Au delà des riffs francs du collier débordant d'énergie punk, la première chose qui frappe chez les façonneurs de son de KYLESA, c'est la voix. Boostées par des gueulantes de chant clair puissantes et ennivrantes, les compos louvoient sans cesse entre plusieurs chaises musicales, échappant d'office à toute tentative d'étiquetage trop précise. Crust, stoner, sludge ? Metal psyché ? Faîtes vos jeux et rien ne va plus, du moins tant que vous n'aurez pas misé quelques pièces sur cette excellente formation
from Savannah, Georgia. Comme BARONESS oui, dont on retrouve le producteur attitré, Phillip Cope, au poste de guitariste, ainsi que leur frontman John Dyer Baizley, qui signe une fois de plus un artwork d'une grande singularité. A l'image du chant donc, on y revient, qui change radicalement des raclements de gorges irriguées au bourbon, normalement de rigueur lorsqu'on cause ravalement de façades seventies à grand renfort de rythmiques stoner bien grasses. Premier point fort, ces lignes de chant androgynes qui, renseignements pris, perdent en mystère auditif ce qu'elles gagnent en logique sexuelle. Je vous le donne en mille, le fameux gueulard est en réalité ... une gueularde.
Direction l'O.R.L. pour votre serviteur, et le panthéon des meilleurs groupes du genre, s'il en est un, pour KYLESA (prononcez KY-LESS-AH, dérivé d'un terme bouddhiste désignant toute chose empêchant l'individu de prétendre à l'enrichissement spirituel). Pour ma défense d'aimable chroniqueur amputé des oreilles, précisons que le groupe prend un malin plaisir à brouiller les pistes en adjoignant à la frontwoman Laura Pleasants (qui joue aussi de la guitare, depuis ses 18 ans seulement) un co-chanteur au registre plus extrême, l'ex-DAMAD Philipp Cope. Et encore, on ne vous parle même pas de la présence du duo de batteurs Hernandez/McGinley, chose qui, vous vous en doutez, m'avait bien entendu (façon de parler hein ? HEIN ? QUOI ?) échappé avant inspection du livret. Oui Cyril, je sais, ça rend sourd mais avouez qu'il est bien difficile de ne pas se palucher à l'écoute des formidables « Scapegoat », qui cogne vraiment très dur d'entrée de jeu (qui a dit que la miss hurlait façon Al Jourgensen ?), et « Unknownawareness », dont les sublimes et déchirantes complaintes lead n'ont pas fini de faire tourner les têtes. Deux titres d'exception sur lesquels KYLESA appose sa marque de fabrique, faîte d'un irrésistible mélange entre mélancolie furieuse et groove infernal, sans oublier le recours aux effets divers et variés sur les guitares, qu'on a rarement connues aussi vivantes et sauvages que sur ce quatrième full length (après l'éponyme,
« To Walk A Middle Course » en 2005 et
« Time Will Fuse Its Worth » en 2007). En bons adorateurs du Floyd, Pleasants et Cope confèrent à KYLESA une dimension psychédélique qui renforce l'authenticité de la bête, quitte à piétiner les terres fertiles de BARONESS sur « Running Red » ou « Only One ». La filiation entre les deux groupes (qui ont déjà fait tournée commune en 2008, avec TORCHE) est réelle mais s'arrête néanmoins aux portes du progressif cher à BARONESS, KYLESA conservant envers et contre tout un pied solide en territoire hardcore (les titres de “Static Tensions” ne franchissent jamais la barre symbolique des cinq minutes).
Plus courtes, plus directes, plus massives, les dix pièces maîtresses de cet album bénéficient à plein de la production très dense de Phillip Cope et cumulent les artifices pour captiver un auditoire déjà pris à la gorge par la monstrueuse dynamique de l'ensemble. Samples, percussions, nappes de guitares éthérées tissant une trame expérimentale permanente en arrière plan, sonorités orientales sur “To Walk Alone”, carresses de chant clair féminin sur “Perception”, piano, tout y est, jusqu'aux textures rythmiques savamment distillées par les deux batteurs, qui travaillent leur complémentarité en studio comme le feraient deux guitaristes. Violemment addictif, incroyablement riche et varié, parfois délicieusement planant, “Static Tensions” vous fera voir du pays mais à dos de carne, faisant étape dans les bouis-bouis les plus mal fréquentés pour rappeler aux égarés du genre les principes fondamentaux : un bon disque de metal, c'est avant tout une bonne baston d'arrière cour.
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