On pourrait croire comme ça que Mayhem est un groupe qui, tout au long de cette tumultueuse carrière, a toujours su faire l’unanimité, cela en grande partie parce qu’il est de ces formations ayant contribué au développement et à l’essor d’un genre qu’il façonne depuis la fin des années 80. Pourtant, aussi surprenant que cela puisse paraître, cela n’a jamais vraiment été le cas. Car si la majorité s’accorde en effet à dire que
De Mysteriis Dom Sathanas est l’une des pierres angulaires du Black Metal et l’un des plus grands albums du genre, beaucoup plus contrastés sont les avis concernant le reste de la discographie des Norvégiens. Et peut-être même encore davantage depuis le départ de Blasphemer il y a onze ans. Il faut dire que Mayhem a toujours su emprunter des chemins de traverses n’étant pas nécessairement du goût de tous. Des choix souvent très intéressants (le tortueux
Grand Declaration Of War) mais beaucoup trop marqués pour plaire à tout le monde. Pour autant, toujours aussi nombreux sont ceux qui attendent quasi-religieusement chaque nouvelle offrande de l’entité norvégienne. Ce
Daemon ne déroge pas à la règle.
Après dix-neuf ans passées dans le giron du label Season Of Mist, Mayhem a décidé qu’il était temps d’aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs. Le groupe a ainsi trouvé refuge chez Century Media qui en cette période de fin d’exercice 2019 doit se frotter les mains avec un large sourire de satisfaction (petit rappel des faits, le label a sorti cette année les derniers albums de Blood Incantation, Borknagar, Vitriol, Insomnium, Possessed et quelques autres pointures capables de ramener elles aussi une large part de ces bénéfices tant escomptés). D’ailleurs, comme souvent avec la structure allemande,
Daemon est proposé dans une version digibook "limitée" particulièrement réussie (le fourreau, l’artwork, les diverses illustrations...) avec en guise de bonus permettant notamment de justifier la légère différence de prix, deux titres inédits bien loin de faire pâle figure face au reste de l’album. Du coup, si vous en êtes encore à hésiter bah n’hésitez plus en fait…
Vous l’aurez donc probablement déjà compris mais
Daemon est, au moins en ce qui me concerne, un excellent cru. Tout d’abord, si vous partagiez l’avis de FleshOvSatan concernant la production d’
Esoteric Warfare et notamment son manque de puissance, il y a fort à parier que vous retrouviez ici le sourire. L’enregistrement de la batterie et du chant au Necromorbus Studio n’y est probablement pas étranger. Les autres instruments ont quant à eux été enregistrés aux Pays-Bas et en Norvège pour un mastering final signé Thomas Johansson (Centinex, Mors Principium Est, Nuclear Assault, Soilwork, Watain...). Le résultat, à défaut de véritablement surprendre en ces temps où les productions modernes, équilibrées et efficaces pullulent, renoue en tout cas avec une dynamique qui, il est vrai, faisait quelque peu défaut à son prédécesseur alors handicapé par une production molle et sans relief. Entre les guitares très en avant de Teloch et Ghul, la batterie dominatrice et particulièrement volontaire de Hellhammer, la basse agressive et toujours sur le qui-vive de Necrobutcher et le chant vicieux et malfaisant d’Attila, Mayhem ne fait clairement pas son âge, assurant l’exécution de son Black Metal avec une poigne de fer indiscutable.
Cette étreinte, le groupe ne la relâche quasiment jamais, menant ce
Daemon à un rythme souvent haletant ("The Dying False King", les premières mesures menées tambour battant d’"Agenda Ignis", "Worthless Abominations Destroyed"...), parfois suffocant ("Aeon Daemonium", "Daemon Spawn"...), généralement sans détour ("Falsified And Hated", "Of Worms And Ruins"...) et surtout d’une manière qui rappelle finalement les grandes heures de
De Mysteriis Dom Sathanas. Car une chose est sûre, Mayhem semble en avoir plus ou moins terminé - en tout cas pour le moment - avec ces riffs et autres structures tarabiscotés et pour le moins hermétiques (même si le riffing demeure tout de même plus élaboré et dense que sur leur premier album). Ce nouvel opus se caractérise ainsi par une immédiateté retrouvée qui, clairement, ne laisse pas l’auditeur indifférent. Entre les trémolos typiquement norvégiens et autres riffs glacés redoutables du duo Teloch/Ghul (pour le coup bien inspirés), les assauts soutenus d’un Hellhammer décidément en très grande forme et le chant possédé, halluciné, illuminé et inquiétant d’Attila qui confère sans surprise à l’atmosphère générale un aspect sombre et diabolique ainsi qu’une aura religieuse particulièrement forte, on retrouve un Mayhem plus agressif que jamais pour un résultat sans faille et d’une efficacité absolue.
Si
Daemon n’offre en soit aucune véritable surprise, capitalisant ainsi sur une formule somme toute assez classique rendue célèbre par cette pièce-maîtresse qu’est
De Mysteriis Dom Sathanas, difficile de jouer l’indifférence face à un disque aussi savamment exécuté. D’une grande homogénéité malgré certains changements de rythmes, ce sixième album est définitivement l’un des meilleurs que le groupe ait sorti à ce jour. Porté par une production puissante et dynamique, ces nouvelles compositions de Mayhem se concentrent essentiellement sur l’attaque en prenant soin néanmoins de développer à chaque fois une atmosphère sombre et malfaisante. Enfin, et surtout parce que je ne sais pas comme l’insérer dans cette chronique, mention spéciale à l’excellent "Falsified And Hated" dont on appréciera le petit clin d’œil porté à Burzum avec ces notes synthétiques qui ne devraient pas manquer de faire écho aux amateurs de Varg Vikernes le musicien (oui parce que l’adepte de self-défense et de survivalisme vivant en Corrèze, on s’en fout un peu à vrai dire). Bref, ce nouveau Mayhem est excellent, et si vous pensez l'inverse c'est malheureusement que vous avez tort.
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