« Obscène » est décidément un mot qui va bien à Indian tant, lors de chacune de ses œuvres, le projet paraît lui donner sa définition sludge.
Mais cela ne veut pas dire que ses albums sont interchangeables, loin de là. Tous « obscènes », ils ont pourtant leurs identités propres, que ce soit
Guiltless et sa définition moderne du sludge « sick », le troublé et troublant
From All Purity ou même les débuts primitifs, pulsionnels, de
The Unquiet Sky, chaque œuvre semblant être la déclinaison d’un goût pour une pornographie transmise dans toute sa – hum – richesse.
Cependant, on voit clairement pourquoi
Slights and Abuse et
The Sycophant ont été mis sous la forme d’une compilation par le label Seventh Rule, comme deux jumeaux rendus siamois. Durées quasi-similaires, déroulés quasi-similaires – tout juste trouve-t-on un grand final moins gourmand que « Fatal Lack » sur la partie reprenant les titres de
Slights and Abuse –, tous deux conçus peu de temps l’un après l’autre dans les mêmes conditions d’enregistrement et de production avec Sanford Parker aux manettes : autant d’éléments concrets prouvant que cette réunion est parfaitement logique, comme une photographie d’époque de Indian peu de temps avant l’arrivée de Will Lindsay au poste de deuxième guitariste, charriant derrière lui l’atmosphère « blackened » qui marquera
Guiltless et
From All Purity.
L’atmosphère étant justement ce qui finit de rendre cette mise en commun cohérente. Soyons honnête : chaque album, pris seul, aura l’air trop maigre pour laisser développer pleinement son ambiance, malgré des titres longs où, étrangement, Indian n’est pas nécessairement à son plus évocateur. En revanche, ces cinquante-six minutes font transparaître un climat particulier, Indian, sans encore aller vers les sirènes du black metal comme il le fera par la suite, y transmettant des images d’une misanthropie cherchant dans la nuit de quoi assouvir ses penchants morbides. Une nuit on-ne-peut-plus américaine, à la fois urbaine et désertique, un terrain vague où ces routiers-ci trouvent leur tranquillité afin d’accomplir leurs œuvres. Soit une compilation qui rappelle que le dépravé Lord Mantis partage quelques gars en commun, voire laisse penser que
l’échec de Cobalt avec Slow Forever trouve ici tout le groove et la méchanceté dont il rend si frustré.
Car il y a quelques instants de bravoure sur
Slights ans Abuse / The Sycophant, malgré un ensemble qui n’échappe pas à certaines maladresses, notamment durant des parties noise et ambient encore trop timides (« Allotriophagy » ; le début de « Gloat ») ou un « Fatal Lack » bien trop long. Inutile de parler longuement de la voix de Dylan O’Toole, si intense, à la fois sadique et ulcérée, qu’elle reste une des forces majeures de Indian (un vocaliste qui continue de m’épater). Le monsieur aura marqué quiconque aura déjà croisé son chemin et c’est bien quand les compositions suivent son ordre du jour malveillant que cette petite heure se révèle la plus convaincante. Je pense à la barbarie punk qui guide « Second Death », « Lust » ou encore « Cursed Reform », leurs riffs éjaculant des giclées de sang avec une jouissance non-feinte ; aux ligotages de « Pigs in Your Open Wound » frôlant l’industriel ; aux neuf minutes terminant les tortures précédentes dans un plaisir à s’ébrouer dans la mare de fluides ainsi créée, des toms tribaux, une basse bouillonnante, des guitares aussi âpres que visqueuses – préfigurant le groove massif, anguleux et extrême dont usera Indian par la suite – finissant de nous faire plier. Tout un jardin des supplices où les Ricains se plaisent à nous tourmenter et faire de nous des apôtres de sa saleté.
Cette compilation pourra cependant en laisser plus d’un sur le carreaux, en grande partie en raison de moments trop hasardeux où on se demande bien où Indian veut en venir (les déjà-cités « Fatal Lack » et « Allotriophagy », majoritairement).
Slights ans Abuse / The Sycophant s’adresse donc avant tout aux amateurs des œuvres des Ricains, devenus plus écoutés par l’intermédiaire de Relapse Records avec
Guiltless et
From All Purity, et qui ne seraient pas encore rassasiés de sludge pervers. On les comprend, un groupe comme Indian étant, en dépit de ses défauts, étrangement fascinant.
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