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Monstrosity - Imperial Doom
Chronique
Monstrosity Imperial Doom
Sorti en 1992 sous la bannière de Nuclear Blast, enregistré par Jim Morris (Death, AngelCorpse, Brutality,…) au Morrisound Studio et affublé d’une pochette intrigante signée Dan Seagrave, il est difficile de faire plus cliché qu'Imperial Doom pour un album de Death Metal paru aux débuts des années 1990. Pourtant, malgré une qualité d’écriture et d’interprétation évidente, jamais cet album ne jouira d’une notoriété comparable à celle d’un Blessed Are The Sick, Human ou autre Legion sortis au même moment et issus de groupes originaires du même coin des USA. Il était en effet difficile de se faire remarquer dans une scène aussi surchargée que la scène floridienne des années 1990, d’autant plus que Monstrosity est arrivée un peu plus tard que les ténors responsables des chef-œuvres sus-cités, qui n’en étaient eux plus à leur coup d’essai. Dans ce contexte spatio-temporel bourré de nouveaux groupes destinés à devenir cultes, il était inévitable que certains albums pourtant tout à fait recommandables tels que celui-ci soient donc passés à la trappe.
Pourtant Monstrosity avait tout pour lui avec son premier album à commencer par un line-up qui laisse rêveur, regroupant Jon Rubin à la guitare (Malevolent Creation), Mark Van Erp à la basse (Malevolent Creation, Cynic, Solstice) et Monsieur George « CorpseGrinder » Fisher à la vocalise (Cannibal Corpse, mais ai-je vraiment besoin de le préciser ?). Pas mal hein ?
Cependant, malgré ces grands noms c’est le moins connu de la bande qui impressionne le plus sur ce Imperial Doom. Le géniteur, compositeur et surtout batteur de Monstrosity Lee Harisson est en effet à mon sens la personnalité la plus importante du groupe, ce qui peut potentiellement expliquer pourquoi il est le seul membre de l’époque encore présent aujourd’hui (si tant est que le groupe soit encore en vie, vu l’absence de nouvelle de leur part depuis un bail). Par ses blasts, ses roulements parfois martiaux et ses coups de folie aussi brefs qu’incisifs, c’est en effet lui qui apporte le souffle de la musique du groupe, qui lui transmet son énergie et qui forge les structures alambiquées qui sont le fondement de la musique de Monstrosity. Très loin d’un Death Metal linéaire comme le Butchered at Birth de Cannibal Corpse ou d’une musique assez simple rythmiquement comme en produisait alors pas mal de groupes, Monstrosity avait en effet en sa possession la science de créer une musique plus sournoise, plus disharmonique et plus intrigante. Pour ce faire, le génial Lee Harisson n’hésite pas à agrémenter sa musique avec des passages plus mélodiques, voir même plus lancinants comme ce passage à 3’20’’ sur "Vicious Mental Thirst" où tout le monde, et en particulier ce cher Corpsegrinder, s’est mis d’accord pour faire régner une ambiance assez curieusement morbide et malsaine.
Néanmoins, même si je fais l'apologie de Lee Harisson il est important de garder à l’esprit que tout le monde met la main à la pâte pour nous proposer une musique qui s’avère somme toute assez technique pour l’époque. Jon Rubin fait donc lui aussi un travail remarquable que ce soit au niveau des structures et des changements de rythmes abrupts, ou au niveau de ces soli pour la plupart assez impressionnants de justesse et de sobriété. Mais c’est surtout dans l’ambiance générale que le jeu de Rubin est intéressant, le garçon étant très doué pour placer des leads souvent aussi succincts qu’impromptus, qui ne sont pas pour rien dans l’aspect sournois de la musique des Américains. Ces petits plus guitaristiques ne prennent d’ailleurs pas forcement l’aspect de leads, et il n’est pas rare que des morceaux de riffs succincts reviennent sans cesse nous hanter dans certains morceaux, comme celui de "Immense Malignacy" se faisant entendre pour la première fois à 0’37’’.
Imperial Doom est un album résolument plus technique que beaucoup d’autres sorties de la même époque et, sans toutefois s’élever au niveau d’un Atheist par exemple, se rapproche clairement plus d’un Nocturnus que d’un Cannibal Corpse. Les rythmes sont donc plus complexes et alambiqués que ce que produisait la majorité des groupes du début des années 90 et le propos est souvent plus nuancé et varié que ce à quoi nous habituait cette scène. Malgré ça la structure des morceaux reste elle extrêmement classique, offrant couplets, ponts et refrains facilement reconnaissables dont le meilleur exemple reste pour moi celui de "Horror Infinite" où notre bon vieux George s’égosille à scander le titre du morceau. Et puisque l’on parle du bonhomme soulignons que la prestation de CorpseGrinder sur cet album est tout à fait honorable même s’il ne fait pas montre du coffre qu’on lui connait aujourd’hui. Son chant reste tout de même très reconnaissable et son timbre de voix est proche de celui de ses débuts dans Cannibal Corpse, notamment sur Vile, même s’il reste ici moins guttural et globalement moins puissant.
S’il sonne donc plus technique que ses concurrents, Imperial Doom n’en reste pas moins très classique et résolument ancré dans la scène de l’époque. Du fait de son enregistrement au Morisound Studio, la production est elle aussi très proche des standards de cette période, l’album sonnant de la même façon que bien d’autres ayant été enregistrés au même lieu. Celle-ci est tout de même très appréciable, claire et faisant magnifiquement ressortir la basse nous permettant ainsi de nous délecter des très belles lignes de Mark Van Erp, dont l’instrument possède souvent un pattern différent de celui des guitares. Le seul petit reproche que l’on pourrait faire vis-à-vis de cette production serait en fait ce son de batterie légèrement sur-mixé qui met un peu trop en exergue la grosse caisse lors des passages les plus rapides. Mais il faut vraiment aimer pinailler pour venir râler là-dessus tout de même, vue la qualité générale du son de l’album.
Imperial Doom est donc un album fort appréciable, une bonne galette malheureusement légèrement tombée dans l’oubli depuis pas sa sortie. Masqué et maintenu dans l’ombre par les albums sortis à la même époque et qui étaient eux destinés à devenir cultes, Imperial Doom marquait pourtant l’apogée précoce d’un groupe qui depuis lors n’a connu que des bas et des plus ou moins hauts, restant pour la plupart du domaine de l’anecdotique. Dès leur sortie suivante Millenium en 1994, qui est tout de même également un bon cru, les changements de line-up faisaient déjà leur apparition le groupe voyant le départ de Jon Rubin et Mark Van Erp. George Fisher suivant le mouvement et rejoignant Cannibal Corpse l’année suivante, on ne peut que se demander ce que serait devenu le groupe si Lee Harrison ne s’était pas fait abandonné par ses petits copains. Le groupe aurait alors peut être continué à sortir des albums de cette trempe, Monstrosity serait reconnu comme un groupe majeur et Imperial Doom serait peut être perçu comme un album aussi culte que ses frères qui lui font de l’ombre.
Mais cela ne sert à rien de se faire du mal de la sorte et ça ne changera rien à l’histoire. Il vaut donc mieux simplement se délecter de ce Imperial Doom sans se poser de question, l’album faisant tout de même partie du haut du panier et devrait contenter tous les amateurs de Death Metal sentant bon les 90’s.
| Høsty 14 Avril 2015 - 1975 lectures |
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