Pour couper court aux rumeurs qui circulent, je vais une fois pour toutes clarifier les choses : Katatonia et moi ne sommes pas divorcés. Il est vrai cependant que ces derniers temps, l'entente n'est pas au beau fixe. Enfin ces derniers temps, avec un peu de recul, ça commence à se compter en années, depuis la sortie de
"Night Is the New Day" (2009) pour être précis où la pente commençait à être glissante. S'en suivit la dégringolade avec le fadasse
"Dead End Kings", la fumisterie
"Dethroned & Uncrowned" et tout une pleiade de produits dispensables tels que la compilation "Introducing Katatonia" ou le énième live "Last Fair Day Gone Night". C'est donc un peu désintéressé que j'ai abordé "Sanctitude", ultime témoignage de leur tournée européenne semi-acoustique pour promouvoir
"Dethroned & Uncrowned". Il n'aura fallu alors qu'un instant pour que tout revienne de nouveau à sa place. Idéalisation d'un passé de bonheur ou réel regain d'amour ? Allez savoir.
Si ça n'a pas été facile pour notre couple, ça n'a pas non plus été facile de son côté. A l'instar d'un Opeth dont le niveau de notoriété implique un énorme investissement personnel, Katatonia a perdu en moins d'un an trois de ses plus anciens membres, incapables de suivre le rythme des tournées : les frères Norrman dont Fredrik y jouait depuis près de 20 ans, et plus récemment l'excellent batteur Daniel Liljekvist. Pour un groupe dont le line-up n'a pas varié pendant plus de dix ans, il a fallu encaisser et ça se ressent lorsque Jonas l'évoque dans une intervention de ce live. "Sanctitude" s'inscrit alors entre cette soif de nouvelles expériences et la nostalgie d'une carrière bien remplie, une prestation d'une justesse à la hauteur de l'inséparable duo fondateur Renkse/Nyström.
Enregistré le 16 mai 2014 à l'Union Chapel de Londres, ce concert unplugged retrace le parcours des Suédois, de
"Brave Murder Day" à aujourd'hui en n'écartant aucun album, même si bien sûr la majorité des titres proviennent du petit dernier. Le groupe a donc pioché ici et là dans sa discographie des pièces susceptibles d'être adaptées pour l'occasion et cela donne une setlist aussi surprenante qu'intéressante, faite de vieilleries et de morceaux assez méconnus. Je pense notamment aux superbes "A Darkness Coming", "Omerta" et "In the White" extraits respectivement de
"Tonight's Decision" (1999),
"Viva Emptiness" (2003) et
"The Great Cold Distance" (2006), ainsi qu'à "Unfurl" qu'on retrouvait sur la face B du single
"July" (2007). Toutefois, on a beau parler d'*adapation*, une bonne partie des titres étaient déjà plus ou moins destinés à ça et n'ont eu besoin que de quelques mises aux points. Sans parler de ce qui sort de
"Dethroned & Uncrowned", il n'était pas difficile d'imaginer y entendre des morceaux comme "Omerta", "Idle Blood", "A Darkness Coming", "Day" et "One Year From Now" voire même "In The White" à peine retouchée de sa version Urban Dub en face B du single
"Deliberation". Par contre, le travail sur "Teargas", "Tonight's Music", "Gone" et surtout "Evidence" et "Sleeper" est plus remarquable puisque le groupe a dû compenser le poids des guitares électriques pour recréer une atmosphère intimiste tout en conservant toute la tristesse des compositions. Malgré l'hétérogénéité de la sélection, le concert parvient à maintenir cette ambiance tout au long de ces 17 titres, entre communion et soirée entre amis, arches gothiques, bougies et tapis de resto indien à l'appui.
Fidèle à leur réputation, les suédois délivrent une prestation sans faille. Guitares envoûtantes, chant fantastique, arrangements subtils et de bon goût, il n'y a pas grand chose à reprocher à ce live qui jouit en plus d'un son et d'un mix parfait. Pour coller au mieux à
"Dead End Kings", la sublime Silje Wergeland viendra aussi pousser la chansonnette sur la conclusion "The One You Are Looking for Is Not Here". Dommage d'ailleurs que le groupe n'ait pas profité de sa présence pour lui accorder plus de place car sa voix aurait mérité une meilleure exposition. Mais pour moi, les seuls griefs que je formulerai sur cette soirée, ce sont les percussions que je trouve souvent hors de propos (mon côté anti-World Music peut-être), notamment sur "Evidence" où l'on atteint des sommets même si Jonas a l'air de s'éclater. Les Suédois auraient également pu trouver un clavériste au lieu d'user de bandes sonores pour renforcer la spontanéité du set ; étrange pour un groupe qui mise de plus en plus sur cet apport depuis
"Last Fair Deal Gone Down". A part ça, l'ami Renkse se la joue Akerfeldt (le regard de zombie en plus) et communique beaucoup avec le public, n'oubliant jamais de remercier à chaque fin de chanson tous ces petits veinards qui ont eu la chance d'assister à ce concert unique.
CD+DVD, Blue-Ray ou digital, à vous de voir. Je pense néanmoins que ce live s'écoute plus qu'il ne se regarde. En effet, l'excellente réalisation et la qualité des images ne donneront pas plus d'intérêt au film : durant ces 80 minutes, vous ne verrez rien d'autre que 5 bonhommes assis sur leur chaise, ne bougeant que pour jouer de leur instrument. Rien d'anormal, c'est le contexte qui veut ça mais on en fait vite le tour. Pour ce qui est de l'audio, c'est par contre un vrai régal, un visage de Katatonia que l'on n'avait pas l'habitude de voir et qui lui va comme un gant. Voilà enfin de quoi patienter jusqu'à la sortie du successeur de
"Dead End Kings".
PS: Pour ceux qui se poseraient la question, je n'ai pas eu l'occasion de visionner le documentaire "Beyond the Chapel". N'hésitez pas à nous faire vos retours.
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