Ce qui m'a toujours impressionné dans le metal, c'est ce formidable instinct de survie dont le genre ne s'est jamais départi en presque quarante ans d'existence. Car il fallait des reins solides pour survivre à l'absence totale de suivi des médias (presse spécialisée exceptée), aux campagnes de dénigrement orchestrées sur le dos du grunge au pays de l'Uncle Sam, sans oublier les chasses aux sorcières occasionnelles même pas dignes de Joseph McCarthy (JUDAS PRIEST traîné devant les tribunaux pour incitation au suicide). Il faut vraiment que les racines du "mal" soient profondes pour que, années après années, des vétérans de l'avoine sortent de leur retraite métallique pour en découdre sur scène, voire sur disque. Naturellement, la marée montante de reformations frappe aujourd'hui une autre génération de groupes que les dinosaures des seventies. Succédant à la résurrection du thrash (EXODUS, DEATH ANGEL), le comeback des hérauts du death metal voit surgir de la tombe des chefs de meute du calibre de CARCASS, AT THE GATES ou OBITUARY (déjà deux albums depuis 2005). Derniers revigorés en date, et pas des moindres, les cultissimes bataves de PESTILENCE. Silencieux pendant de trop longues années, Patrick Mameli a remis le pied à l'étrier en fin d'année dernière avec C-187, un projet original et percutant emmené par des tueurs professionnels (Tony Choi, Sean Reinert) bien connus des lecteurs de Thrashocore. Qu'on ait ou non apprécié ce "Collision" au cocktail gangsta jazzcore détonnant, le grand Pat prouvait sur ce disque qu'il n'avait pas perdu la main en matière de riffs killer et de leads décalées. PESTILENCE étant back from the dead depuis déjà un bon mois, l'heure est venue de se pencher sur la discographie d'un des rares groupes européens capable, en son temps, de rivaliser avec le DEATH de Chuck Schuldiner.
Car la carrière des deux géants du death metal sembla longtemps s'écrire en parallèle, chaque album des deux groupes répondant du tac au tac aux aspirations progressistes de leurs leaders respectifs. "Leprosy" était un monstre de puissance et de férocité ? PESTILENCE répliquait aussi sec avec
"Consuming Impulse", un idéal de death sauvage et débridé, aux contraintes techniques toujours plus élevées. DEATH se paye l'arrivée d'une étoile montante de la six cordes en la personne de James Murphy (en 1990, pour l'album "Spiritual Healing") ? PESTILENCE file enregistrer "Testimony of the Ancients" au Morrisound studio en compagnie de Scott Burns (NAPALM DEATH, SEPULTURA et ... DEATH) ! c'est ce qui s'appelle mettre la pression. Sorti la même année que "Human", "Testimony" marque une première rupture avec les compos "directs au foi" auxquelles les bataves nous avaient habitués. Martin van Drunen parti sévir chez ASPHYX (qui se reforme d'ailleurs!), Patrick Mameli passe derrière le micro et extirpe la bête du caveau grouillant de la redondance rythmique qui guette 90% de la scène death de l'époque. Première curiosité, la présence de courts instrumentaux, placés à intervalles réguliers avant chaque titre, qui donnent à l'album un cachet particulier. Combinés au jeu du chat et de la souris entre des riffs bien gras et des guitares lead chassant à très haute altitude, l'ensemble sonne comme un terrain de jeu idéal entre le paradis et l'enfer, à l'image des deux premières tuerient qui ouvrent "Testimony" : rapide et incisif, "The Secrecies of Horror" n'oublie pas les bienfaits d'un death metal calorique gavé de roulements qui exploite au mieux les qualités de sprinter de Marco Foddis. Sa spéciale ? l'accélération progressive ou la reprise en main brutale d'un mid tempo déjà bien accrocheur (cette baston à 1:59 ! un vrai régal). Tout juste remarque-t-on l'emploi de sample discrets sur le refrain et le changement des cordes vocales, Mameli officiant dans un registre très proche de son prédécesseur. Mais si Scott Burns a à ce point épuré le son de PESTILENCE, ce n'est pas pour hériter d'un
"Consuming Impulse" bis. Repris récemment par les excellents SYMBIOSIS, "Twisted Truth" réunit anges et démons à la même table, scellant en 4:02 de grâce l'alliance contre nature entre lyrisme (les solos de Uterwijk et Mameli sont de toute beauté) et intensité (les riffs écrasent tout sur leur passage).
Une volonté d'aérer leur fond de jeu qu'on retrouve à plusieurs reprises sur "Land of Tears" (le break à 2:23, difficile de ne pas penser à DEATH pour le coup) ou encore "Presence of the Dead" à 3:25. Même le dévastateur "Stigmatized", pourtant mis sur orbite par une batterie au taquet, y va de son petit break mélo avant la castagne finale. Qu'on se rassure, le quota d'agressivité déployé ici reste largement supérieur à la moyenne ; les assoiffés de sang étancheront leur soif avec les plus conventionnels "Lost Souls" et "Prophetic Revelations", parfaits garants de la trademark PESTILENCE : des solis volatils et joueurs en opposition frontale avec des riffs dressés pour tuer, voire la même approche appliquée aux riffs eux mêmes, en contraste avec une batterie dynamo tenant presque toute la barraque rythmique (on n'oublie pas le travail de sape de Tony Choi à la basse) sur ses (larges) épaules. Dans l'attente fébrile d'un 5ème abum annoncé à la croisée brutale des chemins
"Spheres" et "Testimony", on se repassera en boucle les 9 titres de ce must-have intemporel et indispensable.
10 COMMENTAIRE(S)
07/10/2016 22:56
Leurs trois premiers albums sont monstrueux et progressifs dans l'énergie du groupe.
Malleus est clairement dans un autre Thrash, et est hyper intéressant, très efficace.
Consuming, c'est déjà une étape de franchie en terme de production. Ca balance bien comme il faut.
Et Testimony... Un sommet ! C'est tellement bien senti, ça s'écoute tout seul sans aucune indigestion auditive.
Ces trois albums sont cultissimes !
06/09/2016 12:58
Dommage qu'après ça soit parti un peu dans du n'importe quoi ...
17/11/2013 07:01
04/01/2011 16:05
01/03/2008 14:22
28/02/2008 06:25
Des morceaux ayant chacuns leur identité et leur type d'accroche, quelques "tubes" intemporels: merci d'avoir fait cette chro Thomas, je vais pouvoir compléter la liste de mes albums de référence dans mon profil Thrasho !
27/02/2008 20:37
27/02/2008 19:27
27/02/2008 19:06
27/02/2008 18:52