énergie de tous les instants qui aura propulsé la formation japonaise au sommet du Screamo originel. Malgré son ancienneté, le quintet (avec ces deux albums spécifiquement) fait la leçon à tout les autres. Que ce soit Mihai Edrisch, Orchid, Raein, Daïtro, Circle Takes The Square ou les plus récents La Dispute ou Touché Amoré : tous se font petits face au monstre légendaire qu'est Envy.
Quasiment indépassable en terme de tristesse, de beauté et de proximité de l'âme, A Dead Sinking Story est une longue procession cérébrale. Un chemin de croix bouleversant à chaque instant qui se nourrit de chacune de ses pérégrinations pour aller encore plus loin dans les tréfonds du sentiment humain. Il est d'ailleurs inutile de parler de morceaux, de parties ou de compositions tant Envy avec ce disque transcende le concept même d'album, laissant libre court à une vague incontrôlée d'émotions se tortillant dans tous les sens. Pas une micro-seconde n'est ici dédiée au remplissage ou à une quelconque réflexion sur la construction et la création artistique. Tout vient du cœur, de l'origine et de l'impulsion humaine. On se fait violence en écoutant cet opus qui nous pénètre au plus profond et a le culot de nous faire mal même si l'on est heureux. Pas d'alternative. On ne peut pas "relativiser" A Dead Sinking Story, on ne peut que l'aimer, le subir parfois et lui rendre justice. Chose que je fais en ce moment même. Un est tout et tout est un comme perdu entre bourrasques dantesques pliant les branches sur les côtes maritimes et accalmies ou l'on voit les feuilles des arbres virevoltant légèrement au vent.
Peut-être qu'A Dead Sinking Story a un peu moins bien vieilli que son prédécesseur auquel il est sempiternellement comparé / confronté / opposé. Et dans cette liste, c'est le terme d'"opposition" qui résume le mieux la différence entre les deux en ce qui me concerne. On avait l'explosion avec All The Footprints You've Ever Left And Fear Expecting Ahead, celle qui déchargeait une colère noire à une vitesse supersonique et nous avons l'implosion avec A Dead Sinking Story , un ressenti tout aussi violent mais contenu, compressé, comprimé à l'intérieur d'un espace clos. Une longue tension qui plane sur chaque passage posé - sublimée par des syllabes hurlées toujours exemplaire - et qui peine à être expulsée. Même les passages avec la plus haute dose d'émotion semblent encore un peu trop petits pour la grandeur de ces sentiments. Comme si Envy avait besoin d'un bac de 100 litres pour vomir ses émotions et qu'on ne lui en donnait que 10, là où l'album précédent possédait quant-à-lui une contenance suffisante.
A Dead Sinking Story est un classique, le deuxième d'Envy et probablement leur dernier à moins que ces derniers réussissent un beau jour à revenir à cet incroyable niveau de qualité (ce qui, je vous l'avoue, m'étonnerait vraiment). Il représente encore aujourd'hui une façon plus posée, plus progressive d'atteindre l'excellence du Screamo. Long, grassouillet et s'étirant sur un nombre conséquent de minutes pour un album du genre, ce disque s'affirme comme un indubitable must-have que n'importe quel amateur de Screamo, éclairé ou non, se doit de posséder dans une discothèque digne de ce nom.
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