Le déclin est une idée qui hante les civilisations depuis toujours. Qu’il soit fantasmé ou bien réel, il alimente éternellement la réflexion et les débats. Primordial, et surtout sa plume et voix Nemtheanga ayant depuis ses débuts eu à cœur de relater l’histoire et ses tragédies, c’est tout naturellement qu’il a perçu ce murmure sinistre, devenant peu à peu une clameur funeste prédisant la fin de l’Occident. Et à ces chœurs se mêle sur
Exile Amongst the Ruins la plainte de Nemtheanga.
Ce nouvel album est son constat que l’Occident, qui a un temps engendré les arts de la Renaissance, la musique classique, la révolution industrielle, voit aujourd’hui cette gloire remplacée par l’indigence, l’immoralité, l’hypersexualité et la décadence des esprits qui par faiblesse prônent l’antiintellectualisme. Les Irlandais traduisent ce sentiment par une musique empreinte de grandeur, comme les civilisations qu’ils décrivent ont pu en être empreintes, mais sombre et inéluctable, comme le destin de celles-ci peuvent l’être. Faut-il y voir une mise en abyme personnelle, consciente ou non, d’un groupe qui a pu écrire parmi les plus belles pages du metal récent et qui maintenant ne voit que son déclin ?
La réponse pourrait être cruelle, surtout à l’écoute d’un disque aussi long, et en ayant encore en tête la tristesse insurmontable de
The Gathering Wilderness ou les élans martiaux de
To the Nameless Dead. C’est ce que l’on pourrait reprocher aux récentes sorties de Primordial, un certain manque d’intensité, cette tension que l’on pouvait retrouver à chaque instant chez les œuvres précitées. Et
Exile Amongst the Ruins nous donnera malheureusement la même impression, du moins lors des premiers contacts surtout. L’ambiance est aride, l’atmosphère pessimiste est très palpable tout du long grâce à une production donnant cette sensation de profondeur, et qui cimente un contenu homogène en qualité malgré la variété des compositions. Bien sûr, des morceaux comme « Where Lie the Gods » ou « Upon Our Spiritual Deathbed », titres imposant qui marchent dans les traces des morceaux les plus typiquement épiques du groupe ne surprennent pas. Mais des moments très réussis comme « To Hell or the Hangman », hymne au tempo galopant, ou la ballade rock nostalgique « Stolen Years », prouvent que Primordial a, après vingt-cinq ans de carrière, un vocabulaire musical à même de se renouveler. L’aspect black metal du quintet est toujours présent mais ténu, existant surtout au travers de la deuxième partie de l’excellent « Nail their Tongues » en ouverture. Pour le reste, les forces du groupe sont encore vives, et comme à chaque fois ses qualités resplendissent sur
Exile Amongst the Ruins. Cette unité, cette absence d’égo et l’abnégation dont font preuve les Irlandais n’a pas changé avec les années, au point que l’on ne sera pas étonné d’entendre une section rythmique faire à nouveau des merveilles sur « Sunken Lungs », ou bien de les voir conclure l’album comme souvent avec leur doom le plus miséricordieux sur « The Last Call ».
On le sait, Primordial fait face au problème bien connu du groupe qui a déjà livré précédemment ce qui était surement le sommet de son art, et demeure prisonnier de la formule qu’il a lui-même trouvé. En cela, la lassitude aidant, beaucoup trouveront en
Exile Amongst the Ruins un album de plus dans une riche discographie. Certes, l’album prend son temps pour convaincre, il y manque un véritable sommet qui aurait fait définitivement pencher la balance, mais il s’agit de l’opus d’un groupe tenant une force rare, et l’interprétation passionnée de Nemtheanga porte toujours l’ensemble à un niveau au-dessus de la scène metal actuelle. Le déclin peut-être, mais on est encore bien de loin de la décadence.
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