Katatonia - Brave Yester Days

Pour tout adorateur de Katatonia ayant découvert leur première période sur le tard, cette compilation est tout simplement une bénédiction. En effet, "Brave Yester Days" regroupe tous les EP et raretés que le groupe a pu produire de leur première production officielle, "Jhva Elohim Meth... The Revival" sortie en 1992, jusqu'à l'EP "Saw You Drown" sorti juste avant "Discouraged Ones" en 1998. Il faut bien savoir que tous ces EP sont aujourd'hui totalement écoulés et c'est pourquoi l'idée est appréciable pour ceux qui n'ont pas eu la chance de naître assez tôt. Bien plus qu'une simple compilation, "Brave Yester Days" montre l'évolution du groupe au fil des ans, chose d'autant plus intéressante que le groupe a beaucoup changé d'albums en albums. De plus, pour ne pas casser la chronologie, deux titres de "Dance Of December Souls" et "Brave Murder Day" ont été inclus.

Avant de parler de la musique, j'ajouterai quelques mots sur l'objet qui est franchement magnifique : package carton double CD, design de très bon goût rappelant "Brave Murder Day", réalisé en collaboration avec Anders Nyström et contenant photos d'époque, paroles et infos sur chaque EP et album. Sur ce coup là, ils ne se sont pas foutu de la gueule du monde.


"Jhva Elohim Meth... The Revival" (1992) :

Voilà, c'est par là que tout commence pour les suédois. La moyenne d'age ne doit pas dépasser les 18 ans et déjà, ce premier EP vous le prouvera, le groupe fait preuve de beaucoup d'ingéniosité, avec un style entre le dark metal et le black metal. Les morceaux sont déjà très mélodiques, très lourds et profonds à l'image de l'excellente "Without God" qui sera reprise sur "Dance of December Souls". Bien sûr, il y a encore beaucoup de choses approximatives, comme la voix, les transitions, voir les structures des morceaux en général et certains riffs qui sont vraiment simplistes. L'utilisation du clavier est plutôt une bonne chose, donnant pas mal de profondeur à certains passages. On sent bien que le groupe se cherche (enfin c'est normal pour une première production), mais on reconnaît déjà la patte du groupe qui était constitué à l'époque de Jonas "Lord Seth" Renkse et de Anders "Blackheim" Nyström.


"Dance of December Souls" (1993) :

Premier album du groupe devenu presque aussi culte que "Brave Murder Day" pour bon nombre de metalleux. L'évolution est déjà bien palpable par rapport à "Jhva Elohim Meth", avec des compositions bien plus poignantes et réfléchies. La musique est toujours aussi lourde et dépressive, avec ce clavier qui se détache un peu des guitares et de la voix. On sent une réelle sincérité dans les émotions exprimées à travers les deux titres "Gateways of Bereavement" et " Velvet Thorns". "Dance Of December Souls" est un concentré de désespoir qui ne souffre guère de sa production médiocre, grâce à la profondeur de la musique.


"War Compilation Vol. 1" (1994) :

Les deux morceaux issus de cette compilation sont assez étranges. "Black Erotica" n'est en fait que le futur morceau "12" qui fera partie de "Brave Murder Day". Alors bien sûr, le son et les arrangements sont quelque peu différents, mais la structure du morceau est identique si l'on excepte l'intro un peu différente, d'où un excellent titre. Par contre, il y a de temps en temps quelques fausses notes dont je n'explique pas l'existence. "Love Of The Swan" est dans la même veine mais tout de même moins bon, très lourd, lancinant et mélodique. Sinon, c'est toujours Jonas qui s'occupe des hurlements qui sont toujours aussi bons et le son est correct.


"For Funerals to Come" (1994) :

"For Funeral To Come" est un des EP les plus étranges de cette compilation. Les morceaux se situent entre "Dance Of December Souls" et le futur "Brave Murder Day" (à juste titre), mais possède une touche que le groupe n'avait jamais montré auparavant. On sort un peu de l'ambiance des premières productions, avec des morceaux plus courts, mais toujours dans la même veine dark metal bien lourd et mélodique. Le clavier est toujours là bien que sa place se fasse plus discrète, mais ses apparitions sont toujours aussi judicieuses. Vocalement, l'ami Jonas s'en donne à coeur joie, le gaillard ayant rarement autant hurlé comme un putois, mais il faut dire que la musique s'y prête bien puisque les titres comportent quelques passages bien glauques et rapides comme sur "Funeral Wedding" par exemple. L'EP possède d'ailleurs un petit côté black metal plutôt sympathique qui marque un peu le plis par rapport à l'évolution de leur musique. Le chant clair s'offre une place plus importante sur "Shades Of Emerald Fields". Le troisième morceau de l'EP, "For Funerals To Come" se détache du reste par sa douceur et sa beauté ; dommage qu'il y ait une vieille voix à deux balles qui gâche un peu la musique... Le dernier titre "Epistel" n'a par contre aucun intérêt puisque c'est une pseudo instrumentale de plus d'une minute, composée de sonorités diverses qui ne dégagent rien.


"Brave Murder Day" (1996) :

Déjà chroniqué sur Thrashocore, j'ajoute quelques mots sur ces deux morceaux "Murder" et "Rainroom", qui sont tout simplement excellents. Une ambiance très sombre et lourde, d'une noirceur et d'une tristesse jamais atteinte par le groupe. Il faut savoir que c'est Mikaël Akerfeldt qui s'occupe des vocals, Jonas s'adonnant lui de temps en temps au chant clair qui se démocratisera sur "Discouraged Ones". Bonne production mais sans plus, un peu dommage mais ça fait parti du charme. Un album culte pour bon nombre de metalleux et à juste titre.



"Sounds Of Decay" (1997) :

Cet EP est sans conteste, mon préféré dans tout le lot. Il est vraiment grandiose, avec toujours le grand Mikaël aux hurlements qui s'en donne vraiment à coeur joie. Il s'inscrit dans le prolongement de "Brave Murder Day", distillant une musique toujours aussi noire et écrasante, mais un poil moins sombre que son prédécesseur avec des mélodies d'une rare beauté et une ambiance toujours aussi prenante et poignante. Les 4 titres sont excellents, et même l'intense (de part sa durée, sa douceur et sa violence) inédite "Untrue" qui colle parfaitement à l'ambiance de l'EP.



"Saw You Drown" (1998) :

Changement radical d'orientation pour Katatonia qui délaisse le dark metal pour s'adonner à un metal/rock dépressif avec chant clair. Après la perfection des précédentes productions, Katatonia retombe dans l'incertain avec des titres manquant de diversité et un chant encore assez approximatif. Toutefois, pour une révolution c'est plutôt réussi comme en témoignent les 3 premiers titres dont "Nerve" et "Saw You Drown" feront parti de "Discouraged Ones". Même si ça n'est pas parfait, Katatonia a visé juste, puisque les titres sont très touchants, notamment grâce à la voix fragile de Jonas qui porte la musique. Le dernier morceau "Scarlet Heavens", par contre, n'a rien à voir avec le reste puisqu'il s'agit d'une chute de studio datant de 1994. C'est un très long morceau (plus de 10 minutes), un peu chiant, ni dans l'esprit de l'EP, ni dans l'esprit du groupe en règle générale. Je ne l'apprécie pas tellement car il a une teinte 80's que je trouve très désagréable (dans la voix et le son de la gratte), mais après ce n'est que mon avis.


Voilà, la suite on la connaît. Le très touchant "Discouraged Ones", la noirceur absolue de "Tonight's Decision", la perfection de "Last Fair Deal Gone Down", le renouveau "Viva Emptiness", ... Katatonia est un groupe en perpétuelle évolution. "Brave Yester Days" est une excellente rétrospective de la première période de la carrière des suédois, bien loin des simples compilations à but purement commercial, et un excellent moyen de découvrir une face que beaucoup de nouveaux adeptes ont laissé de côté. Merci à Anders et Avantgarde Music pour ce beau cadeau.

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