Bon, c’est bien beau de s’attarder sur les dernières sorties de 2018 mais un retour aux fondamentaux s’impose en ce début d’année. Et compléter la discographie de ce monument du Death Metal qu’est Cannibal Corpse ne serait pas une mauvaise chose pour bien débuter 2019. Pour cela, attardons-nous aujourd’hui sur l’excellent
Tomb Of The Mutilated sorti à l’automne 92. A l’époque, le groupe enchaîne les sorties à un rythme impressionnant avec pas moins de trois albums en trois ans. Le tout bien évidemment entrecoupé par quelques concerts et tournées un peu partout à travers le monde. Bref, une période particulièrement faste qui va voir les Américains s’imposer rapidement comme l’un des groupes les plus incontournables du genre.
Baignant probablement encore dans l’excitation et la frénésie des débuts, le groupe affiche à l’époque une stabilité à toute épreuve avec notamment un line-up qui n’a pas bougé d’un iota depuis 1988 et les premiers pas de Cannibal Corpse du côté de Buffalo. Et ce n’est évidemment pas la seule constante puisqu’en dehors de l’artwork de Vincent Locke toujours aussi peu subtil et sujet à bien des censures, le groupe rempile pour la troisième fois consécutive aux Morrisound Studios en compagnie de l’inévitable Scott Burns. Les années 90 quoi…
Dans la continuité d’un
Butchered At Birth sorti quelques mois auparavant,
Tomb Of The Mutilated s’inscrit dans une veine définitivement plus Death que Thrash. Pour commencer, la production gagne ici en profondeur et en puissance tout en restant bien évidemment très marquée par ce nouveau passage aux Morrisound Studios. On retrouve donc la patte du célèbre producteur américain avec un son finalement toujours très compact pour ne pas dire étouffé. Alors c’est vrai, l’album à de ce côté-là bien mieux vieillit que ses deux prédécesseurs mais la touche de Scott Burns reste encore évidente.
Ensuite, les influences Thrash, bien que toujours présentes, ont effectivement pas mal diminuées depuis
Eaten Back To Life. Pourtant, Cannibal Corpse continue bel et bien d’affoler les compteurs le temps de séquences menées avec l’envie évidente d’en découdre mais dans l’ensemble, les passages à base de tchouka-tchouka et autres délices hérités de la scène Thrash des années 80, ont sensiblement diminué. A la place, davantage de séquences de blasts plus ou moins rapides qui vont venir renforcer le côté implacable que revêt désormais le Death Metal des Américains. Résultat des courses,
Tomb Of The Mutilated s’impose, en tout cas à l’époque, comme l’album le plus rapide et intense des Floridiens.
Enfin, et Høsty l’avait déjà évoqué lors de sa chronique du précédent album, le chant de Chris Barnes s’est très largement étoffé depuis leur premier album. Terminé les lignes de chants arrachées, place désormais à un growl profond et caverneux au débit toujours aussi impressionnant. Les cris de hyènes que l’on retrouvera sur
The Bleeding ne sont pas encore de la partie mais cette voix bestiale et beaucoup plus gutturale qu’il est d’ailleurs l’un des premiers à avoir développer de la sorte va ainsi alimenter l’univers résolument gore et sanglant imaginé par Cannibal Corpse (en plus de quelques samples bien choisis comme cette confessions d’Arthur Shawcross aka The Genesee River Killer sur "Addicted To Vaginal Skin" ou ces enfant qui jouent dans une cours de récréation à la fin de "Necropedophile").
La mutation du groupe, si elle n’est pas encore tout à fait complète (celui-ci gagnera plus tard en lisibilité, en puissance et en technique), se poursuit ici le temps d’un album radical (ramené dans le contexte de l’époque) dont la côte de popularité n’est aujourd’hui plus à démontrer. Bien sûr, l’épisode Ace Ventura où l’on y aperçoit Cannibal Corpse sur scène en train de jouer "Hammer Smashed Face" n’y est pas étranger (je vous invite à lire
ici l’interview de Paul Mazurkiewicz sur le sujet) mais c’est clairement avec
Tomb Of The Mutilated que les choses ont commencé à sérieusement décoller pour les Floridiens. En tout cas on ne peut pas nier que les quelques morceaux qui s’y trouvent n’ont aujourd’hui rien perdu de leur efficacité. Une leçon de Death Metal en neuf épisodes dispensés par l’un des maîtres en la matière.
Outre ce "Hammer Smashed Face" d’anthologie avec notamment cette introduction inoubliable à rendre débile n’importe lequel des plus grands philosophe de l’époque des Lumières, on trouve également d’autres tubes tout aussi fameux tels que "I Cum Blood" ou "Addicted To Vaginal Skin". Bref, cet album est tout simplement une succession de titres tous plus redoutables et efficaces les uns que les autres, entre séquences explosives menées tête dans le guidon, décélérations lourdingues taillées pour se rompre les cervicales, passages thrashisant histoire de rester en jambe et pour couronner le tout un groove insolent sublimé par les lignes de basses monstrueuses d’Alex Webster. Une leçon de Death Metal je vous dis !
Écrire une chronique d’un album qui a célébré l’année dernière son quart de siècle est toujours un exercice un petit peu vain. En effet, que dire de plus à son sujet qui n’ait pas déjà été évoqué mille fois ailleurs ? De toute façon, tout le monde sait de quoi il retourne puisque Cannibal Corpse est probablement à ce jour la plus grosse machine Death Metal en activité dans le circuit. Il n’empêche que cette chronique manquait à Thrashocore et c’est aujourd’hui chose réparée. En attendant,
Tomb Of The Mutilated marque la fin d’une période particulièrement faste pour le groupe américain et le début de conflits internes et des changements de line-up que l’on connait bien (le départ de Bod Rusay en 1993 qui préférera se concentrer sur une carrière de moniteur de golf et surtout celui de Chris Barnes dont la qualité des prestations vocales et l’attitude le feront se faire dégager après l’enregistrement de
The Bleeding, prochain album de Canniboul à se faire chroniquer par mes soins).
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