J’ai été un fan absolu de
Mike Patton et ce depuis le jour où, en 1991, j’ai acquis la cassette du «
Live at the Brixton Academy » de
FAITH NO MORE. Depuis, j’ai poncé la discographie de ce dernier, me suis extasié sur à peu près tout ce qu’il a composé (tout lister ici n’aurait aucun sens), de même que la moindre de ses interventions était épiée avec un appétit quasi sexuel. Oui ce mec a contribué à radicalement changer ma façon d’écouter de la musique, parce qu’«
Adult Themes for Voice », parce que le projet
MALDOROR, parce que
John Zorn et la série des
MOONCHILD, parce que
MR. BUNGLE et, surtout, parce qu'
« Amenaza al Mundo ». Pour le dire de façon plus directe, j’achetais tout dès lors qu’il y était crédité et, concernant
FANTÔMAS, j’étais encore sous le choc de
« The Director’s Cut ». Donc, lorsque «
Delirium Cordia » est sorti, en 2004, je l’ai acquis les yeux fermés d’autant que le
line up restait inchangé :
Trevor Dunn à la basse (pensez à écouter l’excellent
TREVOR DUNN’S TRIO-CONVULSANT),
Dave Lombardo (cœur avec les doigts) à la batterie,
Buzz Osborne à la guitare et, évidemment, le père
Patton au chant ainsi qu’en charge des différentes dérives bruitistes dont il est coutumier.
S’il est peut-être amusant de se dire qu’
EXHUMED utilisera pour la pochette d’«
Anatomy is Destiny » (2003) un cliché également présent dans cet album, le concept même de l’unique titre qu’est « Surgical Sound Specimens from the Museum of Skin » me reste encore à ce jour étranger. Je me demande d’ailleurs pourquoi il s’agit du seul disque à ne pas être disponible sur le
bandcamp d’
Ipecac Recordings… Mais c’est quoi exactement «
Delirium Cordia » ? Je n’en sais foutre rien. Une sortie autant adulée que décriée, un truc totalement expérimental où, pendant soixante-quatorze minutes, des mecs bizarres se branlent sur des sons hospitaliers, mélangeant tout : le
grind jazz vers la trentième minute, l’
ambient, des chants religieux, des onomatopées, des plages de vide, du zen, Hawaii, et un tout petit peu de
FANTÔMAS, ce troisième LP étant finalement bien plus proche d’un album solo de
Patton, déjà embarqué dans son délire des bandes originales, que de ce qui avait été ou sera joué par la formation, en ayant en tête l’incroyable «
Suspended Animation » qui paraîtra un an plus tard.
Cet album, finalement, on ne sait pas vraiment quoi en faire. Evidemment, par dévotion aveugle, je ne peux pas en dire du mal et quelques passages sont tellement dingues (vers trente-six minutes) qu’ils rachètent à eux seuls le marasme dans lequel semblent s’être fourrés les musiciens. Et à côté de cela, il y a le vent et le vide, des minutes entières dont on ne sait quoi penser et où tu te demandes si les musiciens ne se foutraient pas un peu de ta gueule, adoptant la posture artistique pour te faire avaler des couleuvres et croire qu’écouter des bourrasques, c’est ce qu’il se fait de mieux en ce moment du côté de l’
intelligentsia. Moi, j’ai du mal à renier mes idoles donc tout me semble fabuleux mais, en mon for intérieur, il y a une petite voix perfide qui me hurle que c’est raté, manqué, loupé, surfait, insane, un truc pour masturbateur féru de musique concrète et des nocturnes de France Culture… Ah ? J’y reviens pourtant à ce disque étrange, parcouru de soubresauts géniaux… Pourquoi ?
De zéro à une minute : c’est une introduction, le doute n’a pas encore eu le temps de s’immiscer comme le chantait de Palmas lorsqu’il était sur la route toute la sainte journée.
D’une minute à deux minutes trente, c’est peut-être le meilleur passage du disque :
Lombardo avoine,
Patton fait son
crooner façon « retraite spirituelle » et l’auditeur naïf que je suis se dit « c’est le disque de l’année ».
De deux minutes trente à un peu moins de six minutes,
Patton fait du
Patton, il geint, ça joue un peu derrière et on est rassuré : le groupe sert à quelque chose, même si l’on ne comprend pas encore bien à quoi.
Sixième minute : des percussions, des hurlements, de la respiration ventrale, on aime bien mais cela prend hélas vite fin puisqu’à la septième minute, on fout les pieds dans un bloc opératoire et la chirurgie se passe mal. Les cloches sonnent, mais pour qui ?
Huit minutes trente, rencontre du troisième type. Un peu de guitare, le mec s’emmerde à regarder son chanteur larmoyer dans son micro, c’est triste.
De 10 à 14 minutes, c’est le vide. On tente une réanimation sur un cœur malade, la tension remonte jusqu’à la seizième minute mais c’est encore insuffisant. Cassure nette, l’esprit minimaliste reprend le dessus.
Jusqu’à vingt-minutes trente-huit il ne se passe plus rien, le batteur se souvient qu’il y a des toms en face de lui, je découvre qu’un bassiste fait partie du projet, il y a à nouveau des cloches mais elles me collent la migraine.
Oh et puis merde ! Je ne vais pas me taper un découpage super chiant juste pour expliquer qu’il faut aller jusqu’à la minute cinquante-quatre pour retrouver un semblant de vie, alors qu’à compter de la cinquante-cinquième, c’est fini, on se farcit un quart d’heure de vide et là je ne peux plus cautionner la démarche parce que c’est simplement chiant à écouter, et pourtant Dieu sait que j’ai fait des efforts colossaux par le passé pour trouver des qualités à
MALDOROR, à certaines BO, voire à
PEEPING TOM, le dernier
TOMAHAWK ou encore les collaborations avec
KAADA. Donc même si les comptes sont largement en la faveur du Général si j’englobe la globalité de sa carrière, j’avoue que ce «
Delirium Cordia », même s’il contient quelques éclairs de génie, ne laissera pas de souvenirs impérissables, même aux plus indulgents des auditeurs. 0/10 ou 10/10, il n’y a pas trop de place pour les tièdes (oui, moi je mets 5 pour ne pas trancher, Jésus me vomit par sa bouche).
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