S’il est un album injustement sous représenté dans les setlists de KREATOR en tournée, c’est bien celui-là. Car si les allemands, pourtant forts d’une riche et longue carrière, déroulent invariablement leur thrash à la fois féroce (« Tormentor »,
« Pleasure To Kill ») et mélodique (un petit « Voices Of The Dead » pour se reprendre son souffle ?) avec une redoutable efficacité, on ne peut pas dire que l’originalité les étouffe au moment de tirer leurs plus vieilles cartouches. En plus de dix ans et quatre prestations relativement éloignées les unes des autres, j’ai donc dû me contenter de l’indéboulonnable « People Of The Lie » et du title track « Coma Of Souls », parfois sous forme de medley (comme cette année au Hellfest), parfois en version intégrale. A croire qu’il n’y a que ça à sauver sur ce cinquième full length en forme de consécration pour KREATOR, qui marque l’aboutissement stylistique d’un groupe ayant repoussé les limites de la brutalité (l’abattoir insalubre
« Pleasure To Kill ») avant de dévier vers des contrées plus expérimentales.
En ce sens, « Coma Of Souls » est assez proche d’un certain « Arise » (qui sortira un an plus tard), KREATOR et SEPULTURA épousant une courbe évolutive similaire même si l’on attendra en vain un véritable retour aux sources thrash de la part des Brésiliens. Grande homogénéité au niveau des compositions, au point que l’on a du mal à sortir un titre du lot tant tout s’enchaîne à merveille, même lissage au niveau d’une production signée Randy Burns (MEGADETH) permettant à KREATOR de frapper aussi fort que des Américains mieux lotis à l'époque niveau conditions d'enregistrement, l’aspect raw des premiers efforts studio n’étant plus qu’un (bon ?) mauvais souvenir. On y reviendra. Outre des progrès sensibles dans ce domaine, ce qui frappe d’entrée, c’est ce sentiment que le combo d’Essen atteint son pic de forme sur dix compositions tournées vers l’offensive (« World Beyond » et « Twisted Urges », deux short cuts en forme d’exécution sommaire), quand bien même les Allemands ont appris à varier un minimum les tempis pour ne pas saouler de coups des auditeurs encore sous le choc de l’agression frontale
« Pleasure To Kill ». L’opening track « When The Sun Burns Red » concentre à elle seule toute la panoplie thrash déployée par KREATOR sur ce cinquième full length caressant les amateurs de speederies en tous genres dans le sens du poil : une fois la minute introductive habituelle expédiée (arpèges, guitare acoustique et leads mélo de rigueur), la boucherie ouvre grand ses portes avec promotion spéciale sur toupa toupa endiablé, hurlements de bête blessée jetée sans ménagement sur l’étal et riffs en acier trempé proposés à la découpe. La charge est telle qu’on se prend même à trouver ce « Coma Of Souls » encore plus rapide que les déjà bien
fast and furious « Terrible Certainty » et
« Extreme Aggression » ! Heureusement pour les fines bouches, l’écueil de la linéarité speed est évité avec ce qu’il faut de breaks assassins et de mid tempis brise nuque faisant du bien aux cervicales, de l’hymne « People Of The Lie » à la fronde finale « Mentale Slavery ». Dans le même ordre d’idée, le démarrage très heavy de « Terror Zone », qui évoque fortement IRON MAIDEN, vient aérer un programme qui vire rapidement au catalogue de riffs géniaux venus d’ailleurs, la fantastique « Coma Of Souls » donnant le tournis dans ce domaine avec un enchaînement de plans tous plus radicaux les uns que les autres. Et c’est loin d’être la seule ! Ecouter un peu « Material World Paranoia », sa furia lead dès les premières mesures avant la démonstration de force d’un KREATOR parvenu à son apogée thrash avec l’arrivée de Frank Gosdzik à la six-cordes pour s'en convaincre ...
Car si l’ex-fine lame de SODOM (notamment sur « Agent Orange ») fera pâle figure sur
« Renewal » et surtout
« Cause For Conflict », le successeur de Tritze donne tout sur un « Coma Of Souls » qui ne souffre plus de l’affliction
solis slayeriens mal branlés qui tirait les premiers opus vers le bas. Combiné à une maîtrise grandissante de l’art de la guerre thrash à l’allemande, tout concoure à faire de « Coma Of Souls », gros succès en son temps, un indispensable de l’abondante discographie de KREATOR. D’ailleurs, au moment de revenir sur le terrain avec du matériel old school
(« Violent Revolution »), Mille Petrozza ne s’y est pas trompé et s’est logiquement appuyé sur cet album pour repartir de l’avant, tout en accentuant le côté mélodique et progressif de certaines parties. Alors, « Coma Of Souls », meilleur album de KREATOR ? Ça se discute comme dirait un animateur du sévice public poudré jusqu’aux yeux, le caractère sans foi ni loi d’un
« Pleasure To Kill » ayant tout de même son charme et le manque de basses faisant regretter le rendu un peu trop propret de l’ensemble, un peu à l’image des plus récents
« Violent Revolution » et
« Enemy Of God ». Manque de classiques? Trop plein d'excellents titres plutôt, qui oblige (vraiment?) le groupe à faire une croix sur des pièces de premier choix ("Agents Of Brutality", "When The Sun Burns Red") qui mériteraient un bien meilleur sort que l'oubli dans lequel on les cantonne.
6 COMMENTAIRE(S)
23/08/2017 22:46
Vus live moult fois depuis 95, jamais déçu, d'ailleurs parmi les anciens, ce sont les seuls qui envoient systématiquement la purée sans faiblir, tous leurs albums sont de bons à excellents, vive Kreator!
07/02/2016 01:56
02/12/2011 19:43
@ darknico : tout le monde sait que c'est "Blind Faith" la meilleure de Kreator !
01/12/2011 22:47
01/12/2011 20:38
01/12/2011 18:24
J'adore avoir des avis tranchés et définitifs comme cela !