Aria - Baptizing with Fire
Chronique
Aria Baptizing with Fire
Durant les années 2001-2002, les tensions au sein d'Aria ne font qu'augmenter. Kipelov, qu'on savait déjà pérégriner dans d'autres formations, annonce vouloir quitter le groupe pour former son propre projet solo. Durant leur prestation au grand Nashetvie festival, le Woodstock russe, les tensions croissent ; le chanteur refuse de poser sa voix sur un nouvel album déjà écrit par Dubinin et Kholstinin. Deux camps se créent alors comprenant, dans l'un, Kipelov (chant), Terventiev (guitare), Maniakin (batterie) et leur manager Rina Lee ; dans l'autre, Dubinin (basse), Kholstinin (guitare) et Yuri Sokolov, leur producteur. Après le dernier concert de la tournée, le 31 août 2002, tous les membres du camp Kipelov quittent le groupe pour entreprendre, dès le lendemain, la carrière d'un nouveau groupe nommé sobrement Kipelov.
Il faut de nouvelles recrues pour gonfler les rangs. Les membres restant font appel à Sergei Popov (ex -Master ou "Mactep") aux guitares, à Maxim Udalov à la batterie (celui-ci avait déjà pris part à Aria sur l'album Geroi asfalta) et à Arthur Berkut au chant, qui avait déjà posé sa voix sur tout un tas de groupes dont notamment le premier album du projet solo éponyme de Sergei Mavrin, une sorte de heavy / prog... plutôt déconcertant et guère appréciable. Avec ce nouveau line-up, le groupe peut sortir l'album qu'avaient composé Dubinin et Kholstinin, Kreshenye agniom (comprendre "Baptizing by Fire"). Tout ce sang (presque) neuf a-t-il raison de la malédiction qui pesait sur Aria depuis les trois derniers albums ? Oui... du moins, en partie.
En somme, derrière un emballage plutôt appréciable (jolie pochette et prod bien meilleure que sur l'album précédent, plus testostéronée) Aria nous sort la carte Judas Priest pour leur neuvième disque, une formule qui rappelle Generator zla mais avec moins de ballades et d'expérimentations ; formule qui a des avantages comme des inconvénients. La première des bonnes nouvelles, c'est que le groupe nous indique clairement que la période des mid-tempo / power ballads sans intérêt est révolue avec l'opener "Patriot" qui, après quelques power chords introductifs, lance son couplet à toute vitesse à grand renfort de double pédale et de tremoli. L'excellent refrain confirme ce réveil : catchy, fédérateur, facile à retenir, il nous présage un Aria en forme pour le reste du disque. Le reste de l'album ne se montre pas si dynamique : "Baptizing by Fire", "Colosseum", "The Hangman", "White Flag", "The Battle" et "Dark Count Feast" renouent avec un hard rock fait et refait, qui passe ou casse. Avec un hard façon Skem ty ou Generator zla, il ne faut donc pas s'attendre à des compositions débordant d'imagination et qui proposent tout un tas de mélodies mémorables.
Le plus gros atout du disque, celui qui lui permet de se démarquer de ses prédécesseurs moins attrayants, est clairement sa myriade de refrains beaucoup plus forts et dynamiques que sur les anciens disques. Arthur Berkut semble vouloir faire bonne impression pour sa première occasion au sein d'un grand groupe car, si son timbre de voix se mêle parfois avec Kipelov au point d'avoir du mal à distinguer les deux, il se montre autrement plus convaincant et enjoué que son illustre prédécesseur. La triade d'ouverture "Patriot", "Baptizing by Fire" et "Colosseum" fait, à cet égard, figure d'élève modèle pour le reste de l'album : quelques mélodies un poil kitsch mais diablement entrainantes chez "Patriot", sans en faire trop, un côté fédérateur à peine caché chez "Baptizing by Fire" avec tous ses "wohooo" mélodiques en chœur, et un côté plus léger chez "Colosseum" dont la mélodie me donne une furieuse impression de déjà-vu chez un autre groupe à chaque fois que je l'écoute, sans pouvoir remettre la main sur le morceau en question.
En revanche, la qualité des refrains est bien la seule chose qui sauve ce disque d'un nouvel échec. Si d'autres éléments viennent apporter plus d'intérêt aux trois premiers morceaux (le couplet et les soli de "Patriot" ; la rythmique hachée de "Baptizing by Fire" et sa mandoline d'introduction qui passe plutôt bien ; le break aux cleans de "Colosseum" qui contraste avec une atmosphère assez lourde et sombre), la majorité de ceux qui suivent n'ont rien d'autre qui puisse attirer notre curiosité. Dans le diablement long "The Hangman" (presque neuf minutes), il faut se contenter de soli courts mais sympathiques qui, pour une fois, jouent sur des gammes plus orientalisantes et qui apportent des éléments intéressant à un morceau qui semble renouer avec l'ébauche de prog entamée sur Noch karotche dnia, en y réussissant plus ou moins. Quant aux cinq derniers morceaux du disque (plus de la moitié, quand même !), la formule générique de tout album de hard rock est utilisée en boucle, fonctionnant pour certains morceaux et pas pour d'autres, selon les affinités musicales de chacun. Rien de spécial à ajouter : un air de Judas Priest par ici (Your New World), un côté plus FM par là (The Battle)... en un mot, peu de nuances entre les morceaux.
Avec une moitié de line-up toute neuve, Aria renoue timidement avec un heavy / hard "valeur sûre", épuré de toutes expérimentations et de toutes ballades à outrance. Cette formule confortable permet tantôt des bons morceaux, tantôt des moins bons, mais jamais rien d'extraordinaire - on est toujours à des kilomètres d'un niveau de composition aussi diversifié que celui des premiers disques. Le petit plus plaisant, c'est l'arrivée de ce nouveau chanteur, Arthur Berkut, qui se montre parfaitement à la hauteur de remplacer Valery Kipelov, dont les plus mauvaises langues pressentaient que son départ entrainerait la chute d'Aria. Sans s'écrouler pour autant, le groupe ne parvient pas à redorer pleinement son blason, si ce n'est au niveau de la puissance du chant et de la qualité des refrains - on s'en contentera.
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