Dans la foulée de
« Blizzard Of Ozz », Ozzy Osbourne et ses acolytes rempilent illico pour une nouvelle session en studio entre février et mars 1981, avant de partir dans une tournée qui sera triomphale mais qui verra du mouvement au sein de la troupe. Car si le futur « Diary Of A Madman » a été enregistré avec le même line-up que précédemment, Bob Daisley et Lee Kerslake ne seront pas crédités sur ce nouvel opus puisqu’ils quitteront le groupe dès la mise en boîte achevée. A la place ce sont les remplaçants Rudy Sarzo et Tommy Aldridge qui figureront en bonne place sur le disque bien que n’ayant pas joué une seule note (encore un signe de respect pour ses anciens partenaires), et qui seront de la partie pour la légendaire série de concerts qui suivra. Cependant ce climat de fin de cycle n’altère en rien la créativité et le niveau de chacun de ses membres, bien au contraire car ce second album réussit l’exploit d’être presque au même niveau que son prédécesseur, ce qui n’était pas une mince affaire. En effet malgré la qualité de ses membres on pouvait craindre une légère baisse de régime, mais là encore ils se sont surpassés, notamment le guitariste qui va trouver le moyen de proposer une palette technique plus élaborée et inventive que quelques mois auparavant.
Dès l’intro de batterie terminée « Over The Mountain » nous montre qu’on est dans la suite logique du précédent opus (on le croirait presque calqué sur « Crazy Train »), le sens du riff de Randy Rhoads est reconnaissable de suite et la session rythmique lourde et précise donne un vrai groove à ce morceau d’ouverture mid-tempo à souhait, dont on peut regretter aujourd’hui l’absence scénique tant il ferait encore mal aujourd’hui. Après ce début très classique et déjà relevé « Flying High Again » confirme les espoirs et attentes en montrant une facette un peu plus enjouée (malgré la gravité du sujet et des paroles sur les drogues) et sautillante typiquement 80’s, mais qui contrairement à nombre de compos de l’époque n’a absolument pas vieillit. Deux titres et déjà deux classiques en puissance, l’ensemble démarre aussi fort que celui présent chez son grand-frère, et va continuer sur le même rythme avec d’abord le mélodique « You Can’t Kill Rock’N Roll » qui passé l’effet de surprise initial se révèle être superbe et tout à fait à sa place où Ozzy a été rarement si émouvant et si juste. Puis ensuite place à la lourdeur de « Believer » où l’on sent poindre quelques relents et influences de l’ancien groupe du chanteur, car ici on navigue en pleine obscurité et un rythme volontairement bridé pour renforcer l’ambiance générale, pour un résultat à la hauteur encore une fois. Cependant là où
« Blizzard Of Ozz » ne souffrait d’aucunes faiblesses, ici il faut reconnaître qu’après une excellente première partie le début de la seconde est lui moins à la hauteur, tout d’abord avec « Little Dolls » pas mauvais mais plus faible que le reste (malgré une prestation de haute tenue du guitariste), et ensuite avec la balade « Tonight » vite ennuyeuse et bien loin des autres créations du même genre passées et futures que l’on pourra entendre de la part de son perturbé géniteur.
Mais heureusement l’ensemble se clôture en beauté, d’abord avec l’inclassable « S.a.t.o. » qui ne ressemble à rien à ce que la bande nous avait déjà proposé jusqu’à présent, car ici on est dans quelquechose de complexe et de presque théâtral qui surprend de prime abord mais auquel on finit par adhérer rapidement, et qu’on adopte totalement après plusieurs écoutes, enfin comment ne pas évoquer le morceau-titre qui est un chef-d’œuvre total de noirceur aux nombreux arrangements classiques et progressifs. Entre les notes électriques et acoustiques, la voix posée, les violons et les chœurs féminins on a tout pour faire quelquechose d’inclassable et de génial, et c’est ici le cas tant on est transporté par la mélancolie qui le compose et qui fait toujours son effet aujourd’hui auprès de l’actuelle génération (comme MACHINE HEAD qui l’utilise depuis longtemps avant de monter sur scène).
Avec un succès aussi immédiat et fulgurant que lors de sa précédente sortie le binôme Ozzy/Randy réussissait un tour de force durant presque trois-quarts d’heure, avec un disque moins dense que leur premier bébé mais plus recherché et abouti, au contraire de la pochette absolument immonde et kitch où l’on pouvait voir Louis (alors âgé de 6 ans), le fils qu'il a eu avec sa première femme Thelma. Malheureusement alors que la consécration pour les deux amis avait déjà commencé le destin va s’en mêler en pleine tournée le 19 mars 1982, au lendemain d’un concert à Knoxville et pendant un jour de repos, avec le tragique accident d’avion qui va voir disparaître le guitariste surdoué à l’âge de seulement 25 ans. Avec lui disparait un talent exceptionnel qui a permis au chanteur Britannique de relever la tête et de revenir en force sur le devant de la scène, celui-ci énormément affecté par la perte de celui qu’il considérait comme un frère replongera progressivement dans ses excès tout en offrant encore des disques percutants (notamment le suivant
« Bark At The Moon ») et remplis de classiques, mais qui n’auront jamais la fougue de ces deux bijoux sortis à la vitesse de l’éclair, à l’image du six-cordiste qui est passé tel une météorite mais qui restera à jamais dans les mémoires.
* A l’instar du précédent, cet album a eu droit à un réenregistrement en 2002 avec Robert Trujillo et Mike Bordin à la basse et à la batterie pour des histoires de droit d’auteur envers Bob Daisley et Lee Kerslake. Heureusement cette « erreur » sera réparée avec la version de 2011 qui rendait hommage à la formation originelle qui le méritait.
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