Emeth avait tout pour réussir. Une envie furieuse de bourriner, un plaisir certain à donner dans le complexe et le technique, un univers bien particulier, une mentalité exemplaire et de grosses bites. Les Belges avaient franchit pas à pas les marches de la gloire depuis leur 1er album
Insidious. Il n'en restait plus qu'une, la dernière, celle qui devait conforter à jamais Emeth dans son statut de groupe qui compte. Seulement voilà, la formation a achoppé et a dévalé l'escalier du succès et de la reconnaissance bien plus vite qu'elle ne l'avait monté. Une chute aussi brutale qu'inattendue...
Bon dit comme ça on a l'impression que
Telesis, le nouvel album de la bande à Tom Kimps, tient de la bouse intersidérale, ce qui n'est évidemment pas le cas. Mais il fallait bien romancé l'immense déception causée par une nouvelle orientation musicale tellement facile...
Telesis ne sent donc pas complètement la matière fécale. Le fumet savoureux de l'ancien Emeth effleure par moment nos narines sevrées par tant de fadeur inhabituelle de la part d'un cuisinier si prometteur. Le groupe n'a ainsi pas perdu son envie de taper vite et fort, les blast-beats imposant ici très souvent leur loi implacable. Avec une production nickel chrome, croyez bien qu'on mange et qu'on est plusieurs fois resservi. Le quotient brutalité n'affiche donc pas encore le zéro pointé. Nos oreilles, mises à mal par trop de sonorités banales pour un maître son de si bonne réputation, goûtent d'autant plus la joie procurée par des soli épicés et cuits à point. Elles frétillent également à l'écoute d'une basse au caractère bien trempé qui a su s'imposer dans le mix. Peu étonnant lorsque l'on sait que monsieur Erlend Caspersen (Blood Red Throne) lui-même en a pris le manche! Le rythme lui garde encore un peu de son tempérament endiablé et dynamique (du blastage en pagaille on l'a dit), souvent agrémenté de rythmiques thrashy qui font toujours leur petit effet et parfois de passages plus lents et lourds afin de varier les saveurs. Emeth avait aussi reçu des lauriers pour ses paroles profondes et intellectuelles sur la société et l'esprit humain, lauriers qu'on ne lui retirera pas tant les lyrics se révèlent écrites avec le même talent. Les qualités techniques des Flamands ne pourront non plus être remises en cause, les onze titres de
Telesis, composés et ficelés de mains de maître montrant un groupe mature, professionnel et sûr de ses acquis. Certains riffs, placés ici et là comme les derniers soubresauts d'un géant à l'agonie, s'avèrent même presque au niveau des albums précédents. Et bien sûr, on retrouve le chant surpuissant de Tom Kimps qui a décidé de reprendre un peu de ses growls d'
Insidious qu'il avait laissés de côté sur
Reticulated pour des vocaux moins gutturaux et plus arrachés, clairement plus hardcore. Le bonhomme nous offre ainsi une prestation fort couillue à mi-chemin entre les deux premiers opus.
Et des passages précis remarquables, je pourrais également vous en citer quelques uns, comme la fin jazzy de "Silence Goes Unheard", le break ultra calorique de "Telesis" avec une basse jouissivement vrombissante, le génial solo tourbillonant de "Monolith", la basse qui fait encore des siennes sur "The Doer Alone Learneth", le magnifique instrumental d'obédience old-school avec arpèges sombres sur son crachotant intitulé "Aquarian" ou encore la furie démente de blasts vers la fin de "Will To Power", sur lequel le chanteur de Leng Tch'e, Boris Cornelissen, se trouve d'ailleurs invité. Voyez donc que ce
Telesis ne manque pas de qualités, ce pourquoi j'ai dû canaliser ma colère et ma déception afin de mettre une note juste.
Mais je ne puis pardonner la trahison à laquelle s'est livrée Emeth sur cet opus. Au revoir l'intense brutalité d'
Insidious, adieu technique complexité de
Reticulated, place désormais est faîte à un death métal moderne fade et sans âme qui n'a finalement plus grand chose de death métal. Hé oui, Emeth a répondu aux sirènes malveillantes de la mode et du conformisme. Bien navrant de la part d'une formation aussi talentueuse. A croire que le passage du guitariste Matty Dupont chez Aborted l'a complètement changé puisque le rapprochement entre la nouvelle incarnation d'Emeth et la bande à Sven s'avère désormais tout à fait pertinent. Le nouveau guitariste, Valéry Bottin (qui a remplacé Peter Goemaere parti chez...Aborted), n'a lui semble t-il pas eu trop d'influence puisqu'il n'a participé à la composition que de deux morceaux. Enfin bref, quelles que soient les raisons de cette nouvelle orientation musicale, le fait est là, nous avons perdu l'Emeth qu'on aimait. Nous avons maintenant le droit à une production certes aussi puissante qu'un réacteur de fusée mais complètement aseptisée avec une batterie triggée à mort. Viennent également parasiter ces saccades rythmiques typiques du modern death, proches des mosh-parts du hardcore. Si elle ne dérangent pas chez certains groupes, leur présence ici me fait de la peine. Et pour couronner le tout,
Telesis se termine par un instrumental, "Aum", totalement inutile même si son ambiance tribale de guerre impose une menace plutôt bien ressentie. Mais sur près de 3 minutes avec quelques samples de mauvais goût, je dis non.
Il fallait peut-être s'en douter dès la mise en ligne de l'artwork très moderne (et pas terrible du tout) ou dès l'avertissement de collègues webzineux/forumers suite à de nouveaux morceaux joués sur scène. En tout cas, moi, ça m'est tombé dessus sans que je m'y attende vraiment. Je me demande ce qu'Emeth fait sur Brutal Bands maintenant! Heureusement, on n'est pas encore au niveau du retournement de veste d'un Infected Malignity ou d'un Cryptopsy, tout n'est pas perdu! Comme je l'ai dit
Telesis a plein d'atouts intéressants à faire valoir et le groupe devrait faire tout un tas de nouveaux adeptes plus sensibles à une accessibilité directe. Mais moi, ce n'est pas vraiment ce que j'attendais de mon Emeth...
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