More Than Life - Love Let Me Go

Je me suis rendu compte d'une chose en regardant mes derniers articles, c'est qu'ils ne concernent que des disques ayant pour pochette soit une photo mal cadrée, soit une femme dans une pose étrange. Figurez-vous que le groupe du jour ne va pas échapper à la règle puisque More Than Life a frappé fort dans le registre des pochettes féminines avec son « Love Let Me Go ». En même temps, le Hardcore Mélodique, c'est des histoires d'amour et vu que ce sont des petits bonhommes qui chantent, on ne s'étonne pas de les voir parler de leur sujet favori, à savoir les femmes. La femme est mystérieuse, apporte parfois de la joie, parfois de la peine donc la femme est l'illustration parfaite de ce style de musique qui mêle, rappelons-le, mélodies tristounettes et déferlantes Hardcore. CQFD. Une pochette assez énigmatique dans un aspect fascination/brouillard/répulsion donc, le tout avec un bon goût peut-être un chouilla plus discutable que sur d'autres artworks mais gageons tout de même que si le Black Metal pouvait en prendre de la graine, ça nous ferait un bien fou. Fin de la digression.

Tout de suite, dès la première piste, ça ne sent pas la joie. Le pire dans cette histoire étant que ça ne va pas du tout s'arranger et surtout pas sur le deuxième titre « Curtains Closing » et son lead ô combien déprimant. Pour tout vous dire, vous pourrez même constater avec un certain amusement que les toutes premières notes de « Tear My Life Away » sont presque les mêmes que celles de « Freezing Moon » de Mayhem. Vous l'aurez compris, « Love Let Me Go » est noirci, intense, flou et désespéré et ce nettement plus que la moyenne des groupes du genre. On sent dans chaque piste que le canon du 9mm est beaucoup trop près de la tempe du chanteur. Et ce ne sont pas les quelques instants de grâce divine (le chant clair sur la piste éponyme fait partie de ces courts instants) qui vont nous donner l'impression de sauver les meubles. C'est ça qui est finalement très intéressant chez cette formation qui se différencie des autres par son aspect carrément déprimé.

More Than Life est anglais et quoiqu'on puisse en dire, ça se sent vraiment. Si les américains sont plutôt du genre gros delay et couchers de soleil avec vue sur la mer, les anglais ont en eux l'âpreté de la pluie, la grisaille et la crasse dans les rues. Ceci se traduit finalement par un côté plus couillu, plus rêche et fatalement plus Hardcore, tout simplement. La production illustre plutôt bien mon propos puisque « Love Let Me Go » s'axe sur des guitares très aiguës et abrasives pour un album de ce style. De même, la batterie se pare de cymbales très en avant et d'une résonance rendant sa sonorités très acoustique, voire enregistrée dans le garage du pavillon familial. Un résultat plutôt séduisant qui permet d'apporter à la formation ce côté opaque et peu évident à cerner aux premières écoutes. Ainsi les instants les plus mélodieux du disque dérapent très vite dans une tournure fataliste réellement délicieuse.

Nous sommes devant un album de blasés de la vie, en pleine introspection devant les murs mal crépis d'une quelconque chambre de banlieue résidentielle (visez-moi ce riff en phase terminale sur « I've lost tracks of Everything »). Un désespoir, certes mais surtout une vanité, un désabusement total qui chapeaute de son aura ferreuse chaque note présentée à l'auditeur. Forcément, l'ambiance passe ou casse complètement. Assurément, il faut vraiment être dans l'ambiance pour accrocher à cet album qui est nettement moins easy-listening que les autres sorties du la scène. « Love Let Me Go » n'est pas un de ces albums que l'on passe en faisant la vaisselle puisque compte tenu de son parti pris volontairement glauque, il nécessite de s'y plonger avec pas mal d'attention. Prostré et au pied du mur, tel s'appréhende cet opus ravageur et touchant qui ne lâche pas le chaland, lui mettant délibérément le groin face à son propre reflet, amer de déceptions et de regrets. Les cinq membres de More Than Life vous séquestrent et vous amènent avec toute la force de leurs passages Hardcore aux moments de votre vie que vous ne voulez pas revivre (le final de « Black Eyed ») et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils le font avec une classe et une efficacité rarement atteinte.

Plus difficile, plus torturé et donc plus puissant, sous peine d'accrocher pleinement à son contenu, « Love Let Me Go » est pour moi un des disques les plus marquants de ce courant musical. Avec cette violence omniprésente et cette sincérité non-dissimulée, voire même mise en valeur par cette production aux relents fortement D.I.Y., voilà à coup sûr un opus riche en émotions qui devrait ravir les aficionados de moments mêlant aisément énergie et glandes lacrymales.

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