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Wytch Hazel - III: Pentecost

Chronique

Wytch Hazel III: Pentecost
Il n’est aucunement secret dans ces pages que Wytch Hazel fait partie de mes chouchous depuis la sortie de leur premier album, parmi la pléthore de formations récentes et sonnant vintage qui sont apparues durant la dernière décennie. Sauf qu’à contrario de ces formations sonnant rétrogrades et bloquées plus ou moins grandement sur la redécouverte de Black Sabbath, des vieux Pentagram et de toutes ces formations occultes des seventies, Colin Hendra, qui a un lourd passif folk, s’est plutôt entiché des vieux Iron Maiden, - la découverte de cette formation ayant été décisive pour lui -, Wishbone Ash et, ce qui n’est surtout pas pour me déplaire, de Thin Lizzy - car le monde serait bien meilleur s’il écoutait plus Thin Lizzy. Ce n’est sans doute pas un hasard si la formation de Lancaster s’est retrouvée signée chez Bad Omen Records détenu par un certain Will Palmer, ancien de chez Rise Above Records et de Mourn, et actuel bassiste de Angel Witch, groupe dans lequel Colin Hendra avait officié en tant que guitariste de session. Comme quoi, le relationnel ça peut aider, mais l’idée même de népotisme tombe à l’écoute de ce groupe, au même titre que bons nombres de formations assez originales présentes dans le catalogue de ce label. Dans tous les cas, en cette fin d’octobre de cette funeste année deux mille vingt, Wytch Hazel nous propose son troisième album, intitulé III: Pentecost, avec une certaine régularité, puisque succédant à II : Sojourn sorti il y a deux ans. L’on notera pour l’anecdote le départ du bassiste Neil Corkery, membre depuis les débuts du groupe, et remplacé par Andy Shackleton.

Comme à chaque sortie d’un troisième album d’une formation, l’on évoque souvent l’album de la maturité, celui qui va faire reconnaître le groupe auprès de son public. C’est indéniable que le chemin parcouru depuis les premiers EP est assez flagrant et que ce III : Pentecost est bien un album dans la droite lignée de ses prédécesseurs avec des progrès notables dans tous les domaines, encore une fois. Cela se ressent déjà dans le travail acharné réalisé par le leader du groupe et ses acolytes, avec de nombreuses pistes de guitares pour chaque titre, un grand nombre de prises pour chacune d’entre elles ayant été réalisées en plus d’avoir apporté une certaine minutie dans tous les détails. L’on sent que les Anglais avaient voulu aller encore plus loin pour ce qui est de l’enregistrement et de la composition, et cela se ressent clairement à l’écoute de cet album. Il recèle de nombreux détails au niveau des guitares, avec un grain assez particulier et forcément vieillot qui en ressort, mais qui sert bien la musique. Car ce qu’il y a de bien chez Colin Hendra, c’est qu’il ne vas pas s’étirer à longueur de publications sur les internets pour expliquer quelle tête d’ampli vintage des années soixante il a utilisé pour réaliser cet album. Encore une fois avec cette formation, et c’est pour cela aussi que je l’apprécie, ce sont les aspects techniques qui sont au service de la musique et des compositions et pas du tout l’inverse. Mais en tout cas, cela sonne assez massif et en même temps aéré et l’on ressent bien la passion animée par la quatuor pour venir à bout de cet album et du défi dans lequel il s’était lancé.

Pour autant, si une plus grande maturité est mise en avant sur ce III : Pentecost, elle va aussi bien dans le fait d’assumer clairement l’héritage hard rock et heavy metal des Anglais que cette facette folklorique. Wytch Hazel demeure ainsi cette formation unique des troubadours du metal, dans le sens réellement noble du terme. Bien entendu, cela se ressent sur un titre comme The Crown où les acoustiques prennent les devants, mais aussi sur l’entièreté de l’album, non seulement dans la manière d’agencer les titres, mais surtout, et c’est ce qui fait vraiment tout le charme de cet album, par un choix de production tout à fait surprenant: les guitares électriques sont très fréquemment doublées par des guitares acoustiques sur quasiment tous les titres. C’est là que l’on ressent tout le travail acharné du quatuor, à la limite de l’obsessionnel comme le souligne Colin Hendra dans la fiche de présentation de cet album. Et j’avoue que c’est cela qui fait toute la beauté et l’originalité de cet album. Autant, l’on pouvait avoir parfois l’impression que le leader ne savait pas trop choisir par moment entre ses deux amours, je pense notamment à la partie centrale de l’album Prelude, autant là, tout fait sens et tout fait particulièrement corps. C’est on ne peut plus cohérent et surtout, cela ne dénature aucunement la musique de Wytch Hazel. Et cela ne vient encore moins l’abâtardir et la rendre insipide comme d’autres formations évoluant dans ce créneau rétro - et dont l’inspiration tend plus à faire du copier coller de leurs influences plutôt que de proposer quelque chose d’original -, en évitant, qui plus est, de verser dans l’écueil de la mièvrerie. D’ailleurs, le chant de Colin Hendra, toujours aussi bon, garde bien cet aspect un peu plus solennel, sorte de trouvère des temps modernes, même s’il commence à se lâcher de temps à autres et sort enfin de cette retenue chevaleresque.

S’il y a bien quelque chose que l’on peut reconnaître chez les hommes de Lancaster, c’est la passion et la dévotion qui les animent. Évidemment, l’on ressent bien tout cela dans ces compositions vraiment prenantes et rappelant bien tout un bagage culturel et musical des années soixante dix, avec notamment l’utilisation probante d’un orgue hammond sur quelques titres, - avec un excellent solo sur le titre I Am Redeemed qui nous fera pas mal penser à Uriah Heep, plutôt qu’à Deep Purple -, et un violoncelle à plusieurs reprises, tenu par papa, à savoir David Hendra. Évidemment, c’est cette mixture à la croisée entre folk, mais pas dans sa déclinaison pour fêtes à la saucisses du coin, et heavy rock, avec tout de même en ligne de mire Wishbone Ash et Thin Lizzy. À ce propos, le titre I Will Not aurait très bien pu figurer sur Jailbreak ou Johnny the Fox. Pourquoi est-ce que j’insiste sur ces deux formations? Et bien tout simplement parce que ce disque regorge de ces fameuses leads harmonisées qu’ont popularisées ces deux formations durant les années soixante dix et que l’on retrouve énormément sur chaque titre. Et c’est peut être un détail pour vous, mais pour moi c’est cela qui fait clairement la différence entre Wytch Hazel et les autres, ce d’autant plus avec le nombre de guitares présentes sur chaque titre qui rend tout ceci très majestueux. La seule formation contemporaine avec laquelle je pourrais faire un parallèle pour cette richesse des arrangements de guitares, et bien que dans un tout autre domaine, n’est autre que Mournful Congregation. Oui, la richesse des compositions est de ce niveau, tout en gardant des structures assez simples et efficaces, car les titres ont une durée assez courte.

Mais tout cela est au service d’une musique très noble et toujours aussi empreinte de mysticisme et aux accents toujours aussi moyenâgeux. Il suffit de voir la pochette de l’album, très bien réalisée par Branca Studio, et aussi les tenues de scène du quatuor, pour voir de quoi il en retourne. C’est bien une certaine idée de la chevalerie avec ses thématiques de bravoure, de fierté, d’honneur et de dévotion à dieu que l’on retrouve ici. L’on ne peut éluder ce côté très croyant chez Wytch Hazel et cela colle bien à leur musique et à leur personnalité. De toute manière, les textes sont suffisamment fins pour ne pas sombrer dans le prosélytisme béat, un peu comme le faisait Trouble à leur débuts. C’est évidemment moins sombre que chez les Américains, même si les titres The Crown et Ancient of Days sont plus ternes. C’est d’ailleurs toute la fin du disque qui est plus mélancolique, bien lancée d’ailleurs avec cette introduction reprenant La Marche Funèbre de Chopin sur Reap the Harvest - un peu à la manière d’un On Borrowed Time sur l’album Run to the Light de Trouble, comme quoi, il y a bien pire comme comparaison. Et à l’heure où le metal à consonance épique a le vent en poupe, mais avec souvent quelque chose qui manque d’une réelle profondeur - je pense surtout à de nombreuses formations venant de l’autre côté de l’Atlantique et leur héroïsme en carton-pâte -, les Anglais s’inscrivent en porte à faux de leurs contemporains avec un propos réellement poignant et habité par le feu sacré, et nous rappellent bien que le Vieux Continent saura toujours faire mieux dans ce registre, car habité d’une longue tradition en la matière.

Nul besoin de cérémonie de chevaliérisation pour adouber ces nouveaux hérauts du heavy metal que sont les membres de Wytch Hazel. III: Pentecost est donc une très belle réalisation et confirme bien tout le potentiel du quatuor qui n’en finit pas de progresser et, surtout, de se singulariser dans un registre où il est plus facile d’en énumérer les poncifs que de proposer quelque chose de réellement original. C’est bien toute la force de ce troisième album qui vient définitivement installer Wytch Hazel comme l’un des plus beaux prétendants au trône des meilleures formations dans ce registre. Ainsi, ces dix compositions forgées avec ferveur et vaillance auront de quoi vous séduire et vous emmener en ces temps reculés où la bravoure, l’honnêteté et le fait de rendre leur dignité aux plus faibles étaient des valeurs cardinales. Dans tous les cas, cette réalisation fait partie des plus belles réussites de cette année deux mille vingt et ce serait un sacrilège que de passer à côté.

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Wytch Hazel
Hard Rock / Heavy Metal
2020 - Bad Omen Records
notes
Chroniqueur : 8.5/10
Lecteurs : (2)  8.5/10
Webzines : (5)  8.47/10

plus d'infos sur
Wytch Hazel
Wytch Hazel
Hard Rock / Heavy Metal - 2011 - Royaume-Uni
  

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vidéos
Spirit and Fire
Spirit and Fire
Wytch Hazel

Extrait de "III: Pentecost"
  

tracklist
01.   He Is The Fight  (03:44)
02.   Spirit And Fire  (04:32)
03.   I Am Redeemed  (03:52)
04.   Archangel  (04:22)
05.   Dry Bones  (05:06)
06.   Sonata  (03:01)
07.   I Will Not  (04:01)
08.   Reap The Harvest  (04:44)
09.   The Crown  (04:19)
10.   Ancient Of Days  (05:07)

Durée : 42:48

line up
parution
30 Octobre 2020

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II : Sojourn

2018 - Bad Omen Records
  

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