Il est de ces œuvres, engendrées par des artistes majeurs, qui demeurent souvent dans l’ombre malgré leurs qualités intrinsèques, tant elles peuvent être éclipsées par des colosses écrasants de renommée et de prestige.
Accelerated Evolution est de celles-là. Parce que lorsque l’on aborde l’œuvre gargantuesque de Devin Townsend (et ses divers projets), ce sont souvent les mémorables
Ocean Machine,
Infinity, ou encore le monument
Terria qui s’imposent, et en imposent par la même occasion. Mais l’album dont il est question ici voit quant à lui le jour sous le nom « The Devin Townsend Band ». Le but étant à l’époque de doter le prolifique Canadien d’un line-up dédié à sa carrière solo (on retrouvera d’ailleurs la plupart de ses musiciens dans le Devin Townsend Project six ans plus tard).
Alors, cet
Accelerated Evolution mérite-il que l’on s’y attarde ? Difficile de trancher, pour vous faire une réponse de Normand. On retrouve ici tous les éléments indissociables d’un disque de Devin Townsend, si forts qu’ils en constitueraient presque un sceau en nom propre. Et le charme agit toujours au premier contact, On le retrouve instantanément dans ce son puissant et clair, constitué d’un empilement multicouche de guitares et de claviers aboutissant à un édifice sonore chargé, mais limpide au possible. Assurément, l’album est, sur la forme, dans sa production et son interprétation (le chant est toujours assez fantastique), quasiment inattaquable. Le problème est ailleurs. Si
Accelerated Evolution parvient un instant à nous rappeler la pureté et l’efficacité d’un
Ocean Machine (l’opener « Depth Charge » est assez impressionnant à ce niveau) le côté bien plus accessible et moins ambitieux du disque déçoit, comme si Devin cherchait (et réussi dans l’idée) à livrer une version plus tempérée, qui laisse malheureusement une désagréable sensation de tiédeur. Des chansons comme « Traveller » ou « Slow me Down » sonnent bien trop plates et convenues pour convaincre. Dans une veine assez proche, « Sunday Afternoon » bien qu’un tantinet plus agréable (ce refrain cotonneux) ne marque pas non plus. Comme si dans un registre plus typiquement pop, Devin n’était pas encore en totale confiance…
Et justement, c’est quand l’album s’éloigne un peu de cette formule qu’il place quelques gemmes. La plus célèbre d’entre elle bien sûr, la magnifique « Deadhead », que ses huit minutes, tout en atmosphère et en sensibilité traversées par les vocaux déchirants de Devin, font encore aujourd’hui un classique du vaste répertoire du Canadien. Le genre de titre qui survole le reste et vaut à lui seul l’achat du disque. On retiendra aussi un « Storm » majestueux, mais concis et accrocheur, les mélodies vocales faisant mouche. Un petit tour de force en soit qui n’aurait pas dépareillé sur les précédentes œuvres cités plus haut. C’est ensuite le bien trop méconnu « Suicide » qui finira de nous épater avec ses riffs « meshuggesques » (les guitares sont d’une netteté et d’une puissance peu commune pour l’époque) et son solo flashy. Assez rare chez Devin, qui se sera finalement (et judicieusement) abstenu de faire des démonstrations techniques stériles tout au long de sa carrière.
Accelerated Evolution laisse une impression mitigée. La sensation d’avoir affaire à une œuvre franchement inspirée dans sa première partie s’efface aussi vite qu’elle est venue dans la deuxième. Dommage pour un artiste qui semble peut-être se répéter pour la première fois sur cet album dédié à sa femme Tracy, évoquée à de nombreuses reprises. Pourtant les qualités sont là, mais quand il s’agit d’un génie de la trempe de Devin Townsend, difficile de ne pas être déçu. On réécoutera donc
Accelerated Evolution pour ces meilleurs moments entre deux cures d’
Ocean Machine et de
Terria.
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